Le groupe Mena du programme Edward R. Murrow 2013, à l'entrée de l'Université de journalisme de Chapel Hill «Les voyages forment la jeunesse.» Ce dicton n'a jamais été aussi vrai que lors de cette aventure qui nous a menés dans quatre des grands Etats des Etats-Unis d'Amérique: Washington DC, la Caroline du Nord, Washington (Seattle) et enfin, New York. Un périple plein de surprises et de rebondissements d'un jeune de 25 ans chez son Oncle Sam. Allons ensemble à la découverte du Nouveau Monde... Après une bonne semaine à Washington DC, direction Chapel Hill, un campus universitaire en Caroline du Nord. Pour cette deuxième semaine nous troquons donc le costume officiel pour celui estudiantin. Ce voyage de plus de 270 miles (430 km) se fait par bus afin de «nous permettre d'admirer un peu la beauté de la nature», ont expliqué nos accompagnateurs. Néanmoins, c'est la beauté du système autoroutier américain, avec ses aires de repos, et ses toilettes publiques dignes de celles d'un hôtel cinq étoiles que nous découvrons. Ehuu, cela ne ressemble certainement pas à notre autoroute Est-Ouest...Mais passons! Après plus de 5 heures de voyage nous arrivons enfin à Chapel Hill, cette ville qui respire la jeunesse et le savoir. Première surprise avec l'hôtel où nous sommes installés. C'est un hôtel typique américain. On se croirait dans un film western, ou à La petite maison dans la prairie avec style colonial du Sud des Etats-Unis, mélangé au géorgien, néoclassique et influences européennes. Une vaste collection d'antiquités, avec quelques objets originaux à l'auberge, complète le décor élégant et décontracté. Cerise sur le gâteau, il se situe au centre de Chapel Hill. Ce qui nous permet d'admirer ce campus verdoyant dans toute sa splendeur. Après un voyage dans le temps, avec cet hôtel d'une autre époque, le rendez-vous est pris avec la doyenne de la faculté de journalisme de Chapel Hill. Une réception est organisée en notre honneur, mais le plus marquant est la présence de plusieurs professeurs et étudiants venus volontairement à notre accueil. C'est un moment privilégié qui a été partagé avec ces étudiants. Très accueillants et souriants, ils se sont fait un plaisir de nous bombarder de questions. La vie dans nos pays respectifs, l'islam et ses valeurs, était au centre des discussions. Certains, n'avait jamais entendu parler de l'Algérie. Un pays si lointain pour eux, avec une culture différente, une religion différente, «mais finalement avec des jeunes au même style vestimentaire, et surtout les mêmes aspirations pour le savoir et les mêmes problèmes que nous», a résumé la situation Jessica, jeune étudiante en journalisme, originaire de la Californie. Halloween, la plus grande fête à ciel ouvert des Etats-Unis Par la suite, ces étudiants américains nous ont invités à les rejoindre en soirée au Franklin Street, le centre-ville de Chapel Hill où une surprise nous attend. «Cela tombe très bien, vous êtes venus le jour de Halloween, ce soir vous allez découvrir quelque chose d'unique au monde», promettent les étudiants avec un sourire qui en dit long...Effectivement, dès la tombée de la nuit, changement de décor! On se croirait dans la célèbre série américaine des morts vivants, Walking Dead. Les étudiants ont laissé de côté leurs cartables, pour les remplacer par des déguisements plus insolites les uns que les autres. Entre les traditionnels costumes de «zombies» ou de sorcières, en passant par les Michael Phelps, le «Lego» basketteur, jusqu'aux nourrissons de la délégation de gymnastique chinoise, les «gendarmettes»... C'est la folie! «Vous assistez à la plus grande fête de Halloween à ciel ouvert des Etats-Unis. Plus de 80.000 personnes venant des quatre coins du pays envahissent chaque année Franklin Street pour s'amuser», nous explique un étudiant qui nous invite à profiter de ce «carnaval» à ciel ouvert. On ne résiste pas à la tentation, et nous aussi on va s'acheter des masques pour participer à cette nuit de «l'horreur» mais surtout de... l'humour. On n'a pas eu à le regretter, car la suite a été une véritable distraction qui nous a permis de pénétrer au plus profond l'univers des étudiants US. Rires, photos, danse, jeux de rôle et même match de basket en plein air étaient au menu, et cela jusqu'à minuit. Car, passé cette heure, la fête dans la rue est terminée. A ce moment nous découvrons quelque chose d'encore plus incroyable. Pour rendre à Franklin Street ses «droits», en la «débarrassant» de ses occupants escarmouchés par les effets de l'alcool, les autorités ont trouvé une méthode toute douce. Tenez-vous bien, la police locale improvise un défilé des motos et des voitures de police, qui font toutes sortes de «loopings» et démarrages américains, mais le plus incroyable est qu'ils soient suivis de très près par les employés de nettoyage des voiries. En fait, ce spectacle n'a pour but que de leur ouvrir la route afin qu'ils puissent débarrasser la chaussée des restes de cette folle nuit. Une demie heure après, on ne croirait jamais que 80.000 personnes avaient fait la fête ici! La fraternité entre membres de Kappa Delta Rho La suite de la soirée se poursuit dans les pubs, restaurants et autres cafés de la ville. Il y a aussi les fameuses fraternités d'étudiants qui organisent des soirées privées. Ayant sympathisé avec le membre de l'une d'elles, «Maison Kappa Delta Rho», lors de la fête de Franklin Street, on réussit à se faire inviter à leur soirée! Oui, on accède au monde des confréries! «Chez les Kappa Delta Rho vous ne risquez pas de vous ennuyer. On est considéré comme les rois de la fête. L'administration de Chapel Hill a plusieurs fois tenté de faire fermer notre confrérie, mais en vain. Les étudiants s'y sont opposés car, sans nous l'ambiance y serait beaucoup moins amusante», révèle notre ami Jason qui nous a conviés à cette fête, pour nous donner un aperçu de ce qui nous attend...Jusqu'au lendemain matin, c'est la fête au sein de cette fraternité. Comme dans les films, les membres sont disjonctés les uns plus que les autres. Toutes sortes de jeux y sont organisés, pendant que certains préfèrent discuter dans le jardin. De notre côté, on s'installe avec quelques membres qui nous expliquent comment fonctionne leur fraternité, où l'égoïsme n'a pas de place. «On est des frères, on partage tout», expliquent-ils avant de nous initier au vocabulaire des fraternités telles que «Rush: période durant laquelle les fraternités recrutent, Bid: Invitation à rejoindre la fraternité...». Ils nous racontent aussi les étapes d'initiation pour devenir membre, en nous expliquant que «ce n'était pas du bizutage mais un test pour savoir à quel point les frères pourront compter sur la nouvelle recrue». Par la suite, ils nous ont interrogé sur nos pays respectifs, et la vie que mènent nos étudiants...Bref, une soirée très conviviale, où l'on a vu de tout jusqu'aux aurores... A peine une ou deux heures de sommeil plus tard, on se dirige vers notre première conférence à Chapel-Hill. Un débat avec des étudiants est prévu. Pour cette première, les rôles sont inversés. Ce sont les étudiants qui deviennent journalistes et nous posent des questions. Ils sont surpris quand on parle de la gratuité des études en Algérie. Ils nous prennent même pour des mythomanes, s'agissant de la nourriture et de l'hébergement, et le transport pour étudiants à un prix symbolique! «Wawe, c'est le paradis. Ici, à Chapel-Hill. C'est l'un des seuls campus universitaires publics aux USA. Mais reste que c'est payant, même si c'est moins excessif que dans les universités privées, mais c'est quand même cher», tiennent-ils à nous faire savoir. Après ces brèves discussions s'ensuivent des débats plus palpitants les uns que les autres. De véritables échanges d'expériences se font entre nous et plusieurs groupes d'étudiants tout au long de la semaine. Très enrichissant! Mais on est surpris de revoir parmi ces groupes, certains étudiants qui ont frôlé le coma éthylique pendant la soirée Halloween, en véritable premier de la classe! «C'est comme ça aux States. On sait faire la part des choses. On se défoule le week-end et pendant les fêtes, pour pouvoir bien continuer, avec le plus grand sérieux le reste de la semaine», confient-ils. A Chapel Hill, on a également droit à un cours de travaux pratiques en journalisme. La faculté de journalisme qui, pour le reste nous a réservé un accueil royal, a fait en sorte qu'on assiste avec des étudiants à un cours. Cela nous change vraiment des longs TP théoriques, incompressibles de nos universités. Ici, c'est la pratique qui compte. C'est un atelier, très convivial. On y est assis comme dans le salon d'une maison avec plein de poufs, et des ordinateurs éparpillés un peu partout. On tutoie le prof. Et ce sont les étudiants qui font le cours, l'enseignant ne fait que proposer l'idée et recadrer les débats. Une méthode très ludique, on ne veut pas que le cours se termine. Des conditions idéales pour faire des études En parlant des conditions de travail des étudiants, il faut dire que le fait d'être tous rassemblés dans un seul campus facilite grandement les échanges. Il faut aussi parler de la beauté de cette petite ville verdoyante où on vient en cours à vélo. «Comment ne pas aimer les études, dans un endroit pareil», rétorque avec humour un membre de la délégation Mena. C'est vrai que Chapel Hill c'est petit, mais c'est certainement puissant. Dans le cadre de la Raleigh-Durham-Chapel Hill Research Triangle, Chapel Hill est le foyer de l'Université de Caroline du Nord, une grande industrie de la recherche, et une population ciblée sur l'éducation et la culture. En tant que ville universitaire et une partie d'une région qui a le plus grand nombre de titulaires de doctorats par habitants dans le pays, la colline du Capitole est à la fois instruite et assez libérale. La petite ville d'un peu plus de 50 000 habitants confère à l'éducation publique une priorité absolue et est largement reconnue pour la grande qualité de son système scolaire, avec l'East Chapel Hill High et Chapel Hill High tous deux récemment positionnées par Newsweek Magazine's Top 100 écoles dans le pays. Parallèlement à sa ville voisine, Carrboro, Chapel Hill a aussi une vibrante scène culturelle et musicale. C'est dans cette ville qu'ont été enregistrés des labels comme Merge Records (The Arcade Fire) et Yep Roc (Billy Brag) aux côtés d'artistes populaires tels que James Taylor et Ben Folds qui a commencé sa carrière dans la petite ville mais très animée. Dans l'ensemble, la ville est connue pour une attitude amicale, d'excellents restaurants, une abondance de cafés-restaurants et les détaillants indépendants avec un esprit fantastique qui se dégage de la myriade de peintures murales dans toute la ville liées à des événements comme la très populaire et quelque peu excentrique fête annuelle dans la rue, Halloween fête. La plus petite des trois villes de Research Triangle, Chapel Hill fait de son mieux pour se démarquer. Un journal fait par des étudiants Ce qui fait démarquer cette petite ville, est incontestablement son journal étudiant The Daily Tar Heel. Celui-ci a remporté de nombreux prix nationaux pour les journaux universitaires, tandis que la radio étudiante Wxyc fut la première radio diffusée sur Internet. The Daily Tar Heel a été fondé le 23 février 1893, et est devenu un quotidien en 1929. Ce journal met l'accent sur les nouvelles de l'université et des sports, mais il comprend également une couverture de l'actualité de la Caroline du Nord. Il est publié cinq jours par semaine. Tout le contenu éditorial est supervisé par deux éditeurs professionnels, mais le contenu est fait d'étudiants bénévoles, environ 250 personnes. Le The Daily Tar Hill tire à 18.000 exemplaires gratuits et est distribué sur 200 sites à travers le campus et dans la communauté environnante. Les recettes publicitaires sont auto-générées par un personnel de la publicité gérée par des étudiants. Les étudiants en journalisme sont seuls responsables de tout le contenu sous la direction du rédacteur en chef étudiant. Un nouveau rédacteur en chef est choisi chaque printemps, pour un an, tout comme la majorité des rédacteurs bénévoles. En termes de moyens matériels, ce journal étudiant est mieux équipé que la majorité de nos journaux professionnels. Dîner chez une famille américaine A la fin de notre séjour à Chapel Hill, on a eu droit à la découverte de la vie en famille américaine. En effet, des familles nous ont invités à dîner chez elles. Pour notre part, on s'est rendu chez une très charmante dame qui est la doyenne de la faculté de droit de Chapel Hill. On était en compagnie d'un Marocain et d'une Tunisienne. La dame, nous a fait la surprise d'inviter trois de ses étudiants originaires de l'Afrique du Nord (Maroc, Tunisie et Egypte). Elle s'est même donné la peine de faire du couscous au poulet. «Une recette que j'ai apprise lors d'un séjour au Maroc», raconte-t-elle. La soirée s'est poursuivie dans la bonne humeur. Cette expérience a été très enrichissante. Ces trois heures nous ont permis de comprendre le mode de vie des foyers américains. Tout comme chez nous, aux States la famille est sacrée! Voilà donc pour notre virée dans le monde des étudiants américains, non sans passer par une petite halte dans celui d'une famille américaine. Restez avec nous, dans le prochain épisode, nous vous ferons découvrir Seattle terre de science avec Bill Gates et Boeing, mais aussi terre de rock 'n' roll, Jimi Hendrix et Nirvana, terre de cafés, Starbucks et plus récemment celle de la marijuana... Les personnalités qui sont passées par ce campus Ce campus universitaire public, a vu le passage sur ses bancs de plusieurs stars américaines connues à travers le monde. La plus populaire d'entre-elles, est sans conteste le roi du basket-ball Michael Jordan. D'autres stars de la NBA sont passées par là, on cite Vince Carter, Rasheed Wallace, James Worthy. Il y a également la championne d'athlétisme Marion Jones. Pour ce qui est des personnalités politiques, on a James Knox Polk (président des Etats-Unis 1845-1849). Ambiance d'un match de football américain Dans les universités américaines, le sport est roi. Cette place qu'occupe le sport dans la vie des étudiants américains, est due au système de bourses sportives qui permettent de combiner sport et études supérieures. Les Etats-Unis ont un système unique au monde, celui de pouvoir allier sport et études après le Bac au sein de leurs universités. C'est également le cas à Chapel Hill qui dispose de plusieurs équipes universitaires très performantes, notamment celle du soccer féminin (football), qui est l'une des plus fortes au niveau national. Chapel Hill a également une bonne équipe de football américain. Et comme le soccer est quelque chose de banal pour nous, on a décidé d'assister à un «games», du sport roi, à savoir le foot américain. C'est une expérience unique qui rappelle le bon vieux temps du 5-Juillet, mais avec des tribunes mixtes et une organisation parfaite. Les chants des supporters sont nombreux, variés et drôles. Le spectacle des «cheerleaders» et de la fanfare est toujours impressionnant. Au contraire de chez nous, les Américains «dress up» quand ils assistent à un match de foot, en particulier les membres de Fraternités: chemises («button-downs»), pantalons («slacks») et parfois même bretelles («suspenders») font partie de «l'uniforme». Les supporters presque centenaires qui sont sortis de Chapel Hill le siècle dernier se contentent cependant d'un pull aux couleurs bleu et blanc (l'équipe de l'université), en vente dans tous les coins et recoins de la ville. En Caroline du Nord, on aime le football américain, ce sport extrêmement compliqué à suivre car stoppé toutes les deux minutes, à chaque action. Bref, un match de foot, c'est un peu un condensé de ce qui fait la fierté des Américains. Et puis, l'ambiance est toujours de la partie when you sit with a fraternity. En parlant des Fraternités, il y a tout un rituel à faire pour assister à un match de foot. La tradition veut que l'on organise un «tailgating» avant chaque match. À l'origine, le tailgate désigne une «fête» organisé à l'arrière de la voiture, le coffre servant au choix, à garder au frais les boissons, installer un mini barbecue, une chaîne stéréo etc. Une expérience donc à vivre au moins une fois dans sa vie, même si suivre cette empoignade n'a rien changé à nos connaissances nulles des règles du jeu... Halloween dans sa version berbère Il aura fallu se rendre aux Etats-Unis pour savoir que Halloween avait sa version berbère. En effet, un professeur d'histoire à l'université de Chapel Hill nous l'a appris. Surpris de voir notre étonnement quant à cette fête, il nous a fait savoir que d'après ses connaissances, cette fête existe chez les Berbères de l'Afrique du Nord. Renseignement pris de retour en Algérie, effectivement dans la tradition berbère, les enfants des villages se déguisent en lion ou tout autre costume fait par les mamans, et faisaient le tour des maisons à l'occasion d'une fête du calendrier agraire, en faisant une quête de toutes sortes de denrées. Ils chantaient à l'approche des maisons pour annoncer leur arrivée. Les villageois donnaient ce qu'ils voulaient et ce qu'ils avaient: bonbons, gâteaux, oeufs, viande, fruits etc...Une fois, le tour terminé, les enfants mettaient tous en commun: leurs récoltes et faisaient un partage équitable entre tous. Cela se fait encore dans certains villages de Kabylie, mais aussi chez les Béni Snous, à Tlemcen. Abbès et Imane: ces Algériens de Chapel Hill Les Algériens sont présents partout. A Chapel Hill, on a rencontré deux jeunes compatriotes. D'abord, la très sympatique Imane, qui était réceptionniste dans notre hôtel. Originaire de Beni Saf (Ouest algérien), elle étudie à l'université de Chapel Hill. «A l'hôtel, ce n'est qu'un petit job d'étudiant», nous confie cette adorable jeune fille. Mais, elle n'est pas la seule Algérienne de Chapel Hill. On a aussi rencontré Abbès, qui, lui aussi, est originaire de l'Ouest du pays (Oran). Aussi sympathique qu'Imane, Abbès tient un petit restaurant très apprécié par les jeunes étudiants, notamment à cause des prix très abordables, mais aussi par les saveurs orientales qu'il propose. En fait, il s'est spécialisé dans tout ce qui est nourriture libanaise: chawarma, falfel,... Avant de «débarquer» à Chapel Hill, Abbès tenait un «resto» identique dans un campus à Boston. Nos deux compatriotes qui semblent avoir très bien réussi chez l'Oncle Sam, sont la preuve que les jeunes Algériens peuvent réussir n'importe où dans le monde... Il suffit de les laisser s'épanouir!