La Centrafrique où règne le chaos est au bord du gouffre La Centrafrique est dans la tourmente depuis que les rebelles de l'ex-Séléka, des musulmans pour l'essentiel, ont lancé une offensive il y a un an, contraignant le président François Bozizé à quitter le pouvoir en mars. Le Secrétaire général adjoint de l'ONU aux affaires politiques, M.Jeffrey Feltman, a affirmé lundi soir devant le Conseil de sécurité que la situation en République centrafricaine (RCA) s'était considérablement détériorée en prévenant que les affrontements interconfessionnels pourraient tourner au conflit religieux et avoir des répercussions à l'échelle régionale. Au cours de cette séance d'information devant l'organe de décision de l'ONU, qui a permis également d'entendre la ministre centrafricaine des Affaires étrangères et l'Observateur permanent de l'Union africaine, M.Feltman a dressé un bilan inquiétant de la situation sécuritaire et humanitaire en RCA en dépit des efforts encourageants entrepris par le gouvernement de transition et la Mission internationale de soutien à la Centrafrique sous conduite africaine (Misca) dont le déploiement a été autorisé par une résolution en décembre dernier. «Les violences meurtrières sont quotidiennes dans la capitale Bangui et le reste du pays et la population reste divisée par les appartenances religieuses», a expliqué M.Feltman. Selon lui, l'accès aux quartiers résidentiels de Bangui est contrôlé «soit par des miliciens antichrétiens soit par des antimusulmans», précisant que des localités situées en dehors de la capitale sont le théâtre d'atrocités, notamment d'affrontements directs entre communautés chrétienne et musulmane. Un gouvernement de transition a permis dans un premier temps de rétablir un semblant de paix, ouvrant la voie à la tenue de futures élections démocratiques, mais le mouvement majoritairement chrétien des anti-balaka a pris les armes et des affrontements interconfessionnels ont éclaté à Bangui début décembre dernier. M.Feltman a estimé que l'incapacité des autorités de transition à lutter contre les violations des droits de l'homme dont la Séléka s'est rendue coupable au cours de l'année écoulée «a contribué à la mobilisation progressive des groupes d'autodéfense locaux», les anti-balaka. «En raison de sa composition à majorité musulmane, les exactions de la Séléka contre les populations chrétiennes ont rapidement été interprétées comme un conflit religieux opposant musulmans et chrétiens», a-t-il ajouté. D'autre part, a-t-il poursuivi, «la frustration des communautés musulmanes en RCA est le fruit d'années de marginalisation par les gouvernements successifs depuis l'indépendance du pays il y a plus de 50 ans». Alors que la communauté musulmane représente environ 20% de la population totale de la RCA, «aucune fête musulmane n'est observée officiellement par le pays», a-t-il fait savoir. Pour la première fois dans son histoire, une partie de la population centrafricaine s'est sentie contrainte à l'exil en raison de son affiliation religieuse, notamment au Cameroun, au Tchad, en Côte d' Ivoire, au Mali, au Niger, au Nigeria et au Sénégal, où ils ont été des dizaines de milliers à se rendre et dont la plupart d'entre eux sont des musulmans, a relevé M.Feltman. Par ailleurs, il a salué le déploiement rapide de la Mission internationale de soutien à la Centrafrique sous conduite africaine (Misca), et des troupes françaises qui les soutiennent, qui a empêché la situation de s'aggraver davantage. L'ONU travaille actuellement avec l'Union africaine à l'organisation d'une conférence des donateurs, le 1er février à Addis-Abeba, pour permettre à la Misca d'atteindre son effectif maximal autorisé de 6000 soldats. «Il existe un risque très réel de voir la crise se propager au-delà des frontières du pays et déstabiliser davantage la région», a-t-il encore prévenu, promettant que l'ONU continuerait de faire tout son possible pour éviter que la situation en RCA ne se détériore davantage et que les violations des droits de l'homme n'atteignent des niveaux impensables, fournir une aide humanitaire aux plus vulnérables et assurer le retour du pays à l'ordre constitutionnel.