L'armée irakienne avance vers les champs pétrolifères de Kirkouk Ultime geste de Baghdad, le PDK a 24 h pour se retirer, avant que l'armée n'engage les hostilités. Dans la région, la fièvre monte alors que le Conseil de sécurité nationale irakien qualifie de «déclaration de guerre» la présence de combattants du PKK turc à Kirkouk. Les troupes se font face aux alentours de Kirkouk, prêtes pour une bataille sans merci, tandis que Baghdad et Erbil, capitale du Kurdistan irakien, se sont accordé hier vingt quatre heures de «réflexion» pour donner une ultime chance au dialogue et éviter ainsi l'effusion de sang au moment où le groupe auto proclamé Etat islamique est pratiquement vaincu. La journée d'hier aura donc vu une rencontre décisive entre le président irakien Fouad Massoum, lui-même kurde et le président auto-reconduit du Kurdistan autonome Massoud Barzani qui ont élargi leur entretien à des responsables de l'Union patriotique du Kurdistan (UPK) dont le chef de l'Etat irakien est membre et ceux du Parti démocratique kurde (PDK) de Barzani. Laissant leurs troupes prêtes à l'affrontement armé, ils ont mis cartes sur table à Doukan, dans la province de Souleimaniyeh, le fief de l'UPK. Enjeu du bras de fer, la riche province de Kirkouk où les éléments du PDK ont largement profité de l'avancée fulgurante de Deash en 2014 pour s'emparer de plusieurs puits de pétrole dont la production faisait le bonheur de l'allié turc! L'objet des tractations serait, à en croire certaines sources bien informées, un projet du président Massoum qui souhaite privilégier le dialogue et la négociation pour éviter le conflit armé. Il convient de souligner que les peshmergas - combattants kurdes-sont répartis entre les deux camps mais que seuls ceux du parti de Barzani sont combattus par l'armée irakienne. Et ce sont eux qui entendent conserver la mainmise sur la région pétrolière de Kirkouk. Ainsi, des milliers de peshmergas des deux camps sont prêts à se livrer bataille, trois semaines après le référendum d'indépendance organisé par Massoud Barzani au grand dam de Baghdad, les kurdes de l'UPK se trouvant aux côtés de l'armée irakienne pour défendre l'intégrité du pays. Les uns et les autres attendent le résultat des négociations en cours, conscients que le répit de vingt quatre heures annoncé hier pourrait n'être que le prélude à une nouvelle guerre dans une région ultra sensible où les intérêts des pays limitrophes sont considérables et conduisent aussi bien Ankara que Téhéran à tenter de peser dans un sens ou dans l'autre. Pour le gouvernement du Premier ministre Haider al Abadi, la mission de l'armée irakienne n'est pas de «porter atteinte aux civils, qu'ils soient kurdes ou autres, mais de faire appliquer la Constitution» qui dispose que «le gouvernement central exerce sa souveraineté sur les zones disputées, dont celle de Kirkouk, de même qu'en matière de commerce extérieur, notamment de production et d'exportation de pétrole». A ce titre, Baghdad exige de reprendre le contrôle de toutes les positions investies depuis 2014 par les peshmergas du PDK, après la débâcle face à Daesh, comprenant aussi bien des bases militaires que des institutions gouvernementales ou des sièges de la sûreté. Faute de quoi, c'est toute la symbolique de l'Etat irakien qui se verrait bafouée et le statut concédé en 1991 à un Kurdistan autonome galvanisé par l'accaparement d'infrastructures sensibles et de champs pétroliers indispensables à l'économie du pays tout entier. Ultime geste de Baghdad, les peshmergas ont de nouveau vingt quatre heures pour opérer leur retrait, faute de quoi les forces irakiennes, gouvernementales et paramilitaires seront contraintes d'ouvrir les hostilités. A Kirkouk même, la fièvre monte d'heure en heure et de nombreux civils ont reçu des armes pour mener «la résistance», le gouverneur de la ville, limogé par Baghdad, clamant que «personne ne pénètrera dans notre ville». Vaine rodomontade, car l'armée a d'autres objectifs que Kirkouk elle-même, puisqu'il s'agit de reprendre dès aujourd'hui «les champs pétroliers, une base militaire et un aéroport» selon les missions assignées par l'état-major. Pour Baghdad, l'enjeu est vital car la crise du pétrole étant, l'Irak a cruellement besoin des 250 000b/j produits par les champs de Kirkouk, Khormala, Havana et Bay Hassan qui assurent 40% de ses revenus. L'attitude ambiguë de Washington qui soutient Erbil et Baghdad en même temps et appelle à la retenue le dispute à l'hostilité affichée de la Turquie et de l'Iran qui ont affirmé qu'ils ne resteront pas les bras croisés devant la menace d'un Kurdistan indépendant.