Daesh qui s'est emparé jeudi de l'université de Syrte affermit son autorité sur la Libye L'Egypte et le Qatar ont étalé leurs désaccords jeudi après des frappes égyptiennes contre le groupe Etat islamique (EI) en Libye, où l'organisation jihadiste a renforcé son influence en s'emparant de l'université de Syrte. Après la décapitation de 21 coptes égyptiens, revendiquée dimanche par la branche libyenne de l'EI, l'Egypte a bombardé mardi des positions jihadistes en Libye et réclamé une intervention militaire internationale dans ce pays plongé dans le chaos et contrôlé par des milices rivales. Le Qatar a critiqué une «action militaire unilatérale» de l'Egypte qui a agi sans consulter ses partenaires au sein de la Ligue arabe. Le délégué égyptien à la Ligue a répliqué en accusant Doha de soutenir le «terrorisme». En signe de protestation, le Qatar a aussitôt rappelé son ambassadeur au Caire. Le nouveau différend avec le Qatar illustre l'absence de consensus international sur la Libye, la plupart des pays ne privilégiant pas l'option militaire. Devant le Conseil de sécurité mercredi, le ministre libyen des Affaires étrangères Mohammed al-Dairi a demandé à l'ONU de lever l'embargo sur les armes imposé à son pays pour «aider» l'armée «à renforcer ses capacités» alors qu'elle peine à lutter contre les milices. Son homologue égyptien Sameh Choukri a appuyé cette demande, indiquant que le projet de résolution prévoyait une «levée des restrictions» sur les seules armes à destination du gouvernement reconnu par la communauté internationale. Plusieurs membres du Conseil, dont la Russie, sont réticents à lever l'embargo imposé depuis 2011, évoquant le risque de voir des armes tomber entre de mauvaises mains. Washington, Paris et Londres ont eux affirmé leur préférence pour une solution politique. Le représentant de l'ONU en Libye Bernardino Leon a dit «espérer qu'un accord politique pourra être trouvé bientôt» en Libye, un espoir partagé par la Tunisie et l'Algérie. La Libye est morcelée et sous la coupe de milices rivales. Deux gouvernements s'y disputent le pouvoir: l'un proche des miliciens de Fajr Libya, et l'autre, reconnu par la communauté internationale, siégeant dans l'est du pays. Fajr Libya contrôle Tripoli et une grande partie de l'Ouest libyen. Le principal bastion de la branche libyenne de l'EI est à Derna, à 1300 km à l'est de Tripoli. Ce groupe extrémiste, responsable d'atrocités -viols, rapts, décapitations-, sévit aussi en Irak, en Syrie, où il a conquis de vastes régions, et en Egypte. Renforçant son emprise en Libye, l'EI a pris le contrôle jeudi de l'université de Syrte (450 km à l'est de Tripoli), qui a suspendu ses cours, selon des témoins. La veille, une soixantaine de véhicules appartenant à l'EI ont paradé à Syrte, ville natale de Maâmar El Gueddafi qui y a été capturé puis tué par les rebelles en octobre 2011 après huit mois de révolte. Des photos, signées de la branche libyenne de l'EI et diffusées sur les réseaux sociaux, montrent des dizaines de jihadistes cagoulés paradant à bord de pick-up et véhicules tout terrain armés de canons anti-aériens et brandissant les drapeaux noirs du mouvement extrémiste. Cette démonstration de force intervient après l'envoi par la coalition Fajr Libya d'une force pour «rétablir la sécurité» à Syrte. Mais pour le moment il n'y pas eu de combats entre les deux camps.