Un pari fou que celui des éditions Apic, qui viennent de publier un recueil de poésies. En l'occurrence celui de Kaci Hadjar, au titre évocateur: Les joies et les peines. En alexandrins, s'il vous plaît. Hugoliens et même parfois baudelairiens. Né en 1939 en Kabylie, c'est-à-dire dans cette partie de l'Algérie profonde qui fleure bon le terroir, l'auteur nous invite à entrer dans un univers où le bucolique le dispute aux scènes du genre. En refermant l'ouvrage, on se dit qu'en fait Kaci Hadjar a fait le tour de la question : les quatre saisons (printemps, été, automne, hiver), les jardins, les souvenirs d'enfance (sans jouets, repas du soir, lavandières, le fossoyeur, le marabout...), la vie d'autrefois, la révolution, le vice et la vertu, les secrets de Paris, sont les quelques titres glanés à travers les pages de ce beau livre, bien réalisé sur le plan graphique. Un vrai bijou à offrir à ses amis. Mais c'est une somme, le bilan d'une vie, plus qu'une simple autobiographie. Né en 1939 à Aïn El Hammam, en Grande Kabylie (commune mixte de Michelet), l'auteur fait partie de cette génération de rares étudiants qui ont troqué la plume contre le fusil pour assumer leur devoir contre l'oppression et l'injustice de l'ère coloniale. Actuellement, et cela depuis 1992, il est professeur titulaire et chef de service de gynécologie obstétrique au CHU de Bologhine à Alger. Les joies et les peines est de ces livres qu'on ouvre avec délicatesse, un jardin dont on a peur de piétiner les fleurs. Les sentiments qui y sont exprimés portent la noblesse du fin pianiste qui les a mis en arpèges. Quand on le referme, on en garde longtemps la musique en mémoire.