Ce dernier voulait prouver à l'opinion nationale qu'il reste le leader incontournable d'El Islah. «Le peuple algérien a besoin d'El Islah parce qu'il est conscient que nous demeurons le seul parti de l'opposition capable de dire non , haut et fort , au bradage des richesses naturelles, à la destruction de la société avec tous ce qu'elle possède comme valeurs et principes. Le parti ne va pas trahir cette confiance, l'opportunisme n'a pas de place chez nous», s'est adressé, jeudi, Abdellah Djaballah, président du Mouvement pour la réforme nationale, aux centaines de militants et cadres qui ont assisté à la conférence nationale portant sur le thème de «L'expérience démocratique en Algérie, réalité et perspective». Djaballah est entré dans la salle de conférence archicomble de la mutuelle des matériaux de construction à Zeralda, sous les applaudissements d'une forte assistance, venue exprimer à son «leader» son soutien indéfectible. «Djaballah est notre président» scandaient ces derniers. Un test réussi pour ce chef islamiste dont le parti fait face à une sérieuse crise interne. Imperturbable, Djaballah revient un mois après l'annulation de son congrès par le ministère de l'Intérieur. Pour ce retour tant attendu il a même choisi la salle qui devait abriter les congressistes les 29, 30 et 31 décembre 2004. Il invite aussi plus de 800 militants, tous responsables au niveau national ou local. S'agit-il d'un simple fait du hasard, ou plutôt une revanche sur la décision du département de Yazid Zerhouni? Ce qui est certain, par contre, c'est qu'à travers cette conférence, Djaballah voulait prouver à l'opinion nationale que la «campagne de déstabilisation» qui le visait, pour reprendre ses termes, n'a laissé aucune trace, et à aucun moment, elle n'a menacé sa position de leader et fondateur du parti : «Nous avons su surmonter cette crise qui relève aujourd'hui du passé.» Djaballah promet à ses militants d'organiser un congrès historique, cette fois-ci à la Coupole: «Au départ on nous a refusé cette salle, mais les autorités ont accordé une exception au FLN, j'espère qu'on fera de même pour nous aussi» Fidèle à ses positions, Djaballah affirme que cette crise a été soigneusement colportée par les cercles du pouvoir avec l'objectif de faire fléchir un parti de l'opposition. Mais conscient que le pouvoir est «une réalité», ce dernier se dit prêt à tendre la main, à faire l'effort de discuter et de participer à des débats à condition qu'on «s' adresse à l'institution légitime du parti», autrement dit, au «président d'El Islah» Djaballah n'a pas explicité cette vision, mais il précise dans la foulée que l'opposition ne peut nier le pouvoir, «Nous nous trouvons confrontés à une équation des plus complexes, d'une part on critique le régime, de l'autre on participe à des élections organisées par ce dernier. Qu'on le veuille ou non, la classe politique met à chacune de ses participation dans les élections un pas dans le pouvoir.» Comment échapper à ce «piège»? Le président du parti ne semblait pas posséder des éléments de réponse. Djaballah est-il prêt à s'investir dans une coalition gouvernementale avec des préalables? Une autre question éludée par l'orateur. Après la main tendue, Djaballah change de ton pour dresser un sévère réquisitoire contre le pouvoir. Il n'est pas allé, dans ce sens, par quatre chemins pour dénoncer les mesures impopulaires, à l'image de l'augmentation du prix des carburants: «Le peuple, dit-il, doit bénéficier de l'embellie financière des caisses de l'Etat,» or, ajoute t-il «c'est loin d'être le cas aujourd'hui». Dans un autre chapitre, Djaballah demande la levée de l'état d'urgence. Plaidant pour la réconciliation nationale, ce dernier défend aussi que l'amnistie générale doit toucher six catégories: les groupes armés qui sont au maquis, les prisonniers politiques, les exilés, les disparus, les personnes licenciées de leur poste de travail et enfin quelques corps de sécurité.