C'est au pas de charge que les redresseurs iront vers leur congrès rassembleur. Comme annoncé dans notre édition d'hier, le groupe parlementaire du FLN a scellé hier sa réconciliation lors d'une cérémonie présidée conjointement par Abdelaziz Belkhadem, coordonnateur national du mouvement de redressement, et Karim Younès, président de l'APN. Le premier, dans un discours offensif, à peine nimbé de locutions diplomatiques, a clairement laissé entendre que «désormais le FLN est devenu un et indivisible». S'adressant à la presse, présente en force pour l'événement, sous des applaudissement nourris, il a annoncé que «la commission de préparation du 8e congrès, dit rassembleur, sera installée incessamment». Il ajoute que celle-ci sera composée de membres des instances dirigeantes des précédents congrès ainsi que de certaines personnalités, élues et responsables du mouvement. Dénonçant implicitement les reproches initialement faits à Benflis et son staff, même s'il précise qu'il faut «cesser de ruminer les rancunes et tourner la page du 8 avril dernier», Belkhadem précise que «ce seront les urnes, donc les bulletins secrets, pour la mise en place des instances futures du FLN». «Un parti, ajoute-t-il, appelé à préserver ses acquis décrochés de haute lutte.» Dans une très courte allocution, Karim Younès s'est contenté de justifier les «déchirements» et «affrontements» passés en indiquant que «le FLN a prouvé, à travers ces événements, qu'il est un corps vivace, capable de produire des idées». Dans son allocution à l'ouverture de la plénière, intervenue à peine quelques minutes plus tard, il est allé plus loin pour rappeler avoir été un des premiers au nom de l'institution qu'il préside, à avoir félicité le président Bouteflka pour sa réélection. Partant de cette cérémonie bon chic bon genre, où les petits fours ont circulé autant que les amabilités, il serait permis d'épiloguer pour dire que «tout est bien qui finit bien». Or, rien n'est moins sûr. Dans les coulisses bouillonnantes depuis le matin jusqu'à la cérémonie, qui n'a commencé qu'à 14h30, le ton n'était guère aux réjouissances puisque la logique du «vainqueur» et du «vaincu» a prédominé. Abbas Mikhalif, président du groupe, persiste et signe : «Je ne regrette rien de ce que j'ai fait. Si c'était à refaire, je pense que j'aurais même fait plus et mieux.» Souriant, aussi engagé que le premier jour, il continue de contester certaines actions, jugées «illégales» que mènent les dirigeants du mouvement de redressement. Il ajoute que «selon les statuts, le renouvellement des instances, vice-présidence, président de groupe et de commission, se fera par la voie des urnes au début du mois prochain. Mais en attendant, personne n'a le droit de se substituer au poste de quelqu'un d'autre». Dans l'autre camp, Si Affif, présent hier à l'APN, a claironné «ne pas reconnaître le statut de Mikhalif», avec qui il a quand même échangé les embrassades d'usage. «Pour nous, Taïeb Nourani est le président légitime du groupe puisque le mouvement compte pas moins de 132 députés.» Il ajoute en sa qualité de membre du comité central issu du 7e congrès du FLN, ne pas reconnaître cette instance actuellement composée de 243 membres. Il conteste, donc, dans le fond et dans la forme, l'instance qui en a émané, composée de 12 membres. Ces derniers, conduits par Abdelkrim Abada, ont rejeté les conditions que leur ont imposées les redresseurs, et ont même appelé à une seconde réunion de ce comité central pour vendredi matin. Il pourrait y être question de la mise en place d'une commission parallèle de préparation du 8e congrès. Abada et les siens, en effet, n'ont aucune institution ou acquis à préserver. S'ils obtempéraient aux conditions qui leur ont été imposées, ils se feraient «hara-kiri» politiquement. La troisième condition stipule que «tous ceux qui ont porté outrage aux symboles de l'Etat et de la République doivent se retirer et ne pas occuper de postes d'avant-garde». La seconde, elle, souhaite le retour à la situation qui prévalait avant septembre 2001. La première, enfin, refuse d'entendre parler de référence aux instances issues du 7e congrès, dont «le mandat a expiré depuis longtemps». Il apparaît ainsi que même si beaucoup de députés et de ministres rencontrés hier ont souhaité que cette «réconciliation» soit le prélude à un «règlement définitif de la crise», il n'en demeure pas moins que les divergences de vue, qui n'ont plus rien de politique, continuent de nager à la surface de toutes les démarches qu'entreprennent, ou entretiennent, les uns et les autres. Difficile, dans l'état actuel des choses, de croire, comme le précise Belkhadem, que le FLN n'a, à présent, qu'une seule direction.