Cassure. Omar était dans un état lamentable. Debout à la barre, inculpé, il avait à ses côtés ses deux garçons (dix et six ans). Catastrophe. Le non-paiement de la pension alimentaire mène à tout, y compris en salle de détention préventive. C'est là tout le malheur de tout père qui «oublie» de régulariser ses enfants à la fin du second mois. La loi offre soixante jours de délai pour la réception du mandat salvateur. Mais pour Omar, c'est une autre histoire, nous écrivions plus haut que ses deux fils étaient debout à ses côtés. Rectifions : ils étaient collés aux manches du papa. Il se fichaient comme de «l'an IV» de cette dame (la juge) qui interrogeait leur papa. Leurs regards n'allaient pas plus loin que les épaules de Omar, brisé, muet, sec, confus, perdu au milieu du jargon de Me Ahmed Tafet, son avocat, de celui de Me Toufik Technik, celui de son ex-épouse, absente de l'audience. D'ailleurs, les deux jeunes conseils ont chacun de son côté déployé de gros efforts pour mener Yamina Guerfi sur le terrain que chaque défenseur désirait y évoluer. La magistrate a été vigilante et mit les points sur les «i». «Maîtres, le tribunal n'a d'yeux et d'oreilles que pour l'inculpation». Clair, net, précis et c'est signé: Guerfi, cette admirable juge qui ne transige pas avec la loi, les us et coutumes de ce tribunal où elle évolue avec une aisance encourageante pour nous faire rappeler que notre justice n'était pas ce que... Enfin, respectons les avis de chacun... sur ce sensible sujet qu'est la justice... Il est vrai que Omar a fait connaissance avec la prison par la grâce du mandat d'arrêt lancé à la faveur d'une condamnation par défaut (un an ferme). Au milieu de tout ce méli-mélo, Me Technik assure que le papa n'a jamais empêché ses enfants de voir leur mère qui réside à cinquante mètres du domicile paternel. «Non, madame, ce sont les enfants qui refusent de suivre la maman. Dramatique, mais c'est la vérité», a-t-il dit, rétorquant à son confrère, Me Tafet, qui a évoqué la non-représentation d'enfants et le non paiement de la pension alimentaire. Encore une fois, la juge refuse ce duel. Elle s'en tient à la seule et unique inculpation. Mihoubi, le procureur, réclame un an ferme. En fin d'audience, Omar est condamné à une peine de prison assortie du sursis, faisant comprendre ainsi aux antagonistes que la justice sait se faire magnanime.