Le football algérien s'est donné un nouveau patron, Kheireddine Zetchi, élu à la tête de la FAF ce lundi. Tout nouveau, tout beau? Sans doute! Cependant, eu égard à la situation, quasi sinistrée, qui est celle du jeu à onze algérien, Zetchi, qui ne bénéficiera pas de l'état de grâce traditionnel octroyé aux nouveaux venus, doit rapidement retrousser les manches. Et pour cause! Des tâches essentielles l'attendent lui et son équipe pour remettre en selle un football algérien mal en point. Dès lors, que peut-on attendre de Zetchi qui aura à faire ses preuves et à prendre des décisions ad hoc? Beaucoup en fait est attendu du nouveau boss du football algérien. Des urgences l'interpellent d'ores et déjà, dont la moindre est encore la nomination d'un entraîneur pour l'Equipe nationale au creux de la vague. Lors de sa première déclaration en tant que président de la FAF, Zetchi a dit qu'un entraîneur sera nommé dans les 15 à 20 jours à venir. Wait and see! Il y a également nécessité d'assainir et de moraliser les milieux du football professionnel [gestion, finances, arbitrage]. A terme, revoir la progression du football professionnel dont l'échec est patent; rétablir la direction de contrôle et de gestion financière des clubs professionnels (Dcgf)) [il est aberrant que le «football professionnel» fonctionne sans l'existence d'un contrôle strict par les instances décisionnelles de la FAF et de la LFP]; imposer le fair-play financier, comme cela se fait ailleurs dans le monde; promouvoir effectivement les petites catégories délaissées par les clubs professionnels et amateurs; redonner du sens à la pratique du football gangrené par une mafia qui en a fait une chasse gardée. Ces thèmes auxquels, selon nous, Kheireddine Zetchi doit s'attaquer en priorité - pour redonner leur raison d'être à la FAF et à la pratique du football - ne sont pas exhaustifs, mais indicatifs des retards accumulés dans la mise en place du professionnalisme en Algérie. Il est ainsi invraisemblable que les premières revendications des présidents des Sspa aient été de faire porter à 20 le nombre des clubs de la Ligue 1 et l'annulation de la relégation dans la Ligue 2. Peut-on attendre plus de «responsables» de clubs désargentés dans leur continuelle fuite en avant, qui vont jusqu'à contester la norme d'un championnat avec un vainqueur et des relégués? C'est dans ce contexte pourri, que les nouveaux responsables de la FAF vont travailler. En fait, c'est là qu'ils seront attendus: seraient-ils légalistes et dès lors appliqueront la loi, toute la loi qui gère et organise la pratique du football professionnel, ou poursuivront-ils dans le bricolage et le mode compagnonnage? Interrogé par la presse sur le plafonnement des salaires des joueurs [certains touchent plus de 300 millions de centimes par mois] Zetchi a donné l'impression de botter en touche, estimant que les clubs doivent «déterminer les salaires en fonction de leurs capacités financières». De notre point de vue, ce n'est pas là une réponse et Zetchi - il était encore, lundi, président du club professionnel du Paradou AC - sait parfaitement à quoi s'en tenir. C'est là ou le rétablissement de la Dcgf devient primordial car c'est à elle - Zetchi dit qu'elle ne sanctionne pas, mais accompagne les clubs, certes - qu'il appartient de donner le feu vert de la participation des clubs au championnat selon que leur budget est conforme aux normes et en osmose avec la loi qui gère le football. Dans le cas contraire, la Dcgf doit exclure le club du championnat. Sa mission est aussi d'interdire aux clubs de vivre au-dessus de leurs moyens. Ce qui implique qu'au début de chaque saison, les clubs pros doivent présenter un budget de fonctionnement équilibré, si ce n'est pas le cas leur refuser le maintien ou l'accession en Ligue 1 et en Ligue 2. Cela ne s'est jamais vu en Algérie, depuis la création du championnat professionnel en 2010. Des clubs n'avaient pas la somme de leur engagement ou traînaient des dettes de plusieurs milliards de centimes. Sous d'autres cieux, ils auraient été recalés. Ça ne marche pas ainsi en Algérie, où on est passé de l'amateurisme marron au professionnalisme marron. L'année dernière, le président de la LFP, Mahfoud Kerbadj, assurait que les 160 footballeurs professionnels percevaient chaque saison plus de 400 milliards de centimes. A la valeur actuelle du Snmg, cela représente des milliers de salariés. Or, à bien y regarder, cet argent provient essentiellement des caisses de l'Etat (subvention des APC/APW, MJS, DJS, FAF, sponsorings de sociétés étatiques) qui fait vivre des Sspa [qui, dit le boss de la FAF, doivent fixer les salaires] en principe gérées sur leurs fonds propres et dont la traçabilité financière ne fait aucun doute. A l'évidence, nous n'en sommes pas là. Un énorme chantier attend le patron de la FAF qui aura à rendre au football algérien son statut, redonner au championnat professionnel sa raison d'être: fournir des joueurs de qualité à l'Equipe nationale. C'est loin d'être une sinécure!