C'est un peu le cas de le dire au vu des réactions tant des politiques que du simple citoyen lambda. Un citoyen anglais se mordait les doigts, samedi, d'avoir voté pour la sortie de l'Union européenne. Tout simplement en votant «leave «(donner congé à l'UE) il pensait que cela n'irait pas aussi loin: le fait accompli du divorce avec l'ensemble européen. Cela résume le sentiment général des Britanniques sur la tête desquels le ciel est tombé dans la nuit de jeudi induit par le résultat final du référendum. K.-O. debout, le Premier ministre britannique, David Cameron, ne sembla jamais avoir été effleuré du fait que ses compatriotes iraient jusqu'au point de non-retour sur une question qui, au fil de la campagne électorale, avait dépassé le seul consensus britannique, pour devenir une affaire européenne. retournant le couteau dans la plaie, si l'on peut dire, la Première ministre écossaise, Nicola Sturgeon, très combative et engagée, affirmait dimanche dernier, que l'Ecosse n'avait pas voté [en 2014] le maintien dans le Royaume-Uni pour se voir exclue de l'Union européenne de cette manière. Dès lors, elle réclame, un nouveau référendum pour l'indépendance de l'Ecosse. Ces trois exemples montrent à l'envi que le référendum sur la Brexit - dont à l'évidence personne ne s'attendait à ce qu'il aboutisse effectivement au départ de la Grande-Bretagne - a été un vaste quiproquo dont les acteurs ne semblaient mesurer les retombées sur le Royaume-Uni, l'Union européenne et [ce n'est pas le moindre] sur l'économie mondiale qui risquera de souffrir de la nouvelle donne britannique. De fait, ce qui aurait pu passer pour une farce, chacun comptant sur l'autre pour que la Brexit n'aille pas plus loin qu'une simple semonce au gouvernement Cameron, a eu des effets désastreux avec un terrible retour de bâton. Le résultat du référendum qui provoqua un séisme en Grande-Bretagne, dans l'Union européenne et dans le monde financier et économique [plusieurs Bourses asiatiques et européennes se sont effondrées à l'annonce de la victoire de la Brexit] aura ainsi surpris experts, analystes et politiques qui ne pensaient pas que les choses iraient jusqu'à la rupture. Des analystes sont allés jusqu'à gloser sur le néologisme entre «Grexit» [Grèce exit] et Brexit [British exit]. Or, dans le premier cas, l'Union européenne a été sur le point de bouter hors de ses rangs une Grèce en faillite d'où le «Grexit». Ce n'est pas du tout la même chose pour la Grande-Bretagne qui est sortie de l'UE de son propre chef. Or, déjà, on évoque un «Nexit» (Netherlands exit] et même un «Frexit» [France exit]. Cela reste dans la commodité sémantique et donc dans l'ambiguïté facile pour expliquer un fait de société frappant: la montée de la xénophobie, le refus de l'autre, des lois liberticides qui foisonnent dans l'Europe des 28 - comme cela a été le cas notamment en France après les récents attentats -, des pays au bord de la déroute financière (telle la Grèce, voire l'Espagne et le Portugal) et, last but not least, la montée des nationalismes marquée par un populisme outré qui remettent en cause l'identité européenne. De fait, il n'y a pas d'identité européenne pour une entité dont l'édification commença en 1957 (CEE, puis UE). La «mayonnaise euro» n'a simplement pas pris, ou plus sûrement la «greffe» européenne a échoué, chaque nation européenne étant arc-boutée sur son quant-à-soi. Le modèle européen a ainsi failli à sa mission essentielle: construire un ensemble européen homogène, où les peuples le composant se sentiraient en osmose. La sortie de la Grande-Bretagne de l'UE, les velléités d'autres pays de suivre son exemple, montrent les limites d'un système à bout de souffle qui ne sut ni se renouveler ni - c'est le plus grave - répondre aux attentes de peuples européens qui ne se reconnaissent pas dans sa gouvernance. L'UE apparaît ainsi comme un fantasme, une chimère qui coûte cher aux peuples européens