Américains et gouvernement intérimaires mettent en place des mesures de sécurité pour le prochain scrutin. Attentats, attaques et embuscades contre les forces armées américaines et les services de sécurité irakiens se sont multipliés à moins de trois semaines du rendez-vous électoral du 30 janvier prochain. La violence meurtrière continue ainsi à opérer en Irak, où il ne se passe pas un jour qui n'ait son lot de violence sanglante. Bagdad, Samara et Baaqouba, et plus généralement la province rebelle d'Al-Anbar (ouest de Bagdad), ont été marqués mardi et hier par plusieurs attentats ayant ciblé les forces de sécurité irakiennes et des soldats de forces armées américaines. Dimanche dernier, huit soldats ukrainiens de la force multinationale (FMN) ont été tués dans le nord du pays. Le bilan macabre des morts continue de s'allonger au point que le nombre des victimes n'est pas toujours donné en temps réel. La situation en Irak est vraiment «mauvaise» comme a fini par l'admettre le Premier ministre intérimaire, Iyad Allaoui. Qui a déclaré hier que «la situation sécuritaire reste mauvaise» «Nous ne prétendons pas avoir réussi, mais nous avons réalisé des progrès dans la poursuite de la traque des éléments terroristes». Ne parvenant pas à réduire la violence ni à assurer le minimum de sécurité aux citoyens irakiens, les autorités intérimaires irakiennes et Washington pointent le doigt vers les voisins de l'Irak, accusés de tous les maux de ce pays. Ainsi, la Syrie semble bien dans le collimateur américain, si l'on en croit le magazine américain Newsweek qui croit savoir que le Pentagone réfléchit à l'envoi de commandos spécialisés en territoire syrien pour y pourchasser les insurgés irakiens. Le secrétaire à la Défense américain, Donald Rumsfeld, a fermement démenti hier les «allégations» de Newsweek. Toutefois, les attaques de ces derniers jours contre la Syrie et l'Iran, notamment accusés d'abriter des insurgés irakiens par le ministre irakien de la Défense, Hazem Chaalane, les déclarations d'officiers militaires américains sonnent plutôt comme une fuite en avant à quelques semaines des élections générales irakiennes. Sur le plan sécuritaire, les Américains et le gouvernement intérimaire irakien, mettent en place des mesures de sécurité pour prévenir tout dérapage à l'approche du scrutin crucial pour les uns et les autres par les enjeux qu'il détermine. Dans une déclaration à la presse, le porte-parole de la Maison-Blanche, Scott McClellan a indiqué hier que le président Bush et le Premier ministre intérimaire Iyad Allaoui, ont «discuté des préparations pour les prochaines élections afin de s'assurer que la date du 30 janvier fixée par la commission électorale sera respectée» affirmant: «Ils sont déterminés à ce que l'élection se déroule de la meilleure façon possible, avec la plus forte participation possible. Et, pour cela, nous travaillons sur les questions de sécurité». Reste cependant la question de la participation des sunnites au scrutin du 30 janvier, cette entité irakienne ayant décidé de ne pas y prendre part. Depuis, on presse les sunnites de tous les côtés pour les inciter à revenir sur leur décision, le gouvernement intérimaire demandant même la médiation des pays voisins à majorité sunnite. Pour sa part, Iyad Allaoui, a encore une fois demandé hier aux responsables sunnites de participer au scrutin, indiquant «vous avez un rôle important à jouer dans l'avenir de l'Irak, et le meilleur moyen est de participer à ce scrutin». De fait, des élections générales sans les sunnites, minoritaires certes, mais ayant joué un rôle historique dans la formation de l'Irak moderne, seraient sans signification et pourraient a contrario aggraver la situation politique et sécuritaire dans le pays. En fait, en voulant tenir coûte que coûte le scrutin pour le 30 janvier alors que les conditions sécuritaires et politiques nécessaires pour sa tenue ne sont pas réunies, sonne quelque peu comme un pari hasardeux pour des politiciens qui brûlent les étapes en cherchant surtout à assurer un pouvoir pro-américain à Bagdad. Or, une victoire du clan chiite de l'Alliance unifiée irakienne, une liste regroupant les importants partis religieux du Conseil suprême de la révolution islamique en Irak (Csrii) et le parti Da'wa soutenue par l'emblématique ayatollah Ali Sistani, remettrait en cause les plans américains pour l'Irak et les ambitions politiques de Iyad Allaoui de se voir introniser homme fort du pouvoir irakien. Ainsi, le parti du Premier ministre intérimaire, le mouvement de l'Entente nationale (MEN) a déposé une plainte hier auprès de la commission électorale contre l'Alliance unifiée l'accusant d'utiliser le nom du grand ayatollah dans sa campagne électorale. Théoriquement, selon les règles de ce scrutin, l'usage de «logo religieux et belliqueux» était interdit comme le déclarait en novembre dernier, le président de la commission électorale, Abdel Hussein Al-Hindaoui. De fait, le MEN conteste à l'ayatollah Ali Sistani et à la Marjaïya (le plus haut conseil des ayatollah chiite irakiens) de soutenir l'Alliance chiite rivale. Les membres de l'alliance unifiée irakienne voient les choses autrement, ne trouvant rien de répréhensible dans leur action soutenant: «Ce n'est pas répréhensible d'avoir le soutien de la Marjaïya. Elle appelle les sunnites, les chiites, les Arabes et les Kurdes à participer aux élections et veut que les plus qualifiés soient membres du parlement».