Ils menacent de mettre de l'huile sur le feu si le gouvernement ne prend pas en compte leurs intérêts. Les travailleurs ont peur. Le syndicat, lui, s'apprête à sortir son «artillerie». Depuis l'annonce par les pouvoirs publics de mettre en vente 1200 EPE dont l'Entreprise nationale des corps gras (Encg), les quelque 3000 employés de cette société qui fut, il y a quelques années, le principal fournisseur national en produits oléagineux, n'ont pas, semble-t-il, l'intention de désarmer et n'écartent pas pour autant, des mesures allant dans le sens de la sauvegarde de leurs emplois, même le recours à la rue est prévu à cet effet. Au syndicat de Cogral, filiale représentant plus de 40% de la production de l'Encg dont le siège est à Alger, l'ambiance est tendue. Après le rejet «catégorique» exprimé au lendemain de la décision d'Ouyahia, l'on se décarcasse, depuis, pour mettre au point une contre-attaque avec pour but primordial de faire reculer le gouvernement, ne serait-ce que sur un certain nombre de points: «Nous refusons cette démarche brutale qui mettra de facto les ouvriers à la rue» s'emporte Dekkiche Nouari, le chef du syndicat de Cogral qui dit, au nom des travailleurs qu'il représente, avoir adressé en vain à la chefferie du gouvernement des lettres de protestation ainsi que d'autres documents comportant des suggestions tenant compte des intérêts des travailleurs. Car si le principe de privatisation paraît au bout des lèvres comme inévitable à Cogral, on semble néanmoins avoir favorisé l'option du partenariat, en d'autres termes: «Il est indispensable donc de commencer par lancer un appel d'offres national et international» et suivre après le cheminement légal de cette opération. Mais une telle éventualité, avise M.Dekkiche, ne saurait se poser en l'absence de certaines garanties de la part du président de la République dont, la plus en vue, a trait à la préservation des postes d'emploi. Il demande, dans ce cadre, aux autorités publiques de s'impliquer davantage et de sanctionner les différents responsables qui se sont succédé à la tête de l'Encg ainsi que sa principale filiale. Sous le couvert de l'anonymat, un travailleur que nous avons approché affirme qu'il est impératif de donner un «dur» coup de pied dans la fourmilière pour assainir une entreprise à bout de souffle: «On ne peut gérer une entreprise dans des conditions aussi délétères à tout point de vue», commente ce dernier, en pointant un doigt accusateur à l'adresse des responsables, coupables d'avoir mis à sac une société qui pouvait, selon lui, tenir tête à des concurrents aussi rudes. Le représentant du personnel de Cogral, enfonce le clou: «l'Etat est le principal et l'unique responsable d'une telle situation». Si, a-t-il averti, le gouvernement s'entête à aller au bout de sa logique «radicale» «les travailleurs seront prêts à y faire face». D'ores et déjà, des actions de protestation sont envisagées dans les jours à venir: «Pour une première mesure, ils (les travailleurs) promettent de sortir dans la rue afin que le gouvernement entende leur voix» indique M.Keddiche. Et que fera le syndicat le cas échéant? «Nous avons notre stratégie, mais je refuse d'en dévoiler la nature», a-t-il ajouté.