L'offensive de l'armée syrienne continue Ces retrouvailles ne se situent pas sous les meilleurs auspices car le fossé demeure immense entre les positions de la Syrie officielle et celle des groupes rebelles, eux-mêmes divisés et instrumentalisés par des puissances régionales et Fateh al Cham, ex-Al Nosra. Après les discussions «indirectes» d'Astana, au Kazakhstan, qui avaient regroupé les délégations «militaires» sous la houlette des trois parrains du cessez-le-feu entre Damas et la rébellion, à savoir la Russie, l'Iran et la Turquie, un nouveau round des pourparlers intersyriens va s'ouvrir demain à Genève. Cette fois, c'est l'ONU ou plutôt son envoyé spécial en Syrie, Staffan de Mistura, qui reprend le dossier en main dans l'espoir de faire des avancées significatives en faveur d'une paix durable alors que les affrontements se poursuivent dans plusieurs régions du pays, notamment à Idlib. Ces retrouvailles ne se situent pas sous les meilleurs auspices car le fossé demeure immense entre les positions de la Syrie officielle et celle des groupes rebelles, eux-mêmes divisés et instrumentalisés par des puissances régionales quand ce n'est pas par les organisations terroristes comme Fateh al Cham, ex-Al Nosra, branche d'Al Qaïda, ou même Jaïch el Islam. Intervenant dans un contexte international caractérisé pare les incertitudes qui planent quant aux intentions véritables de la première puissance mondiale, les Etats-Unis, depuis l'investiture de Donald Trump qui souffle le chaud et le froid et donne des vertiges aux états-majors occidentaux, entre autres, cette réunion risque fort de connaître le même sort que celles qui ont eu lieu, toujours à Genève, entre janvier et avril 2016, et dont l'échec fut consommé tant les exigences de la délégation de l'opposition étaient démesurées. Depuis, la donne a beaucoup changé et la reprise d'Alep, seconde ville et capitale économique de la Syrie, par les forces gouvernementales a considérablement affaibli le camp des groupes rebelles, acculés sur tous les fronts et en proie à une atomisation des rangs déclenchée par certains groupes extrémistes. La situation à Idlib et dans les alentours de Raqqa où la Turquie appuie une coalition arabo-kurde chargée d'anéantir les éléments du groupe autoproclamé Etat islamique connaît depuis quarante-huit heures un net regain de violences. Et du côté de Damas ainsi qu'à Homs, au centre du pays, l'armée syrienne poursuit son offensive contre les derniers retranchements rebelles. Une offensive dénoncée par l'opposition qui y voit «un message sanglant» susceptible de nuire aux négociations de Genève. Celles-ci interviennent, avons-nous dit, dans un contexte radicalement différent par rapport à 2016, le régime du président Bachar al Assad, secondé par les alliés russe, iranien et libanais, ayant non seulement repris Alep, jusque-là un fief emblématique de la rébellion au nord de la Syrie, mais réduit également à moins de 13% du territoire les zones contrôlées par les groupes rebelles. Damas a dénoncé pas plus tard que mardi dernier les violations de son espace par les forces turques qui soutiennent cette opposition, même si Ankara s'est rapprochée de la Russie et parraine, aux côtés de l'Iran, les discussions ouvertes au lendemain d'un cessez-le-feu pour le moins volatil. Pour l'émissaire de l'ONU Staffan de Mistura qui ne veut pas se «bercer d'illusions», l'important est «d'essayer de nouveau» et il compte bien mettre face à face les deux délégations. Une gageure, les protagonistes étant pratiquement les mêmes et la situation ayant beaucoup changé depuis les rounds de 2016. Côté opposition, le fait que l'ancien chef de file ait été remplacé par Mohammad Sabra, proche de la Turquie, augure d'un possible fléchissement, mais la délégation gouvernementale, conduite par le diplomate Bachar al Jaâfari, portera sans doute des instructions identiques à celles des rencontres antérieures. Toujours est-il que la résolution de l'ONU sera mise en oeuvre avec la création de trois groupes de discussions portant sur la gouvernance, la future Constitution dont la Russie avait soumis à Astana un avant-projet rejeté par les représentants de la rébellion et les futures élections. Des thèmes dont la dimension complexe et la compréhension divergente ne permettent pas de faire preuve d'optimisme, la «transition politique» sans cesse évoquée n'ayant pas le même sens et encore moins les mêmes conséquences pour Damas et pour l'opposition. D'aucuns, parmi elles, tentent encore et toujours de soulever la question du «départ» de Bachar al Assad qui, pour sa part, qualifie de «terroristes» la quasi-totalité des groupes membres de cette opposition. Autant dire que les mêmes ingrédients vont produire les mêmes effets et qu'à ce rythme, la rencontre de Genève sera encore un coup d'épée dans l'eau. Déjà, pressentant l'échec inévitable, les soutiens occidentaux de ces groupes rebelles en appellent aux pressions des grandes puissances et des puissances régionales capables d'influer sur le sort des négociations. Si la Turquie est prête à jouer cette partition, en profitant de son rapprochement avec la Russie, tel n'est pas le cas de l'Iran dont le soutien au régime du président syrien demeure total, «aveugle» même pour reprendre un qualificatif cher aux agences d' «information» occidentales. Et, on voit mal Moscou opter pour une démarche contraire à ses intérêts après avoir tout investi en septembre 2015 pour changer radicalement la donne militaire et sauvegarder ainsi la nature d'un régime en guerre contre des idéologies qui ne cachent guère leur hostilité envers la Russie et, accessoirement, l'Iran...