«C'est un pas de géant que l'Algérie est en train de faire pour la première fois depuis 1962.» Le ministre de l'Education nationale promet «une révolution» dans le secteur à la faveur des réformes introduites pour la deuxième année à l'école. Dans une rencontre de coordination qui l'a réuni, hier, avec les 48 directeurs de l'éducation, M.Boubekeur Benbouzid a longuement défendu sa réforme. «C'est un pas de géant que l'Algérie est en train de faire pour la première fois depuis 1962.» Très confiant, le ministre a étayé ce constat par une série de mesures que le gouvernement s'attelle à mettre en oeuvre depuis quelque temps. Les enseignants doivent passer le Bac L'enseignant, «le pilier» de la réforme est appelé, selon l'orateur, à adhérer à ce processus. «Il ne sera admis à l'école que les enseignants titulaires d'un diplôme universitaire», précise-t-il. La nouveauté réside dans le fait que cette mesure sera élargie aux enseignants en poste depuis plusieurs années. Eux aussi devront se mettre de la partie et envisager, pour ceux qui n'ont pas le baccalauréat, d'entreprendre des études supérieures. Selon Benbouzid, 80 % des enseignants du primaire n'ont pas le Bac contre 68% du moyen. «Ce sont des chiffres qui nous inquiètent». Comment le ministère compte-t-il mettre en pratique cette décision? «On n'ira pas jusqu'à imposer cette décision, mais nous allons créer des mesures incitatives pour encourager les enseignants à faire ce pas», annonce le ministre. Ce dernier exclut, du moins pour le moment, le recours à la retraite anticipée, ou à la retraite après 25 ans de service, comme le revendiquent le CLA et le Cnapest. C'est un dossier épineux qui concerne le gouvernement, «il faut savoir qu'une telle décision nécessite des centaines de milliards de dinars». Par ailleurs, ajoute-t-il, «on ne peut obliger les enseignants qui sont permanisés à céder leurs postes». Dans le même chapitre, le ministre a reconnu l'existence d'un déficit au niveau de l'encadrement de la langue française, introduite en deuxième année primaire dans le cadre des réformes. Mais ce manque concerne uniquement les zones enclavées «où nous n'avons pas trouvé de postulants en dépit de l'existence de postes budgétaires». Cette situation va être rattrapée à partir de la prochaine rentrée scolaire, rassure le ministre. Abordant la question des enseignants vacataires, une question qui soulève la grogne des syndicats du secteur, le ministre de l'Education a tenu à préciser qu'actuellement «tous les postes permanents sont occupés», rappelant par là même la régularisation de plus de 42000 enseignants les quatre dernières années. Pour le ministère, c'est donc un dossier clos, même si, reconnaît-il, «le secteur ne peut se passer des vacataires». Toujours dans le cadre des réformes, le ministre va plus loin et se dit «insatisfait» du travail effectué par les écoles supérieures de l'Enseignement. «Le ministre de l'Enseignement supérieur est du même avis que moi, de ce fait, le gouvernement a décidé d'élaborer un nouveau cahier des charges pour ces dernières.» Un livre pour deux élèves «Nous misons sur la qualité et la quantité et pour cela, nous ne faisons aucune distinction entre les entreprises privées et publiques», lance le ministre en abordant l'épineuse question de la distribution et de l'édition des livres. Pour rappel, le gouvernement a décidé cette année de travailler avec l'Office national des publications scolaires, après une première expérience jugée «négative» entamée l'année dernière avec le privé. «Il est important de savoir, pour stopper les polémiques, que les deux boîtes privées ont pris unilatéralement la décision de se retirer.» Le motif? Cette dernière refusait d'assurer la distribution ce qui est, selon l'orateur, un recul par rapport aux engagements pris dans le contrat. «On n'hésitera pas à recourir à la justice la prochaine fois», précise-t-il. Afin de maîtriser cette situation, une société spécialisée a été créée cette année. Elle prendra en charge l'acheminement des livres jusqu'à l'établissement scolaire, ce qui relevait auparavant des prérogatives des APC. Pour cette année, il faut savoir que les livres concernant les paliers touchés par la réforme (1re et 2e années primaire et moyenne) sont disponibles à 110%. Par contre, un sérieux déficit est enregistré au niveau des livres non concernés par la réforme. «Il y a un livre pour 2 élèves, nous ne cachons pas cette vérité» et d'ajouter, «si nous voulions rattraper ce manque, on l'aurait fait». Le ministre explique cela par le fait que ces livres seront complètement retirés dans les quatre prochaines années. Concernant la distribution, un léger retard sera enregistré durant les prochains jours. «Un retard qui sera rattrapé avant la fin du mois en cours». Le ministre ajoute qu'à partir de la prochaine année scolaire, les manuels seront distribués avant les vacances de l'été. Le ministre annonce que la réforme du lycée entrera en vigueur à partir de l'année scolaire 2005 / 2006. Dans un autre volet, plus de 400.000 places pédagogiques seront libérées d'ici à quatre ans. Des places seront réservées au préscolaire qui sera généralisé à partir de 2005. Le transport scolaire et la restauration sont deux volets que le gouvernement, insiste le ministre, compte régler d'une manière définitive. Concernant le premier point, le gouvernement va ouvrir le marché aux privés. Benbouzid tient à rassurer que le ministère prend en charge les frais, en d'autres termes, ce dernier ne sera pas payant. La rentrée scolaire ne sera pas perturbée. «Notre département n'a reçu aucun préavis de grève» rappelle le ministre, qui a expliqué que «nos portes sont ouvertes à tous les syndicats même ceux qui ne sont pas agréés comme le Cnapest et le CLA». A ce sujet, il précise qu'une réunion de coordination va avoir lieu entre la tutelle et les partenaires sociaux dans les prochains jours.