Le directeur de rédaction des Cahiers du cinéma sonde les bas-fonds de la nouvelle génération de cinéastes... La nouvelle vague du cinéma français était au centre des débats de la rencontre animée, hier à la filmathèque Mohamed Zinet de Riadh El Feth, par le directeur de rédaction de la revue cinématographique Cahiers du cinéma, M.Jean Michel Frodon. La genèse de ce mouvement qui, en l'espace de quelques années seulement, ébranlera le monde du cinéma français, a été lancée par un groupe de critiques du cinéma, faisant tous partie de l'équipe rédactionnelle de Cahiers du Cinéma. Aujourd'hui encore, ils sont considérés comme le porte-flambeau du quatrième art en France. Il s'agit de, entre autres, de Jean-Luc Godard, Claude Chabrol, François Truffaut...Cependant, avant de se lancer dans l'explication de cette aventure, qui mènera le cinéma français très loin, le conférencier a tenu à définir le concept de nouvelle vague. Selon Jean Michel Frodon, ce terme qui désigne un certain changement au sein de la société, a été utilisé, pour la première fois, par la doyenne de la presse française et francophone, Françoise Giroud. Par la suite, «cette appellation est donnée à l'arrivée de la nouvelle génération de réalisateurs qui veulent donner un autre visage au 7e art français. De 1951 à 1958, la production cinématographique en France a connu une certaine expansion. On produit, pendant cette période, pas moins de 15 films par an. Ce mouvement est perçu comme un véritable phénomène sociologique», a indiqué M. Frodon. En effet, la nouvelle génération de cinéastes a voulu procéder à une certaine rupture épistémologique avec l'ancienne génération qui avait une conception quelque peu archaïque du cinéma. «Avant cette époque, un cinéaste ne peut pas réaliser son propre film avant l'âge de quarante-cinq ans. Néanmoins, avec le débarquement de jeunes réalisateurs, un vrai phénomène de branle-bas s'est opéré dans le paysage cinématographique français». La production cinématographique a connu une véritable promotion. De 1958 à 1965, la moyenne de nombre de films réalisés est de 35 films par an. Paradoxalement, le nombre de spectateurs a soudainement dégringolé passant ainsi de 400.000 à 200.000 spectateurs. L'ancienne génération n'a pas «festoyé» discrètement cette «mascarade». «Les vieux réalisateurs ont même accusé les jeunes de verser dans la médiocrité». Mais ce n'est là qu'une revanche sur des critiques qui ont longtemps tiré à boulets rouges dans les colonnes des Cahiers du cinéma, sur la vieille école. En outre, avec la venue de l'écrivain André Malraux à la tête du ministère de la Culture, en 1958, ces jeunes cinéastes ont trouvé la liberté de créer. Toutes les portes leur ont été ouvertes. C'est là, en fait, la deuxième définition donnée au concept de la nouvelle vague de cinéma français. «C'est un cinéma qui a ses propres caractéristiques», a fait remarquer le directeur de la rédaction des Cahier du cinéma. Quelles sont ces particularités? «Cela réside en la transformation de la manière de réaliser. La nouvelle génération a apporté un nouveau ton à leurs films. Il y a un travail de fond remarquable tant au plan du récit, des personnages que sur l'apport du réalisme et de stylisation donnés à la production», a indiqué le conférencier. Il a estimé, par ailleurs, que cette révolution opérée dans le paysage cinématographique a servi de modèle pour le cinéma du monde entier. Jean Michel Frodon a considéré que même le 7e art en Algérie a été influencé par ce vent de «réformes». Il cite à cet effet, les films réalisés par Merzak Allouache qui ont, dit-il, ce cachet artistique assez particulier, doublé d'une touche de modernisme.