Sa mort silencieuse, pareille aux éclairs de la tourmente boréale, a frappé sans prévenir. Le chanteur Athmane Bali n'est plus. Son corps a été retrouvé sans vie, hier dans l'après-midi, du côté de Djanet. Selon ce qui a été rapporté par la radio El Bahdja, c'est en tentant de traverser un oued, au bord de son 4x4, que les crues l'ont emporté. Ainsi est parti le fils du désert. Athmane Bali, le chantre de la musique tindie s'en va, presque sur la pointe des pieds. Sa mort silencieuse, pareille aux éclairs de la tourmente boréale, a frappé sans prévenir. La nouvelle rapportée par El Bahdja est tombée comme un couperet. Il est difficile de l'admettre. Il est plus difficile encore d'y croire. L'homme à l'éternel sourire, à la voix chaude, au coeur gros comme ça et à l'esprit ouvert et éclairé, n'égaiera plus les salles de spectacles algéroises. Ni celles des autres wilayas du pays. Désormais, sa voix ne retentira plus, ni son luth ne vibrera. En Athmane Bali se cache un homme. Derrière l'homme se trouve un artiste aux vertus multiples et angéliques. Médecin de son état, le défunt soignait les corps et les âmes. Il était -comme la grammaire est impitoyable, pourquoi devrons-nous désormais parler de notre artiste à l'imparfait?- Il était donc proche des siens. Il était cardiologue à l'hôpital de Djanet. Sa notoriété n'a d'égal que sa simplicité. Dans un entretien accordé à L'Expression, il y a de cela quelques mois, Athmane Bali déclarait: «Oui, soigner le corps et soigner l'âme, finalement ce n'est pas si différent que ça. C'est vrai que je change de personnage et de personnalité, quand je suis à l'hôpital et une fois fatigué par l'hôpital, je fais une tournée ou un gala et cela me change. Ce qui me repose en retournant à Djanet, c'est d'aller directement à l'hôpital. C'est étonnant, oui...». Sa renommée a dépassé les frontières algériennes. Ses tournées aux Etats-Unis d'Amérique, au Canada, en Europe ont laissé des souvenirs particuliers dans les esprits de ses spectateurs qui l'ont découvert pour la première fois. Peut-être le travail réalisé avec le saxophoniste français Jean-Marc Padovani atteste, à plus d'un titre, de la notoriété de notre artiste. En effet, Padovani et Athmane Bali, ont réussi, ensemble à faire un métissage entre le tindi et le jazz. Ainsi les deux genres ont fusionné. A travers cette fusion, c'est, en fin de compte, la voix du désert qui a été portée vers les confins du Nord. Ainsi donc, Athmane Bali s'en va, rejoignant le royaume des artistes, des philosophes, des sages et des...fous. Son luth poursuivra sa vie, seul dans son coin. Sa troupe, quant à elle, continuera encore à relever le défi, quoique difficilement. Elle continuera à porter haut la voix de son précurseur. La postérité s'en souviendra. Repose en paix, l'artiste.