Montée en puissance de la guérilla, scandales en cascade, la coalition fait face à des moments fort pénibles. Une certaine accalmie est observée en Irak depuis quarante-huit heures avec toutefois des attaques ponctuelles de la guérilla comme celle d'hier dans la province d'Al-Anbar (ouest de Bagdad) où six soldats américains ont été tués. Tout donne en fait l'impression que les belligérants semblent se tâter : aller plus en avant dans la violence, ou revenir à plus de pondération. En attendant, un calme trompeur règne notamment à Najaf et Kerbala, les deux villes saintes chiites, où l'Armée du Mehdi de Moqtada Sadr, renforcée par des volontaires, garde l'arme au pied dans l'attente d'en découdre avec les marines américains. Les médiateurs, singulièrement ceux du bureau de l'ayatollah Ali Sistani, essaient de transformer cette trêve momentanée en cessez-le-feu durable. De fait, montrant leur bonne foi, quant à leur volonté de trouver un accord qui satisfasse toutes les parties et dans la perspective d'instaurer un climat de confiance, les miliciens chiites ont décidé dimanche de s'abstenir d'attaquer les forces de police irakiennes stationnées à Kerbala pendant 72 heures selon un communiqué du chef de la milice de cette ville qui indique «Pour démontrer notre bonne volonté, nous avons décidé de ne pas nous en prendre aux forces de police pendant 72 heures à partir de dimanche à 6 heures (02h00 GMT)». Publié hier, ce texte affirme que «l'initiative est destinée à favoriser les efforts des notables pour assurer la sécurité et la stabilité dans la ville». Comme à Falloujah où un accord a été trouvé pour que des forces de sécurité irakiennes prennent la relève des soldats américains, on s'achemine vers cette solution à Najaf et à Kerbala, villes actuellement occupées par les milices de Moqtada Sadr. C'est en fait le sort de ce dernier, recherché «mort ou vif» par l'armée américaine qui fait problème alors que les notables chiites tentent de trouver une issue à ce casse-tête. Outre cette impasse, l'actualité irakienne est marquée par la poursuite des manifestations contre le nouveau drapeau que la coalition veut imposer à l'Irak. A Mossoul (au nord de Bagdad) on a de nouveau manifesté hier contre le nouvel emblème que les Irakiens estiment peu représentatif du pays et exigent le retour à l'ancien drapeau. Il est vrai que le nouveau drapeau abandonnant les signes traditionnels trois bandes horizontales rouge, blanc et noir avec au milieu trois étoiles vertes entre lesquelles est intercalée la phrase «Allah Akbar» est quasiment identique, à quelques détails près, au drapeau d'Israël avec deux bandes horizontales bleues (représentant le Tigre et l'Euphrate les deux fleuves d'Irak) au milieu une bande jaune (représentant les Kurdes) avec au centre un Croissant. La seule différence entre ces deux drapeaux, c'est l'existence de la bande jaune et du croissant au lieu de l'étoile de David. Aussi, la question du drapeau ne semble pas devoir en rester là. Au plan du scandale des prisonniers irakiens torturés et humiliés, la polémique enfle entre les milieux militaires, britanniques notamment, et les médias. Prenant les devants, les autorités militaires américaines ont sanctionné six officiers supérieurs par un blâme écrit, blâme qui ouvre la voie à la radiation de l'armée. Mais les enquêtes sur cette sombre affaire ne font que commencer et il faut s'attendre à d'autres révélations sur le comportement barbare des soldats de la coalition et sur le laxisme des supérieurs qui semblent avoir laissé faire, notamment dans la sinistre prison d'Abou Gharib.