Le procès qui risque de durer plusieurs jours pourrait faire la lumière sur un gros scandale qui a permis à une mafia de profiter des crédits alloués par l'Etat. Le procès des accusés de détournement des fonds destinés au soutien de l'agriculture dans la wilaya de Mascara s'est ouvert samedi au tribunal du chef-lieu de cette wilaya. 220 accusés et 87 témoins sont appelés à la barre pour faire toute la lumière sur ce scandale qui a porté un lourd préjudice à la Caisse régionale de la mutualité agricole (Crma) qui s'est constituée partie civile dans ce procès. Parmi les mis en cause dans cette affaire, figurent des employés des services agricoles, d'anciens responsables de la Crma, des entrepreneurs, des fournisseurs en équipements agricoles ainsi que des fellahs. Les premières auditions ont permis de comprendre le stratagème utilisé par certains accusés et qui consistait à se faire payer par la Crma, des factures d'un matériel ou des équipements jamais reçus par les fellahs. Un ancien responsable des services agricoles au niveau de la daïra de Aouf, dira qu'il avait alerté les services de la Gendarmerie nationale après la plainte d'un fellah qui s'était plaint de n'avoir jamais reçu un matériel agricole qui lui était pourtant destiné. Il expliquera au tribunal que les recherches qu'il avait effectuées lui avaient permis de découvrir un faux en signature sur le document de livraison établi par un fournisseur, avec la complicité d'un délégué agricole de cette localité. Outre des dossiers fictifs de fellahs, les accusés auront à répondre de complicité qui ont porté un lourd préjudice à la Crma et au Trésor public. Des fournisseurs s'étaient sucrés en se faisant payer des factures d'un matériel censé être livré aux fellahs. Des dossiers, légaux en apparence, étaient en réalité faux, puisqu'ils étaient établis sous des noms fictifs ou à l'insu de certains fellahs connus dans la région. Ce sont des milliards de dinars qui ont été détournés grâce à ces subterfuges. L'ancien responsable du service agricole au niveau de la daïra de Aouf s'étonnera de se retrouver à la barre en qualité d'accusé. «C'est moi qui a éventé le stratagème et qui a alerté les services de la gendarmerie et les responsables de la Crma et aujourd'hui je me retrouve accusé et incarcéré depuis 2 ans alors que j'ai rempli ma mission de contrôle et de vérification», dira-t-il au cours de son audition préliminaire par le tribunal. A l'époque, durant la période 2001/2004, la presse locale avait fait état de plusieurs cas de trafic qui avaient mis en cause des fournisseurs, des agents de la Crma ainsi que des employés des services agricoles dans la wilaya de Mascara. On avait parlé à l'époque de plants d'arbres fruitiers, de vaches laitières ainsi que du matériel agricole supposés être importés au profit de fellahs de la région mais qui n'ont jamais atterri dans les coopératives. La presse qui avait enquêté à l'époque avait mis à jour un gros trafic qui consistait à faire traverser les frontières aux équipements agricoles acquis dans le cadre du Pnda. De nombreux noms de fellahs avaient été évoqués. Ce procès très attendu dans la région permettra de lever le voile qui entoure des richesses qui se sont constituées du jour au lendemain sans qu'elles ne soient étayées par des investissements sur le terrain. Le Tout-Mascara parle encore du scandale des coopératives d'apiculture qui n'ont jamais vu le jour et qui ont pourtant «bouffé» un argent fou pour l'acquisition de ruches et autres essaims d'abeilles importés de l'étranger. Samedi, la salle d'audiences du tribunal de Mascara était pleine à craquer de badauds venus étancher leur curiosité, et de familles d'accusés et de témoins venues aux nouvelles. Le procès qui risque de durer plusieurs jours pourrait faire la lumière sur un gros scandale qui a permis à une mafia de profiter des crédits alloués par l'Etat au soutien de l'agriculture. L'affaire de la Crma de Mascara n'est pas sans rappeler le scandale des crédits agricoles dans la wilaya de Biskra ou les autres affaires pendantes devant la justice à OranBlida ou encore Alger. Il y a lieu de noter que le procès qui devait se tenir il y a quinze jours a été reporté pour absence des parties civiles. En raison de l'exiguïté des lieux et le nombre élevé de témoins et d'accusés, le président du tribunal a réquisitionné deux salles pour la suite du procès sur lequel nous reviendrons dans nos prochaines éditions.