Le week-end a été chargé pour les formations politiques en train de battre le rappel de leurs troupes. La plupart des régions du pays ont vécu un week-end riche en évènements politiques, tous liés au plan de Bouteflika portant réconciliation nationale et amnistie générale. L'ensemble des partis politiques, qu'ils fassent ou non partie des différentes institutions de l'Etat, veulent avoir leur mot à dire dans cette démarche qui scelle définitivement la fin des années du terrorisme et des exactions criminelles en Algérie. Déjà, une sorte d'émulation tacite est en train de se faire jour entre le FLN et son frère ennemi le RND. Ce dernier, pour le moment, se contente de réunions de coordination internes dans lesquelles son secrétaire général, également chef du gouvernement, multiplie les instructions en faveur de la démarche présidentielle. Ahmed Ouyahia, qui se fait publiquement fort d'être un «reconverti» aux mille et une vertus de la réconciliation nationale, veut être la locomotive de la future campagne référendaire que compte lancer le chef de l'Etat dans le courant du mois prochain. Loin de s'en laisser compter, le FLN, qui ne veut pas céder sa place de première formation politique du pays, oeuvre à présent à surmonter sa crise dès les deux semaines à venir. Belkhadem lui-même a touché du doigt, ce mercredi, les enjeux, exhortant les militants des deux camps à la retenue, afin que le 8e congrès, dit rassembleur, se tienne dans les meilleures conditions et que ce parti joue enfin un rôle de premier ordre dans la campagne à venir. Les affrontements à fleurets mouchetés qui se déroulent entre ces deux partis ne seraient que la face émergée d'un immense iceberg puisque des «ténors» du FLN n'hésitent pas à accuser presque publiquement le RND d'avoir infiltré ses rangs afin d'y aggraver la zizanie et de l'empêcher coûte que coûte de surmonter sa crise. A la faveur de ces tiraillements, et des déclarations du président faisant état d'une prochaine recomposition de la scène politique, l'Alliance présidentielle se trouve en pleine décomposition. Le MSP, rompu à ce genre de pratiques et de crises cycliques, tente pour sa part de prendre les devants. Après les déclarations faites à notre journal par son président, Bouguerra Soltani, celui-ci, accompagné d'Amar Ghoul, a réitéré à partir d'Oran son «soutien indéfectible à la réconciliation nationale et à l'amnistie générale». Pour ce parti, une pareille option, si elle était menée à son terme, annulerait tout bonnement sa proposition de loi relative à la nécessaire levée de l'état d'urgence. Ce texte, qui traîne sur le bureau de l'APN depuis près d'une année, est régulièrement brandi par le MSP à chaque fois que la surenchère, autre pratique courante dans les rangs du parti du défunt Mahfoud Nahnah, s'impose dans ses rapports de force avec ses pairs au sein de la coalition gouvernementale. Le FFS, lui, ne l'entend pas de cette oreille. Son conseil national a en effet tenu une réunion durant ce week-end afin de critiquer avec virulence la démarche de Bouteflika, précisément à cause du «maintien de l'état d'urgence», mais aussi de «l'absence des libertés collectives et individuelles». Selon ce parti, il n'en faut pas plus pour tronquer une démarche qui semble politiquement bonne à priori, d'autant qu'elle n'est pas loin de rejoindre les grandes lignes du fameux «contrat national» signé en 1995 par plusieurs représentants de la classe politique algérienne. Le FFS, dont la crise n'a été que «reportée à une date ultérieure» à la faveur de la courte visite à Alger de son président, Hocine Aït Ahmed, tente de s'imposer de nouveau comme leader de l'opposition crédible et véritable en Algérie après une longue éclipse qui lui a même fait jouer un rôle de second plan lors de la dernière présidentielle alors qu'il était aux premières loges lors du scrutin d'avril 1999. Un autre signataire du Contrat national, et non des moindres, le PT en l'occurrence, poursuit sa série de rencontres régionales et nationales. La dernière en date, qui s'est achevée hier à Zéralda, a repris les thèmes forts de ce parti, à savoir que la réconciliation doit également se faire avec le peuple et les travailleurs, notamment en respectant la Constitution qui interdit certaines privatisations. Réconciliation, terme générique dans lequel chacun place ses propres visions et convictions, signifie, notamment, aux yeux du parti de Louisa Hanoune, une répartition plus équitable des ressources naturelles et financières. Le mouvement El Islah, lui, continue cahin-caha de se débattre dans une crise qui rappelle étrangement celle d'Ennahda en 1998. Abdallah Djaballah, fort de son charisme et de l'expérience de ses déboires passés, était jeudi l'hôte de son fief constantinois où il a fait le plein de militants et de sympathisants en attendant la tenue de son congrès. Tous les observateurs s'accordent à dire que ce parti ne saurait prendre partie par rapport à la démarche présidentielle et, partant, entrer en campagne, avant que la crise ne soit résolue d'une manière ou d'une autre. Véritable cerise sur le gâteau de ce retour en force des partis politiques sur le devant de la scène médiatique, le MDS a décidé de s'impliquer dorénavant dans les joutes électorales et même, vient de réviser foncièrement sa ligne directrice en décidant de soutenir la démarche du président. Même si ce parti ne représente pas grand-chose sur le plan électoral, son changement de ligne n'en constitue pas moins un tournant décisif dans la disparition définitive de la ligne éradicatrice puisque seul ce parti en défendait encore le principe.