L'annonce du report du congrès replonge l'atmosphère dans le froid. A 10h 55, le cheikh pointe à son bureau au siège national du parti à Bir Mourad Raïs (Alger). Enveloppé d'un cachemire bleu de Prusse, Abdallah Djaballah franchit le pas de la porte, souriant. La silhouette du cheikh excite le contingent politique crispé par une matinée très froide. Sa barbe toujours aussi fournie ne cache pas son inquiétude. Ebranlé, fouetté, le leader contesté du parti islamiste El-Islah reste impavide, il se redresse. Il échange quelques bribes avec les militants présents au siège: «Ils ont été secoués hier, c'est du bon travail», lance-t-il à ses fidèles, avant de s'enfermer dans son bureau. Ils, ce sont les redresseurs du parti. Les contestataires, les adversaires de Djaballah conduits par M.Boulahia. A la veille du premier congrès d'El-Islah, l'ambiance est loin d'être morose. Elle n'est pas non plus survoltée. Mais l'inquiétude et l'urgence sont perceptibles. Les incessants va-et-vient du standardiste impriment une certaine dynamique. «La plupart des congressistes sont bloqués par la neige mais les routes commencent à se débloquer», rassure un militant. «Les préparatifs vont bon train et nous organiserons notre congrès dans les normes et de bonnes conditions», indique le chargé de l'information, Ahmed Chitour. 1500 militants sont conviés demain à assister au premier congrès du parti qui aura lieu les 29, 30 et 31 à Zéralda. «99 % des congressistes sont élus et ont un procès-verbal d'un huissier de justice», souligne M.Chitour. Mais avant cela, plusieurs embûches jalonnent le chemin du congrès: les contestataires, le procès contre Djaballah qui se déroulera aujourd'hui à la cour d'Alger et l'autorisation du ministère de l'Intérieur qui n'est pas encore délivrée. Plus optimiste que jamais, le chargé de communication élimine une à une les entraves: «Nous n'avons rien à voir avec ceux qui se revendiquent des redresseurs, l'affaire est en justice et c'est à cette dernière de trancher». «L'autorisation nous sera délivrée en principe cet après-midi. Nous avons déposé le dossier il y a plus de dix jours». «Le procès de demain (aujourd'hui Ndlr) sera reporté, nous en sommes convaincus». Seulement voilà, en fin d'après-midi, la décision de report du congrès à cause du même procès, glace l'atmosphère. Un communiqué du parti annonce le report du congrès jusqu'à ce que la chambre administrative statue sur le procès. Le sort du parti de Djaballah n'est pas encore fixé. Comme c'est le cas dans la majorité des formations politiques nationales, il y a une inquiétante vénération du coup d'Etat. Une réalité que les politiques réduisent à un intermède dans l'histoire des partis politiques. Djaballah pourra-t-il surmonter cet intermède?