Interpellé à l'aéroport de l'ex-Cirta, Ali L. nie qu'il a fait entrer une auto frauduleusement au pays... Le pauvre gus avait cru, longtemps même, qu'il allait réjoindre l'eldorado de la rive nord de la Méditerranée avec un passeport d'un citoyen dont les ancêtres étaient les Gaulois, lui, le descendant de Massinissa, des Juba, de la Kahina (Dihia Demia) et peut-être de l'Emir Abdelkader. Il avait sincèrement pensé la «jouer» à nos vaillants membres des services de sécurité en se faisant passer pour un... Français. Hélas, pour lui, son avocat, Maître Samir Mahdid, l'avait déploré entre les lèvres, les mâchoires et les dents, la logique avait dû prendre le dessus puisque l'inculpé qui venait de vider le mandat d'arrêt, a vite fait de remettre les pieds à Sidi Fredj sans aucun espoir de rejoindre... Toulon. L'Algérien «naturalisé» frauduleusement croyait avoir affaire à des membres des services de sécurité d'une république bananière! Le pauvre!Il a dû s'en rendre compte au moment où le Pafiste de service avait tapé les cinq premières lettres latines sur le clavier qui soutient des milliers, voire des millions de coordonnées! Et puis hop! La réponse du micro était sans appel. Ces coordonnées n'existent pas et nulle part. Tout était faux, du nom à l'adresse en passant par la date de naissance et le numéro de la ville portée sur les... faux documents fournis pour élaborer un passeport, de la notion des droits de l'homme et du citoyen! Le gus alla droit dans le mur de l'article 222 du Code pénal, un article puisé dans la section V. «Faux commis dans certains documents administratifs et certificats» du chapitre VII: les faux! du titre I «crimes et délits contre la chose publique». Pire pour les auteurs: le 222 prévoit une peine d'emprisonnement ferme de trois ans et une amende de 500 à 5000 DA, alors que pour le fonctionnaire qui délire, on fait délivrer un des documents cités, désignés à l'article 222, à une personne qu'il sait n'y avoir pas droit, est puni d'un emprisonnement de un à cinq ans et d'une amende de 1500 à 15.000DA, à moins que le fait ne constitue l'une des infractions plus graves prévues aux articles 126 et 134...» Il reste à préciser cependant que tous les faux documents découverts ont été confectionnés par des faussaires qui n'ont rien à voir avec l'administration, surtout qu'un fonctionnaire sensé ne peut dissoudre sa carrière pour une poignée de dinars, voire d'euros! Il a même déclaré à Nouri, avoir casqué 1000 euros pour l'acquisition d'un faux passeport établi à Draguignan (sud de l'Hexagone). Ce qui explique l'an ferme d'emprisonnement infligé par le tribunal de Nice (France) et ce, par défaut, sous mandat d'arrêt international. Les faits sont repris dans le désordre de Ali L., 43 ans, ex-émigré, champion de p'tits boulots. L'inculpé a tenu à s'accrocher au vol de ses papiers. Ces derniers auraient été utilisés pour faire entrer clandestinement une voiture de tourisme par la frontière algéro-tunisienne. Ali s'accroche très fort au seul fait qu'il a acheté un document français juste pour rendre visite à sa vieille maman malade. Cet argument fréquemment utilisé à la barre est carrément écarté par Nouri, la main froide, lourde et assommante comme si ce jeune magistrat voulait signfier aux malfaiteurs de tous bords qu'il a été formé pour appliquer la loi et que l'appel avait été créé en vue de redresser de fâcheuses situations, surtout qu'en appel, il y a un trio de juges avec six oreilles et six yeux. C'est dire si... Continuant à se défendre, l'inculpé, Ali L., a précisé avec force qu'il avait, une fois, arrivé en France, déposé plainte contre X pour vol de documents, tout comme il l'avait fait au pays natal... Il a longtemps dit au tribunal qu'il avait couru dans tous les sens, histoire de se dédouaner d'une quelconque inculpation avec ceci de particulier: il n'a jamais expliqué pourquoi il avait été interpellé à Constantine avant l'embarquement alors que sa voiture était entrée par la frontière Est, soit à un peu plus de 250 km de l'aéroport, si l'on prend en considération l'entrée du véhicule par Oum Tboul, le point de passage le plus proche de l'ex-Cirta. Arrêté à Douéra à la suite du verdict prononcé par défaut, Ali L. laissera alors plus de temps à son avocat, Maître Samir Mahdid, ce brun de défenseur acharné qui lutte avec toutes les armes nécessaires au sauvetage des «meubles». Le jeune plaideur ne va pas trop agacer le tribunal en s'étalant sur les faits. Il se limitera à expliquer que cet Algérien sans profession, a longtemps erré chez les autres pour se retrouver enfermé chez «lui en Algérie». «Cet homme n'a pas fait, ni usé de faux pour ce qui est de l'automobile, mais il a reconnu avoir usé d'un faux passeport juste pour embrasser sa mère malade et qu'il avait longtemps languie», a martelé l'avocat brun qui a demandé l'indulgence du tribunal dans le verdict attendu. Abdelhak Nouri, le juge qui sait ce qu'il doit faire, met le dossier sous huitaine avant d'infliger les trois ans d'emprisonnement ferme à Ali L., coupable donc de faux et d'usage de faux. Maître Mahdid accepte sans se rechigner la sentence, mais interjette le jour même l'appel auprès de la cour de Tipasa où exercent d'excellents magistrats. Qu'on se le dise, amateurs de procès loyaux...