Le plus grave sans doute, c'est que très peu de personnes ont conscience de la gravité que prend l'hécatombe de la route. Hallucinants. Les chiffres livrés hier par le ministère de la Santé, dans le but manifeste de frapper les esprits, laissent pour le moins perplexes. Le nombre d'accidents et de victimes, qui n'ont cessé d'augmenter depuis des années, en sont maintenant à un stade qui place l'Algérie à la troisième place des pays les plus touchés par ce terrible fléau. Il ne se passe pas un seul jour, comme nous l'apprennent les statistiques, sans que nous n'enregistrions 119 accidents, avec de bien lourds bilans, estimés à une douzaine de morts et 175 blessés. Si les chiffres de l'année passée font état de pas moins de 4342 morts, il ne fait aucun doute que le bilan de cette année sera autrement plus horrifiant, plus meurtrier. Depuis longtemps déjà, la route tue bien plus que le terrorisme. Chaque année, à la même période, des campagnes de sensibilisation sont organisées par les pouvoirs publics, avec des sponsors «balèzes» sans que cela n'ait le moindre effet sur le comportement des automobilistes. Car s'il est certain que des raisons «techniques», indépendantes de la volonté du conducteur tendent à accentuer les accidents, voire à les provoquer, il ne fait pas de doute non plus que ce sont les hommes, automobilistes et piétons confondus, qui se trouvent dans le plus clair des cas à l'origine de ces accidents. Depuis le temps que des campagnes sont menées sans le moindre effet, les pouvoirs publics devraient s'être rendu compte que seules des actions musclées, qui se mesurent à l'aune de la gravité de la situation, doivent impérativement être entreprises avant que la «mauvaise conduite» n'entre définitivement dans les moeurs de tout un chacun. Le nouveau code de la route, encore en débat au sein des instances, ne verra sans doute pas le jour, dans le meilleur des cas, avant le début de l'année prochaine. En attendant, combien de morts enregistrerons-nous encore? 300, 400 ou même plus. Comme pour le terrorisme, le premier magistrat du pays, qui a eu la présence d'esprit de tirer la sonnette d'alarme il y a de cela plus d'un mois, ne peut qu'estimer qu'un mort de plus, victime des accidents de la route, est encore un mort de trop. Les services de sécurité, principaux concernés, certes trop pris par la lutte antiterroriste, devraient exercer une plus grande et plus efficace surveillance sur les routes. Les radars et les barrages dressés certes partout, mais aussi les patrouilles mobiles, pourraient s'avérer suffisants pour peu que les bonnes vieilles habitudes d'antan soient réhabilitées. Pour cela, l'actuel code de la route, mais aussi les autres lois de la République, sont amplement suffisants. Il ne doit plus être normal de laisser circuler un «chauffard» qui met au quotidien en danger la vie des autres. Il n'est pas non plus permis de laisser en circulation des voitures visiblement défaillantes, pouvant à tout moment générer de terribles drames. La lutte contre le terrorisme de la route peut se faire aussi bien en amont qu'en aval. L'essentiel est de commencer...