La légitimité du futur gouvernement irakien reste posée. La situation sécuritaire continue de parasiter la recherche d'un gouvernement de transition en Irak. En effet, alors même qu'une trêve a été conclue à Najaf, jeudi, entre les marines américains et les miliciens de Moqtada Sadr, des accrochages se poursuivaient hier, notamment à Koufa, ou Moqtada Sadr a décidé de ne pas faire le prêche du vendredi qu'il avait l'habitude de présider. De fait, la coalition conduite par les Etats-Unis a annoncé hier la suspension de ses opérations offensives à Najaf, «jusqu'à ce que les forces irakiennes soient opérationnelles» mais continuera en revanche «à assurer la sécurité en patrouillant». Par contre, le chef radical chiite, Moqtada Sadr, s'en prenait hier aux dignitaires religieux lesquels, selon lui, «restent silencieux» alors que «l'ennemi entre dans la ville (Najaf) et la bombarde» apostrophant les religieux «Le dôme de l'imam Ali est touché et vous restez silencieux. Votre peuple est sous la botte de l'occupant et vous restez silencieux. Les lignes rouges, dont vous avez parlé, concernent-elles seulement les bureaux de la Marjaiya?» s'interroge-t-il. Hier deux journalistes japonais, et leur interprète irakien, ont été tués lors d'une attaque à Mahmoudiya, pas loin de Bagdad, portant à quatre le nombre de victimes nippones depuis l'intégration du contingent militaire japonais dans la coalition à la fin de l'année dernière. Mais il semble bien que, malgré la dégradation des conditions sécuritaires, c'est encore la désignation du nouveau gouvernement intérimaire et le pouvoir réel dont il sera doté qui préoccupe les analystes et la population irakienne. En fait, les Irakiens, après l'expérience ratée du Conseil transitoire, ne croient vraiment plus à l'installation d'un pouvoir ayant une quelconque légitimé et capable d'être un interlocuteur crédible de la coalition et non point comme l'est l'actuel Conseil une simple couverture dans la mainmise de la coalition sur les affaires de l'Irak. En fait, les différences d'interprétation données au maintien des troupes de la coalition, singulièrement les 138.000 GI's et marines américains, suscitent maints commentaires et font douter de la réalité de la souveraineté qui sera celle du futur gouvernement intérimaire. D'ailleurs les difficultés que rencontre l'émissaire de l'ONU, Lakhdar Brahimi, a mettre sur pied cet Exécutif provisoire sont indicatives de l'âpreté des négociations entre d'une part le représentant de l'ONU, ceux de la coalition et les partis politiques irakiens. De fait, d'aucuns regrettent maintenant que la suggestion de M Brahimi d'introniser un gouvernement technique n'ait pas été retenue, notamment par les partis politiques irakiens qui cherchent à se positionner dans le futur Irak. Ces tergiversations font en fait craindre que l'après-30 juin, date théorique de transfert de souveraineté aux Irakiens, ne soit celui de l'instauration du chaos en Irak. Ces inquiétudes sont également le fait de la communauté internationale qui veut s'assurer que le transfert de souveraineté aux Irakiens soit réel et non point un simple changement d'hommes et d'appellation sans autre retombée pour le devenir de l'Irak. C'est sans doute dans cette optique que le président américain, George W.Bush, entreprend dès le 2 juin prochain un vaste périple en Europe, d'une part pour participer aux célébrations du soixantième anniversaire du débarquement américain du 5 juin 19944 en Normandie en France, où il sera le 5 juin, d'autre part mettre à profit cette opportunité pour expliquer aux Européens, ses principaux censeurs, les objectifs des Etats-Unis en Irak.