Cette règle ne peut que dissuader les éventuels investisseurs étrangers désireux de s'implanter en Algérie. La règle des 51/49% divise la classe politique, y compris les deux principaux partis au pouvoir: le FLN et le RND. La règle des 51/49%, introduite par Ahmed Ouyahia dans la loi de finances complémentaire de 2009, n'a jamais cessé de provoquer des débats au sein de la classe politique et des milieux économiques. Les cercles de gauche, hostiles à la propriété privée qu'elle soit nationale ou étrangère, n'ont raté aucune occasion de montrer leur adhésion à cette loi et de défendre ses promoteurs. D'autres milieux, par dogmatisme partisan, ont également appuyé la démarche du gouvernement qui y tenait sous prétexte qu'il s'agissait d'une mesure protectionniste. Mais l'opinion publique dans son écrasante majorité, les milieux d'affaires, les organisations patronales, les experts indépendants, les partis libéraux et sociaux-démocrates ont tous réclamé, dès sa mise en place, sa révision, voire son abrogation. Règle des 51/49%: ce qui ne va pas On lui reproche, entre autres, d'attenter à l'attractivité déjà peu reluisante du marchée algérien en matière d'investissement étranger. En effet, arrimée au droit de préemption de l'Etat, à la bureaucratie, à la difficulté d'accès au foncier, à l'instabilité juridique chronique qui régente le climat des affaires, cette règle ne peut que dissuader les éventuels investisseurs étrangers désireux de s'implanter en Algérie. De plus, les 51% qui reviennent, dans le cadre des partenariats, à la partie algérienne ne sont pas toujours faciles à satisfaire, surtout quand il s'agit de grands investissements. En effet, il existe très peu d'opérateurs économiques algériens en mesure d'apporter 51% à un projet qui coûte par exemple 500 millions de dollars. On peut également citer la difficulté, voire l'impossibilité de voir des partenaires étrangers de grande importance investir des fonds levés en Bourse avec un pouvoir de décision réduit(49%) qui plus est dans le pays où la bureaucratic sévit jusqu'à l'étouffement. Il y a par ailleurs, le fait que, au même moment où le commerce extérieur est ouvert complètement, notamment dans le cadre de l'Accord d'association avec l'Union européenne et la Zone arabe de libre-échange, les portes de l'investissement sont indirectement fermées aux entreprises étrangères à travers cette règle. Autrement dit, l'Algérie préfère importer les produits que les étrangers fabriquent dans d'autres pays au lieu de permettre à ceux-ci de les fabriquer en Algérie, en révisant la règle, avec tout ce que cela implique en termes de création d'emplois et de richesses, de contribution fiscale et, éventuellement, d'exportation.Le projet de Code de l'investissement débattu avant-hier à l'APN propose d'extirper la règle des 51/49% régissant l'investissement étranger en Algérie du Code de l'investissement pour être régie par les textes de lois de finances. Pour les rédacteurs du projet de loi, la règle des 51/49%, s'est révélée, difficile, voire impossible à faire respecter en raison de la complexité de la procédure, ce qui a permis, pour la période allant du 31 décembre 2008 au 31 décembre 2013, à 5141 étrangers de s'infiltrer pour exercer des activités de commerce, dont 711 au titre de l'import, alors que pour la même période l'Andi n'a enregistré que 110 déclarations d'investissements étrangers dont l'admission a été approuvée par le CNI. Cette situation rocambolesque a poussé le gouvernement à réfléchir. Mais timidement puisqu'aucune volonté claire de réviser ou d'abolir cette loi n'est exprimée. Néanmoins, le parti majoritaire au Parlement, qui ne s'est prononcé que très peu sur cette question, met le pied dans le plat et plaide pour une révision de cette loi en reprochant au gouvernement d'avoir commis l'erreur de la mettre en place. Ce parti souhaite en effet que cette règle soit appliquée uniquement pour les secteurs stratégiques et les projets névralgiques. «Cette règle est un obstacle pour l'investissement. Il est temps de la traiter sans démagogie. La règle des 51/49% doit s'appliquer aux secteurs névralgiques de l'économie nationale. Elle ne doit pas être systématisée et elle doit apparaître dans le Code des investissements», a déclaré, avant-hier Mohamed-Cherif Ould El-Hocine député du FLN, lors des débats sur le projet de Code de l'investissement. Mahdjoub Beda, lui aussi député du FLN, estime qu'il est temps de réviser cette règle, pour les secteurs qui n'ont pas connu de développement, comme celui des services en soulignant que son parti proposera un amendement de cette loi. Majoritaire au gouvernement, à l'APN et au Sénat, le FLN a de fortes chances de faire aboutir sa démarche. Les parts sont partagées Pour Jil Jadid, la règle des 51/49% a bloqué les investissements durant toute la période de son implication alors que l'Algérie a besoin d'un flux très important d'IDE. «La règle des 51/49% n'est pas sacrée. Il faut repenser l'économie selon des régles pragmatiques», nous a expliqué le responsable de communication de ce parti, Younès Saber Cherif, en soulignant que le principal problème réside dans l'absence d'une vision économique. Claire. Le MSP lui aussi se range du côté de ceux qui plaident pour la révision de cette loi en recommandant de limiter son champ d'application aux seuls secteurs stratégiques qu'il convient de définir avec précision. «Le FLN n'est pas sérieux. Il a voté, il y a quelques mois la loi de finances 2016 qui contient la règle des 51/49%. Aujourd'hui, il revendique sa révision. Au MSP, nous avons revendiqué sa révision et la revendiquons toujours. Cette règle n'a pas de sens. L'Algérie a racheté 51% du capital de Djezzy, mais cette entreprise est actuellement en décadence. Il faut qu'on sache ce qu'on veut: détenir des parts dans des entreprises ou créer des richesses et des emplois?» a relevé Naâmane Laouar, cadre dirigeant du MSP. Le RND par contre est catégoriquement contre la révision de la règle des 51/49% «au stade actuel des choses». «La règle des 51/49% est contenue dans la loi de finances 2016. La toucher, c'est toucher à l'équilibre de toute la charpente juridique de l'économie. Nous sommes contre sa révision au stade actuel des choses. Au moment où elle commence à être admise par nos partenaires étrangers, on songe à la réviser, comme si on était incapable d'aller au bout de nos convictions», nous a déclaré Chihab Seddik, porte-parole du RND, en soulignant que les dysfonctionnements de cette règle et les incidents qu'ils ont entraînés relèvent de la responsabilité de l'Etat qui est appelé à jouer son rôle régalien avec rigueur. Le gouvernement a décidé d'extirper la règle des 51/49% du Code de l'investissement. Ira-t-il vers sa révision? Le ministre en charge du secteur, Abdessalem Bouchouareb, est du RND et le RND est contre sa révision, du moins dans les conditions présentes. Néanmoins, Seddik Chihab a précisé ceci: «Le débat évolue, les positions aussi.»