Face à la persistance de la violence terroriste dans le royaume, Riyad semble enfin s'y mettre en organisant une réunion internationale sur la question. La menace terroriste longtemps sous-évaluée, voire minimisée, par notamment les stratèges des grandes puissances occidentales est apparue dans toute sa réalité après les attentats antiaméricains du 11 septembre 2001 contre les tours jumelles du Word Trade Center de New York. En fait, les grandes et petites puissances ont accordé peu d'attention aux mises en garde provenant notamment de l'Algérie alors confrontée à ce phénomène, le réduisant souvent à des problèmes internes propres aux pays en cause. Mais depuis, le terrorisme dans sa version islamiste a montré l'étendue de ses nuisances alors qu'il avait déjà quadrillé le monde devenant insaisissable. On n'insistera jamais assez sur le fait que le terrorisme islamiste, inconnu, il y a encore trois décennies, a vu ses premiers éléments formés, entraînés et encadrés par des agents de la centrale de contre-espionnage américaine (CIA) et financés par la l'Arabie Saoudite. Après les Etats-Unis, c'est ainsi l'Arabie Saoudite -qui a soutenu tous les mouvements intégristes dans le monde- qui fait face à un retour de bâton, un boomerang, à tout le moins douloureux. C'est pour dire que la lutte antiterroriste, malgré les résolutions adoptées par le Conseil de sécurité de l'ONU, reste marquée par l'improvisation quand chaque pays tente, par ses moyens propres, d'endiguer un phénomène aujourd'hui universel. Les Américains ont ainsi envahi l'Irak, délaissant la raison primordiale alors évoquée par l'administration Bush, dans la «lutte» contre le terrorisme, au moment où les Saoudiens regardaient ailleurs feignant de minimiser la nuisance de ces islamistes qui tuent au nom de l'islam, alors même que sur les 19 terroristes ayant participé à l'attaque contre les USA, 15 étaient des Saoudiens. Il aura fallu trois ans et les coups meurtriers que les terroristes ont donnés au royaume wahhabite pour que Riyad prenne au sérieux une menace que, à l'évidence, l'Arabie Saoudite n'est ni préparée ni n'a les moyens de combattre seule. C'est en filigrane ce que laisse entendre le ministre saoudien adjoint des Affaires étrangères, Nizar Ben Abeid Madani, lors de son intervention lundi devant l'Assemblée générale de l'ONU en annonçant la tenue prochaine à Riyad d'une conférence internationale sur le terrorisme, indiquant: «L'objectif de cette conférence sera d'échanger informations et expérience dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, de voir comment nous pouvons coopérer avec d'autres pays dans la lutte contre cette menace universelle.» Et M.Madani d'expliquer: «Nous entendons également utiliser cette occasion pour nous informer sur les techniques scientifiques et pratiques utiles non seulement dans la lutte antiterroriste mais aussi dans la prévention d'activités comme le blanchiment d'argent et le trafic de drogues et d'armes.» Mais encore faut-il dès lors s'entendre sur la définition du terrorisme et sur la manière de le combattre afin qu'il n'y ait pas d'amalgame entre ce phénomène et l'islam, une religion de tolérance. De fait, recevant lundi le président pakistanais, Pervez Musharraf, le président italien, Carlo Azegilo Ciampi a prévenu: «L'islam est une culture antique et raffinée qui a envoyé pendant des siècles des messages de tolérance et d'esprit civique. L'islam connaît la signification positive de la cohabitation et apprécie la voix de la sagesse», soulignant: «Il n'y a pas d'alternative au dialogue entre l'Occident et l'islam.» Le président Ciampi indique par ailleurs: «Le terrorisme doit être combattu partout et avec détermination. Mais la lutte contre le terrorisme peut être conduite de diverses manières, également en éliminant les facteurs qui l'alimentent, comme la marginalisation, la misère et l'oppression.» Comme quoi, la lutte antiterroriste implique aussi de combattre les causes qui ont induit son émergence. Ce que les Etats-Unis, notamment, ne semblent pas avoir réellement saisi. De fait, pour le président pakistanais, Pervez Musharraf, «la théorie du conflit de civilisation risque d'aggraver la fracture entre l'islam et le christianisme et peut causer des dommages à nos peuples». Aussi, ce phénomène de notre temps, qui n'épargne aucun pays, doit être remis dans son contexte véritable et inciter à une coopération internationale sans arrière-pensée ni parti pris, seule à même de venir à bout de cette «menace universelle», comme l'indique justement le représentant saoudien.