Les réformes que propose Alger auraient déjà obtenu le consensus voulu auprès des 22 Etats et royaumes concernés. Les préparatifs pour la tenue du Sommet arabe d'Alger en sont désormais à leur dernière ligne droite. D'ores et déjà, il est permis de dire que la portée stratégique de cette rencontre dépasse de loin les frontières des pays concernés au regard de la qualité des invités, à commencer par le secrétaire général de l'ONU. Alger, qui a toujours refusé de servir d'alibi à n'importe quelle manifestation, a commencé un vaste travail de «lobbying» diplomatique depuis au moins deux années, à la faveur de son retour en force sur le devant de la scène mondiale, pour tenter de faire passer certaines réformes devenues absolument indispensables face aux mutations en cours, aux dangers qui guettent de toutes parts le monde arabe, notamment à la faveur du GMO Us, et à l'éclipse dont est victime la Ligue pour diverses raisons. Alger a déjà eu à abriter deux sommets précédents qui se sont achevés, tous deux, sur des décisions d'une importance capitale. Le premier, sixième du nom, tenu en 1973, avait servi à la reconnaissance de l'OLP comme représentant légal et exclusif du peuple palestinien. Le second, extraordinaire et historique, tenu en 1988, avait servi à proclamer la naissance officielle de l'Etat palestinien avec un soutien indéfectible apporté à la première Intifadha. Celui-ci, tenu à Zéralda, est devenu une référence pour tous tant sa réussite a continué de marquer les esprits durant de nombreuses années. C'est à cette occasion, également, que la pierre angulaire pour l'édification de l'UMA avait été mise en place. Il n'y a donc aucune raison de déroger à la tradition. Mieux, tous les experts et les gens au fait de la diplomatie mondiale, s'attendent à ce que le sommet des 22 et 23 mars prochains constitue carrément un tournant décisif dans l'histoire de cette institution à bout de souffle, venue «recharger ses batteries» dans un pays réputé avant-gardiste quand il s'agit de question touchant au destin des peuples et des nations. La Ligue, qui soufflera sa soixantième bougie lors de ce sommet, a donc tout intérêt à se réformer. Pour en saisir la nécessité absolue, il n'est que de regarder comment cette instance a fini par «s'effilocher» sur le plan diplomatique, au fil des ans et des déconfitures. Ainsi, sur les 16 points inscrits à l'ordre du jour, c'est sans doute le troisième qui retiendra le plus l'attention, et qui scellera le tournant décisif dont ont besoin l'ensemble des Etats et royaumes arabes. Il s'agit de l'étude et de l'adoption de trois propositions relatives à une révision de fond de la charte portant création de la Ligue arabe. Il s'agit de la mise en place d'un Parlement arabe. Celui-ci, qui s'inspire largement de l'expérience européenne, commencera par la mise en place d'un conseil transitoire représenté par quatre «députés» pour chacun des 22 pays membres. Ici, il convient de souligner que la Ligue va quitter le côté «protocolaire» et étatique pour aller vers une coopération entre les peuples, ou à tout le moins, leurs représentants respectifs, ce qui n'est guère une mince chose. Idem pour la mise en place d'une commission de suivi. Instance révolutionnaire et innovante, qui oeuvrera une année durant sous la présidence tournante de notre pays, elle servira, sous la direction des chefs de la diplomatie des Etats membres, à suivre techniquement et pas à pas l'application de l'ensemble des résolutions adoptées. Il sera même question de mesures plus ou moins coercitives passibles d'être prises à l'encontre des «mauvais élèves». Le troisième point, jugé être le plus important, a trait à un changement fondamental dans le mode électoral. Les Etats ne devraient plus jouir du «droit de veto» tacite puisque, jusqu'alors, aucune décision ne pouvait être entérinée tant que l'unanimité des membres ne dit pas oui. Il serait question, désormais, d'aller vers une majorité aux deux-tiers pour les questions importantes et la majorité simple pour le restant des affaires. Le veto ne serait reconduit qu'exceptionnellement, dans les cas, rarissimes, d'expulsion ou d'admission de nouveaux membres. Pour le restant de l'ordre du jour, il sera question du rapport de la présidence passée, de celui du secrétaire général dont le mandat n'expire pas avant l'année prochaine, de l'étude des idées posées par Kadhafi lors de la rencontre d'Oman, les différents points de tension dans le monde arabe, y compris la question syrienne même si elle n'y est pas expressément désignée, ainsi que diverses questions économiques.