La déclaration du président annonce en filigrane des remaniements rigoureux à la tête des entreprises. Un rappel à l'ordre sévère du président de la République à l'endroit des gestionnaires des entreprises publiques. Les P-DG se conformeront désormais à une loi de rigueur dans la gestion des fonds de leurs entreprises. «Les réformes économiques entamées par notre pays et la liberté accordée aux entreprises publiques sont devenues un véritable danger pour l'Etat», a fait remarquer le président de la République, hier à l'hôtel Hilton (Alger), dans un discours à l'ouverture du 2e Congrès africain du pétrole, dont le thème principal est la pollution. Sans citer nommément ces entreprises, M.Bouteflika a indiqué que certains responsables ont outrepassé leurs prérogatives jusqu'à prendre des décisions graves, comme celles qui consistent à contracter des dettes au nom de l'Etat. «Ces responsables n'ont pas le droit d'agir à la place de l'Etat, ils gèrent l'argent du peuple et ils sont censés rendre des comptes.» Pour compléter son «réquisitoire», M.Bouteflika a annoncé qu' «il ne sera plus permis aux conseils d'administration de ces entreprises de prendre des décisions qui engagent l'argent du peuple sans en référer au ministre ou à la tutelle», ajoutant que «l'autonomie des entreprises ne signifie pas qu'elles sont au-dessus de l'Etat qui est responsable du moindre centime, car chaque centime est la propriété du peuple». Le président a ensuite mis en garde contre le fait que «ces réformes qui permettaient aux gestionnaires de fonds publics d'agir en dehors du cadre légal, peuvent causer la dislocation des structures de l'Etat». «Partant de notre attachement à la démocratie qui nous interpelle pour veiller toujours plus sur les intérêts du peuple, nous ne pouvons accepter ces réformes qui anéantissent l'Etat et par voie de conséquence la souveraineté du peuple, ce qui implique la nécessité de soumettre le secteur public au contrôle de l'Etat», a conclu le président de la République. Ces propos du chef de l'Etat viennent conforter une circulaire du chef du gouvernement - rapportée par un confrère - qui oblige les gestionnaires des entreprises publiques à passer par un avis favorable du ministère des Finances pour l'accès à une ligne de crédit en devises. Aussi, le rappel à l'ordre du président annonce en filigrane un remaniement sérieux et rigoureux à la tête des entreprises publiques. D'autre part, il vise à renforcer la crédibilité des politiques gouvernementales par l'application stricte des engagements de l'Etat, notamment dans le cadre de la bonne gouvernance. Beaucoup a été dit sur la gestion et le comportement de certains responsables dont les attitudes ont hypothéqué l'existence des entreprises. Plusieurs scandales financiers ont éclaté en Algérie au moment où le pays entame sa mue vers une gestion économique transparente. Il y a quelques semaines, la Banque mondiale, dans un rapport rendu public sur «le développement dans le monde» en 2005, a pointé du doigt l'Algérie. Les experts de la BM ont avancé que le phénomène de la corruption, défini sommairement par cette institution comme «une pratique utilisant la puissance publique à des fins d'enrichissement privé», gangrène toujours l'économie nationale. Par ailleurs, le président Abdelaziz Bouteflika a appelé à la création d'une «société multinationale de lutte contre la pollution marine». Cette société aurait pour mission «d'élaborer un plan de lutte contre les déversements accidentels de pétrole et de réunir les moyens d'intervention adéquats en cas de risque majeur», a précisé le président Bouteflika, estimant qu'elle devrait regrouper, au départ, «les pays riverains de la Méditerranée et ceux de l'Afrique de l'Ouest». Le président a par ailleurs, estimé que les solutions recherchées dans ce domaine au niveau national, régional et mondial «doivent aboutir à des mesures concrètes face aux problèmes de pollution générés par l'énergie». L'appel de M.Bouteflika a été lancé alors qu'un début de marée noire était provoqué hier, sur les côtes du nord-est de la Tunisie par un bateau marocain, qui s'est échoué mardi, en raison d'une forte tempête. La lutte contre les risques majeurs de pollution marine par les hydrocarbures est un problème qui doit être «sérieusement pris en charge» par les gouvernements et compagnies pétrolières concernées, a conclu le chef de l'Etat.