RND et MSP mettent les bouchées doubles en une véritable course contre la montre, avant le grand retour du FLN. Les dirigeants de l'Alliance présidentielle ont eu beau refléter l'image d'une entente cordiale, la célébration du premier anniversaire de la naissance de cette structure, intervenue le 16 février dernier, n'en reflétait pas moins le début des «hostilités». La raison, qui en est toute simple, a trait à la reconfiguration prochaine de l'échiquier politique national, mais aussi à un très probable remaniement gouvernemental, censé intervenir, selon des indiscrétions récoltées auprès de sources proches de la présidence, au mois d'avril prochain. Des éléments qui ne trompent pas ont montré à quel point l'Alliance présidentielle, censée être organiquement et politiquement très soudée, battait véritablement de l'aile. Il a en effet, fallu attendre toute une année avant qu'un second sommet ne se tienne entre Belkhadem, Ouyahia et Soltani. Les statuts de cette structure, pourtant, prévoyaient des rencontres trimestrielles, ce qui n'a jamais été le cas. Ce n'est pas tout. La rencontre de ce 16 avril aura fait carrément l'effet de la montagne qui accouche d'une souris puisque les sujets politiques sensibles ont soigneusement été éludés par ces trois leaders après des conciliabules à huis clos de près de trois heures. Tous les éléments d'information disponibles concourent à dire qu'une véritable guerre de positions est enclenchée entre ces trois partis, non pas seulement à cause du prochain remaniement du gouvernement, mais aussi en prévision des futures échéances électorales. Il pourrait même s'agir de législatives et de locales anticipées. C'est pourquoi, le RND, revenu de loin depuis sa double débâcle de 2002, a mis en branle toute sa machine électorale afin de ne pas perdre les acquis qu'il a décrochés à la faveur de la crise qu'a vécue le FLN. «Il s'agit essentiellement, pour ce parti, comme nous l'indiquent sous le sceau de l'anonymat des sources très proches d'Ouyahia, de garder le contrôle du gouvernement ainsi que la majorité au Sénat en attendant les prochaines législatives.» Déjà, Miloud Chorfi, porte-parole du RND et président du groupe parlementaire de ce parti à l'APN, est descendu sur le terrain pour animer, à partir de Mascara, un meeting dans lequel il a quasiment sanctifié toute la démarche de Bouteflika portant règlement définitif de la crise algérienne, à commencer par la réconciliation nationale et l'amnistie générale que le RND s'est finalement résolu à soutenir sans en connaître la teneur exacte ni les véritables objectifs qui en sont poursuivis. Cette sortie, en fait, n'a servi qu'à donner le «la» d'un véritable plan de bataille que s'apprête à mettre en branle le parti d'Ahmed Ouyahia dans une véritable offre de service en direction du président Bouteflika. Que l'on en juge. Profitant de l'«aubaine» qu'offre la célébration de l'anniversaire du RND, Ahmed Ouyahia lui-même, fort de son bilan et de son style désormais inimitable, a décidé de descendre aujourd'hui dans l'arène pour animer un meeting populaire à Alger. Ses proches collaborateurs lui emboîteront le pas afin d'effectuer des sorties au niveau de près de la moitié des wilayas du pays durant les deux jours à venir. Une véritable démonstration de force dont le sens ni les visées ne sauraient échapper à aucun observateur avisé de la scène politique algérienne. Le RND, qui refusait jusque-là de se prononcer sur l'amnistie et la réconciliation avant que les textes de loi n'en soient connus par lui, semble même s'être résolu à abandonner cette option dans le seul but de demeurer en pole position dans la future campagne référendaire, avant que le FLN ne vienne la lui disputer bien plus tôt qu'il ne le croit. C'est pour cette raison que, tout en mettant en avant sa disponibilité à mener campagne tous azimuts en faveur du plan présidentiel, le RND oeuvre également à battre le rappel de ses troupes afin que la mobilisation soit à son paroxysme bien avant le déclenchement de la campagne référendaire. Loin de demeurer en reste, le MSP a, lui aussi, enclenché l'embrayage dans un démarrage qui promet pas mal d'«embardées» et de «surprises» dans les prochains jours. Bouguerra Soltani, président en personne, a lui aussi pris son bâton de pèlerin pour s'en aller prêcher la bonne parole à partir de Bordj Bou-Arréridj. Ce parti, qui sait ne pas pouvoir faire le poids face à ses deux «alliés», n'en a pas moins l'intention d'entrer en campagne bien avant l'heure. Il compte, ce faisant, compenser ses «insuffisances» à travers son entrisme ainsi que la surenchère, devenue quasi légendaire chez lui depuis l'époque du défunt Mahfoud Nahnah. C'est pourquoi Bouguerra Soltani et les siens, même s'ils savent n'avoir aucune chance dans leurs demandes, continueront jusqu'au bout de revendiquer la levée de l'état d'urgence, mais aussi de s'opposer farouchement à la réforme du système éducatif algérien, ainsi qu'à celle du code de la famille. Ce seront là autant de chevaux de Troie, ou d'atouts, sur lesquels le MSP jouera autant que de besoin, afin de n'être jamais exclu totalement de la course, mais aussi de garder un pied au sein de l'opposition islamiste qu'incarne présentement le mouvement El Islah de Saâd Abdallah Djaballah. Loin de s'en laisser conter pour autant, le FLN semble avoir pris conscience de ce qui se passe autour de lui, comme en témoigne le discours fait, hier, par son secrétaire général, Abdelaziz Belkhadem. Ce dernier, critiquant avec virulence les «éradicateurs», lesquels ne sont pas tous là où on pourrait le penser, a lui aussi défendu le plan présidentiel portant réconciliation nationale et amnistie générale. Il a, lui, à faire valoir une fantastique machine électorale qui fait tellement peur, même au RND, qu'Ouyahia, en fin manoeuvrier qu'il est, a dû prévoir, assumer et éluder sa probable «défaite» en soulignant que «Bouteflika gagnerait son pari référendaire même sans les partis ni aucune campagne électorale». Mieux, le FLN, à la poursuite désespérée de tout ce temps perdu, a même décidé de se préparer dès maintenant aux prochaines échéances électorales (lire le papier de Nadira Bel). Des voix, dont on connaît le poids sur l'échiquier politique et décisionnel algérien, s'élèvent même pour revendiquer la chefferie du gouvernement, conformément aux us démocratiques usités de par le monde. C'est dire si cette véritable guerre des positions entre ces trois «alliés» promet d'être dure et harassante. Ce qui n'empêchera pas les membres de cette alliance de garder le sourire et de continuer de se rencontrer, échangeant des amabilités, sans jamais s'arrêter sur l'essentiel avant que les jeux ne soient enfin faits, et que la place de chacun sur l'échiquier politique ne soit connue avec exactitude.
