Si la réélection de M. Bouteflika est perçue comme une victoire des uns sur les autres et non une avancée démocratique, le FLN pro-Benflis sera sérieusement menacé. Au lendemain du scrutin présidentiel qui a reconduit M.Bouteflika pour un second mandat, le coordonnateur du mouvement de redressement, Abdelaziz Belkhadem, relance le scénario portant crise du FLN. «Nous espérons organiser le congrès réunificateur avant les festivités du 50e anniversaire du déclenchement de la Révolution», a déclaré M.Belkhadem, vendredi, sur la chaîne satellitaire Al Arabya. Le choix de cette date hautement symbolique n'est pas fortuit : c'est le 1er-Novembre 1954 que le parti libérateur de l'Algérie du joug colonialiste est né. «Le parti du FLN a été dévié de sa mission par des éradicateurs et nous comptons le redresser», a ajouté Abdelaziz Belkhadem sur la même chaîne. Un autre rendez-vous crucial attend donc le parti majoritaire dès septembre prochain. La direction et les résolutions issues du 8e congrès étant annulées par décision de justice, Ali Benflis n'aura d'autre choix que de se conformer au verdict du Conseil d'Etat, à savoir convoquer un autre congrès avant les redresseurs. Dans cette nouvelle course contre la montre, c'est aussi le sort de M.Benflis en tant qu'homme politique qui se joue. «Je poursuivrai le combat pour la démocratie», a-t-il déclaré vendredi dans une conférence de presse, indiquant ne pas être de «ceux qui renoncent à leur conviction et principes». Deux solutions se présenteront alors au parti majoritaire à l'occasion de la prochaine rentée sociale où le vieux parti basculera définitivement et pour la première fois depuis sa création, dans l'opposition, où il va se dissoudre complètement au sein de la coalition présidentielle. Cette dernière demeure tronquée de l'apport de l'appareil du FLN en tant que tel. La bataille pour le FLN légaliste sera très dure maintenant que le mouvement de redressement semble avoir pris de l'assurance avec l'élection de M.Bouteflika. Il s'agira pour M. Benflis de trouver suffisamment de force pour réunir les moyens humains et matériels et galvaniser le moral de ses troupes complètement terrassées par une défaite électorale, pour passer ensuite aux écueils administratifs et juridiques qu'il ne manquera pas de rencontrer. Ce qui n'est pas le cas de ses adversaires politiques pour qui la voie semble déjà tracée. Après le congrès-étape, il ne leur restera qu'à fignoler les préparatifs du congrès réunificateur à la veille du 50e anniversaire du déclenchement de la Révolution et adjoindre au succès de leur candidat celui de leur congrès. De ce point de vue, les lendemains du FLN légaliste ne s'annoncent pas sous de bons auspices. Si pendant plus d'une année, il a réussi à se maintenir face aux tracas juridiques, la bataille qui l'attend sur le terrain sera déterminante et ce, selon la conviction de ses militants. Il est évident que la coalition présidentielle tentera de phagocyter «l'aile récalcitrante» du FLN, mais y réussira-t-elle avec le fossé qui s'est creusé entre les deux tendances du parti pendant toute la durée de la crise et durant la campagne électorale? De l'avis de plusieurs observateurs, cette coalition présidentielle constitue l'embryon de la nouvelle topographie politique induite par le raz-de-marée de Bouteflika. Une mosaïque qui regroupe les principaux courants agissant au sein de la société. Un courant dans lequel la référence à la religion n'a pas forcément une incidence sur la politique, le RND, un courant islamiste qui s'oppose à l'usage de la violence dans la pratique politique et partisan de l'alternance au pouvoir, le MSP. Et enfin, un courant nationaliste symbolisé par le mouvement de redressement. Face à ce bloc «compact» dont l'alliance est basée sur l'alternance et non sur des référents idéologiques, le FLN pro-Benflis aura fort à faire. Il est d'autant plus menacé que la réélection de M.Bouteflika n'est pas perçue comme une victoire dans l'avancée du processus démocratique, mais la victoire des uns sur les autres.