Le maintien d'Ahmed Ouyahia à la tête de la chefferie du gouvernement est plus qu'une nécessité pour le président de la République. Le chef de l'Etat, fraîchement réélu, se trouve devant un dilemme difficile à résoudre par une simple décision politique tant la complexité du problème est avérée. En effet, le président de la République a besoin de la majorité parlementaire à l'image de celle que lui a conférée le scrutin du 8 avril pour faire aboutir, sans aucune entrave, son programme axé sur la réconciliation nationale. Mais la plus grande question de fond a trait à la façon de faire voter l'avant-projet de loi sur les hydrocarbures sans toutefois froisser son allié d'hier, en l'occurrence la Centrale syndicale. D'ailleurs, dans une déclaration à une revue étrangère reprise par la revue de Sonatrach, Ahmed Ouyahia a indiqué que l'une des priorités économiques du gouvernement sera l'avant-projet de loi sur les hydrocarbures. Pour rappel et au summum de la polémique, à Alger, sur l'une des lois les plus confuses, les Américains, sans crier gare, ont fait une intrusion impromptue dans ce débat national. Sur ce point, ils ont été les premiers à participer à ce débat conseillant notamment à l'Algérie une ouverture rapide à la concurrence de l'ensemble des branches d'activité du secteur de l'énergie. «Vous avez bien fait de lancer cette démarche importante que nous soutenons» a déclaré l'ex-ambassadrice américaine Janet Sanderson lors de l'ouverture du Salon de l'énergie en 2002 à Alger. Le secrétaire adjoint au département américain du Commerce, en visite à la même période à Alger, s'est lui aussi mis de la partie. Il faut que «l'Algérie revoie sa législation surtout dans le secteur des hydrocarbures pour une plus grande participation des entreprises étrangères» a-t-il déclaré ajoutant que «les entreprises américaines sont prêtes à aider à exploiter au mieux ses ressources afin que celles-ci soient disponibles sur le marché mondial». C'est dans ce contexte quelque peu ambigu qu'intervient la reconfiguration du champ politique parlementaire et l'entrée en lice de l'alliance présidentielle composée du RND, du MSP et du mouvement de redressement du FLN. D'ailleurs, les trois formations politiques en question faisaient partie de la coalition gouvernementale de 1977, expérience renouvelée en 1999 pour soutenir la mise en oeuvre du programme du président de la République. Aujourd'hui et devant les impératifs, cette alliance veut constituer la majoritaire présidentielle au sein des deux chambres. Certes, dans l'actuelle chambre basse cette alliance n'est, pour le moment, représentée que par 120 députés (50 pour le RND, 30 au MSP et 40 redresseurs) sur les 380 siégeant à l'hémicycle. Toutefois, il conviendrait, sans doute, d'attendre la décantation future du champ politique, que le congrès extraordinaire du FLN, aile Benflis, prévu lundi prochain, risque de précipiter. Aussi, il ne serait pas du tout exclu que la volonté de «sauver» le FLN de la désagrégation joue pour la tendance des redresseurs, se conforter une certaine majorité pour le président à l'APN et du coup, surseoir à une dissolution annoncée. En fait, un tel montage entrerait dans les objectifs du président Bouteflika qui hésite encore à dissoudre l'APN. D'ailleurs, le raz-de-marée électoral en faveur de Bouteflika qui a déjà complètement changé la donne et la crise que traverse le FLN vont dans le sens recherché par le chef de l'Etat pour la simple raison qu'il pourra toujours compter sur les députés du mouvement de redressement pour faire passer, comme une lettre à la poste, son programme. Et dans le cas où le chef de l'Etat se décidait à dissoudre l'APN, rien ne garantirait la victoire de l'alliance présidentielle même si les trois responsables ont fait part de leurs intentions de «travailler ensemble au sein du gouvernement, du parlement et pourquoi pas former des listes communes lors des échéances électorales futures». D'autant que le RND n'est pas sûr d'avoir la majorité en cas de législatives anticipées pour permettre à Ahmed Ouyahia, secrétaire général du RND, de demeurer à la tête du gouvernement. C'est toute la problématique du président de la République.