L'Etat veillera à ce que les subventions «soient réservées progressivement aux couches défavorisées» Annonce-t-on un désengagement de l'Etat? Une remise en cause des subventions à tous les niveaux? Les propos tenus hier, par le ministre des Finances, Mohamed Djellab, devant la commission des affaires économiques et financières au Conseil de la nation, font froid dans le dos. Ils tombent tel un couperet et il faut s'attendre à des réactions qu'il va falloir gérer avec beaucoup de clairvoyance. C'est la fin d'une époque, surtout qu'ils viennent du grand argentier du pays. «A l'avenir, le citoyen paiera ce qu'il doit payer dans un hôpital public (en contrepartie de ses soins) ou bien son loyer pour le logement public (...). Chacun doit assumer ses responsabilités», a souligné le ministre précisant que l'Etat veillera à ce que les subventions «soient réservées progressivement aux couches défavorisées». Le ministre enfonce le clou dans sa tentative de rassurer quand il dit notamment: «Nous n'allons pas abandonner ces couches (défavorisées), mais nous devons les préparer à l'insertion économique (...). Mais il viendra le jour où nous devrions rationaliser l'intervention sociale du gouvernement.» En d'autres termes, c'est la fin de la médecine gratuite. Qu'en serait-il pour le pain, le lait, l'eau et l'électricité? En tout c'est dit et c'est par un canal officiel, l'Agence APS. Le gouvernement envisage d'adopter une nouvelle politique pour le financement du service public afin de ne pas alourdir davantage la charge financière du Trésor public dans un contexte de baisse des cours du pétrole. Prononcés en ces moments d'incertitudes, de bouillonnement social et de concentration de crise multidimensionnelle, les propos du grand argentier du pays sont vraiment osés surtout au moment où le gouvernement a adopté une attitude plutôt rassurante pour ne pas affoler davantage les populations. Ou peut-être est-il temps de dire la vérité aux Algériens fut-elle douloureuse. M.Djellab a indiqué qu'une nouvelle démarche était en cours d'élaboration au niveau du gouvernement visant à donner «un aspect économique et commercial» au service public au lieu de «l'aspect social» qui «alourdit la charge du Trésor public en raison de l'importance des subventions» destinées aux transferts sociaux lesquels, selon lui, représentent 30% du PIB annuellement. Evoquant la baisse des cours du pétrole et le dispositif prévu par le gouvernement pour faire face à ses répercussions, M.Djellab a précisé que ces mesures entraient dans le cadre d'une politique de rationalisation des dépenses publiques et qu'il ne s'agit aucunement d'une politique d'austérité. Selon lui, tous les scénarios sont prévus, et ce, quelle que soit l'ampleur de la baisse des prix du pétrole. Concernant le gel du recrutement dans la Fonction publique en 2015, M. Djellab a expliqué que cette mesure ne concernait pas tous les secteurs, tels ceux de l'éducation et de la santé. Interpellé en marge de cette séance d'audition, sur les détails des dispositifs prévus par le gouvernement en cas d'une éventuelle chute des prix du brut en deçà des 40 dollars, le ministre a répondu: «Nous avons tous les scénarios et toutes les projections. Face à tout niveau des prix du brut sur le marché, nous lui avons fait des projections.» Relevant que l'Algérie subit une baisse de ses revenus pétroliers depuis juin 2014, le ministre a assuré que la situation actuelle était «bien maîtrisée» grâce au niveau actuel des réserves de changes et un niveau d'endettement extérieur quasi nul: «Ce qui permet de mieux gérer la situation.» Interrogé également si une loi de finances complémentaire était prévue pour réajuster notamment le niveau des dépenses publiques, M.Djellab a souligné qu'aucune décision n'était prise pour le moment à ce sujet, assurant que la loi de finances 2015 permet, déjà, un contrôle suffisant des dépenses et des recettes.