Cette célèbre cité historique, par le poids de son passé et les richesses archéologiques qu'elle recèle, mérite plus de considération des pouvoirs publics. Creuset d'art et de science en Algérie, Tlemcen plonge également ses racines dans la préhistoire pour atteindre son apogée du XIIIe au XVIe siècle, sous la prestigieuse dynastie des Zianides, constituant alors un centre de civilisation arabo-islamique. Que reste-t-il aujourd'hui, sinon les souvenirs et les objets qui évoquent l'histoire de la région... notre histoire? A quand le nouveau musée de Tlemcen? On s'interroge de plus en plus sur la léthargie qui pèse sur l'ouverture et l'activité du musée de Tlemcen. Jusqu'à maintenant, c'était la mosquée de Sidi Belahcène (1296), véritable joyau architectural situé au coeur de Tlemcen, qui abritait les collections historiques ainsi que plusieurs pierres tombales de la ville. L'idée de transférer le musée au niveau de la Medersa de Tlemcen, aurait dû permettre non seulement de doubler les surfaces d'exposition, mais surtout de restituer la mosquée de Sidi Belahcène, l'ancien musée à sa véritable vocation. Sidi Belahcène fut, à une certaine époque, une importante école dont la fonction consistait à bâtir un pont entre les différentes civilisations. Cette mosquée eut beaucoup à souffrir, pendant la colonisation, de ses affectations successives : transformée en divers dépôts (vins-forages) avant de devenir le musée de Tlemcen. Tlemcen possède une importante collection parmi laquelle figure, entre autres, la coudée royale (étalon de mesure institué au XIIIe siècle par le roi Zianide, Abou Tachfine à la Quaïssaria), les fûts de colonnes en onyx, les chapiteaux de Mansourah, les fragments de marbre, de plâtre sculpté, les mosaïques, les boiseries récupérées de la grande mosquée (XIe siècle et de Sidi El Halou (XIVe siècle), les bandeaux de bois portant des inscriptions coraniques de style coufi. Mémoire collective, le nouveau musée devra être dépositaire des ensembles architecturaux et décoratifs comportant de nombreux vestiges de l'art almoravide, Zianide et Merinide, qui ont pu être sauvés de la disparition. Constituées de nombreux produits de fouille (Siga, Honaïne et Agadir), les collections représentent les oeuvres d'art mais aussi un nostalgique regard sur le passé, que Tlemcen a l'obligation de mettre en valeur. En 1991, le musée sera prématurément «affecté» au niveau de La Medersa, un ancien lycée franco-musulman construit en 1905 dans le style mauresque, avec une magnifique porte d'entrée ressemblant au porche monumental de la mosquée de Sidi Boumediene, La Médersa avait, à cette époque, besoin d'importants travaux de restauration et d'aménagement pour sa nouvelle vocation lesquels ont coûté quelque 120 millions et que la wilaya et l'Agence nationale d'archéologie et de protection des sites et monuments historiques (Anapsmh) avaient décidé d'engager. Actuellement, le nouveau musée, qui a connu des années d'isolement forcé, n'a pas encore ouvert ses portes en dépit de la fin des travaux, car on ne s'investit pas beaucoup. Il reste à parfaire les vitrines qui doivent servir de présentoirs des différentes collections, notamment les 10.000 pièces de monnaies almohades. En attendant l'ouverture de musée au public, les collections et plusieurs objets restent entassés, souvent pêle-mêle au niveau de la Médersa. Comment éviter que les incompétences n'entraînent la disparition de plusieurs pièces de musée? Déjà, du temps de l'occupation française, le pillage et la destruction de nombreux biens culturels, ont gravement porté préjudice à notre patrimoine. Au nombre de ces derniers, figure une fameuse épitaphe découverte en 1847, celle d'Abou Abdellah Zagal, oncle de Boabdil, dernier roi de Grenade (Espagne). Celle-ci aurait été présentée, pour la dernière fois, à Paris, à l'occasion d'une exposition universelle avant de disparaître définitivement. Cette disparition est qualifiée de grande perte pour les histamines, au même tire que de nombreuses autres pierres portant des inscriptions berbères d'un intérêt historique certain. Pour l'heure, on doit admettre que l'ouverture du nouveau musée se heurte à des considérations financières. Il est temps que l'on débloque alors la situation, car nous sommes tous responsables de notre histoire, de notre culture. Nous sommes tous interpellés pour demeurer sur les traces de nos ancêtres et surtout combattre l'oubli.