L'Etat a été incapable d'instaurer un système fiscal juste et équitable. Le satisfecit et ne doit pas être une forme d'anesthésie. L'institution de Mentouri fait monter les enchères au chef du gouvernement qui s'est largement approprié certaines des appréciations positives du Cnes sur la situation économique pour asseoir son argumentaire. Ouyahia, dans son allocution à l'ouverture des travaux du Cnes, a mis en relief la bonne santé économique du pays. Il a cité à ce propos, la diminution de la mortalité infantile, l'augmentation de l'espérance de vie, du taux de la croissance économique, et la diminution du taux de chômage. Des progrès ont été réalisés grâce aux mesures de l'Etat, mais ces progrès «ne sauraient masquer la persistance de nombreuses poches de pauvreté extrême dans de nombreuses régions», ont affirmé les experts. Pour d'autres, «le pouvoir d'achat des citoyens en 2004 n'a pas augmenté, en dépit des hausses de salaires, du fait que le Snmg aujourd'hui de 10.000 DA est identique, en termes réels, au Snmg de 1990 (1000 DA)». Les experts du Cnes ont réservé également une bonne partie des débats à la fiscalité. Sur ce sujet, ils ont pointé le doigt sur «l'incapacité de l'Etat à instaurer un système fiscal plus juste qui permettrait d'imposer les fortunes». «L'Algérie est le seul pays au monde où l'impôt sur la fortune n'existe pas, alors que les fortunes existent bel et bien», a-t-il relevé. D'autres experts ont dénoncé la «facilité d'aller puiser dans les salaires» sous prétexte qu'«il est difficile de localiser les fortunes». Aussi, les membres du Cnes veulent-ils aller plus loin, au-delà d'un simple satisfecit: il faut aller plus loin, définir et cibler les objectifs, ensuite les confronter à un système d'évaluation. Pour certains experts du Cnes, le seul indicateur fiable pour cette évaluation demeure le degré de satisfaction des populations visées par un projet réalisé. C'est l'idée principale qui ressort des débats de clôture des travaux de la 25e session du Conseil national économique et social (Cnes) hier, au Palais des nations. Durant la séance de la matinée, les experts se sont penchés sur l'examen du 5e rapport national sur le développement humain. Le débat, auquel a pris part le ministre de la Santé, M. Mourad Redjimi, a porté sur le degré de réalisation des objectifs du millénaire. Adoptée durant l'année 2000, cette déclaration universelle des Nations unies contient huit points à travers lesquels 191 pays, dont l'Algérie, ont décidé de réduire la pauvreté dans le monde. Le cinquième rapport du Cnes sur le développement humain a voulu s'appesantir sur les objectifs du millénaire en insistant sur les aspects négatifs. Premier exemple cité par M. Beghoul Youcef, expert au Cnes, l'éducation : «Sur ce plan, l'Algérie a réussi le défi de la scolarisation des enfants de 6 à 12 ans, mais le système éducatif algérien est loin d'atteindre ses objectifs réels. Il faut pour cela définir d'autres objectifs», a-t-il déclaré insistant sur la nécessaire remise en question des actions économiques. Le second exemple se rapporte à la condition de l'élément féminin à tous les niveaux de la société. La présence féminine dans les secteurs d'activité reste faible, à part les branches de la pharmacie et de la chirurgie dentaire avec un taux de près de 70 %, selon Mme Belkhodja-Kessous, membre du Cnes. Cette situation est due, selon M.Beghoul, à l'illettrisme et à l'analphabétisme dont souffre encore cette frange de la société. En somme, le Cnes, qui veut demeurer un observateur et une force de propositions, n'a pas été tendre pour le triomphalisme amplifié par l'embellie financière.