Les autorités de Béjaïa et la population n'ont pas lésiné sur les moyens pour aider cette population. La présence des immigrants subsahariens ainsi que celle des Syriens reste une réalité qu'aucun ne peut ignorer à Béjaïa. Comme toutes les villes du pays, Béjaïa a accueilli en son sein des centaines voire des milliers de familles, fuyant la misère et les affres des guerres civiles qui minent leurs pays respectifs. Elles sont maliennes, nigériennes et syriennes à avoir choisi la capitale des Hammadites pour y élire domicile, un domicile de fortune que, dans des conditions normales, elles auraient rejeté. A Béjaïa les immigrés préfèrent quémander. Bien que sollicités par des paysans et des entrepreneurs immobiliers, les Subsahariens ont toujours refusé, préférant tendre la main, une pratique plus rentable comme l'atteste ce commerçant proche d'un carrefour au quartier Ihaddaden. «Il m'arrive de leur échanger en billets jusqu' à 7 000 dinars en pièces de monnaie.» Ces quatre dernières années, l'apparition des immigrants est le nouveau phénomène, qui singularise la wilaya de Béjaïa ainsi que ses grandes cités urbaines. Ces immigrants choisissent les principaux carrefours avec leurs femmes et enfants pour quémander. A chaque bouchon et ralentissement de circulation automobile, ils apparaissent pour aborder les automobilistes afin de leur donner de l'argent. Les immigrants subsahariens ont eu au début un accueil chaleureux. Les habitants de Béjaïa les aidaient autant qu'ils pouvaient pour dépasser une conjoncture que tout un chacun voyait courte ou du moins provisoire. Mais à la longue, les mentalités ont évolué passant d'une situation de compassion et de solidarité à celles de méfiance et de ras-le-bol. Plusieurs facteurs ont contribué à cette évolution négative dans les esprits des Béjaouis. Il y a d'abord l'attitude des immigrants qui, en dehors de l'argent liquide, rejettent tout autre aide. «Il m'est arrivé de leur préparer soigneusement un déjeuner, mais une fois sur place ils le refusent», raconte cette dame qui ironise «un repas n'est-il pas une aumône à leurs yeux?». Samir, un jeune agriculteur de Oued Ghir avoue les avoir sollicités pour des travaux aux champs en dépit d'une loi rigide qui interdit d'employer toute personne dont la présence sur le territoire du pays est illégale Samir reçoit un refus catégorique. «Il ne veulent pas travailler», nous a-t-il expliqué. Un autre facteur qui a beaucoup contribué à la métamorphose du regard par rapport à cette frange d'êtres humains. Avec le temps, les habitants de Béjaïa et ses visiteurs donnaient de moins en moins d'argent. Ce qui a amené les Subsahariens à se montrer plus insolants dans leur manière de quémander. Dans les carrefours, ils se font de plus en plus harcelants à la limite de l'agressivité au point de provoquer l'ire des usagers qui réfutent cette manière de faire. «Je passe par ce carrefour cinq à six fois par jour et chaque fois je suis harcelé par les immigrants et leurs enfants et même si je suis enclin à donner je ne peux pas donner plus d'une fois», témoigne une dame. Accueillie, aidée, soignée, les autorités de Béjaïa et la population n'ont pas lésiné sur les moyens pour aider cette population. Certaines organisations sont allées même jusqu'à protester devant la wilaya pour exiger une prise en charge digne de ces Subsahariens. Les immigrants n'ont jamais été malmenés à Béjaïa même si ces dernières temps, ils ne bénéficiaient plus de la même attention de la part des usagers de la route qui trouvent, sans l'avouer, cette présence assez gênante et que «des solutions doivent être trouvées au plus vite comme la reconduction vers leurs pays d'origine maintenant que la situation sécuritaire semble s'être améliorée ou encore créer des camps de réfugiés pour pouvoir les aider et les soigner dans des conditions normales». D'autres suggèrent aux autorités de délivrer des permis de séjour pour leur permettre de travailler et de gagner leur vie et subvenir aux besoins de leurs famille dignement.