Le secrétaire général du RND sur les ondes de la Chaine 3 La bataille que doit mener Ouyahia s'annonce certes féroce, mais le camp d'en face n'est pas très «achalandé». Une opposition pâle et dispersée peut-elle effrayer un pareil bulldozer sur les sentiers escarpés de la politique? L'homme capte, fixe les projecteurs de l'actualité et hypnotise, tel un cobra dans un forum de lapins. Sous la casquette de secrétaire général du RND, Ahmed Ouyahia a tout «avoué» hier à notre consoeur Souhila El Hachemi dans le cadre de son émission «L'invité de la rédaction» à la Radio nationale Chaîne 3. Tous les sujets brûlants de l'actualité ont été passés au crible et «L'invité de la rédaction» n'a pas fait dans l'esthétique du verbe, surtout quand il s'agit de défendre le pays. «Si nos voisins s'émeuvent, tant pis pour eux, et tant mieux pour nous», a-t-il remué sur la tempête dans un verre d'eau soulevée par les vérités rappelées par le ministre des Affaires étrangères Abdelkader Messahel au sujet de la drogue marocaine et de son blanchiment d'argent. Ouyahia appuie Messahel et sans réserve. Il lui a même payé la rançon de ses vérités, il y a à peine quelques semaines quand il a «osé» dire au monde que les migrants qui sont «en séjour irrégulier sont source de crime, de drogue et de plusieurs autres fléaux» ajoutant: «On ne dit pas aux autorités: jetez ces migrants à la mer ou au-delà des déserts. Mais le séjour en Algérie doit obéir à des règles. On ne laissera pas le peuple algérien souffrir de l'anarchie.» Et c'est le déchaînement de la meute sur la blogosphère qui a mis du temps pour se calmer. Avec la même verve et les mêmes certitudes, le patron du RND prend rendez-vous avec les experts agitant le spectre d'une inflation galopante: «L'année 2018 va bientôt commencer et nous verrons si l'inflation sera de deux ou trois chiffres, comme l'ont prédit les experts». Il enchaîne sur le financement conventionnel et pointe du doigt «le populisme et la démagogie» de l'opposition. «Nous venons de traverser une période où nous étions en train de connaître l'assèchement total. Le président a pris la décision de débloquer ce qu'on appelle le financement non conventionnel pour permettre la relance et nous allons même aboutir au dégel des projets bloqués.» Aux opposants qui piaffent sur le quai scrutant l'horizon d'où surgira le char de la démocratie qu'ils «sont des affabulateurs incapables de défendre leur position et qui attendent encore les chars pour les ramener au pouvoir». Sonatrach, Chakib Khelil? Ouyahia ne sourcille pas: «Maintenant, il y a eu des explosions de pétards qui avec le temps se sont révélées être des injustices. Ce que Sonatrach a vécu, je l'ai dit et je le redis, beaucoup d'injustices ont été commises. Ce qui a été fait contre Chakib Khelil, beaucoup d'injustice, je parle de ces cas qui font l'actualité contemporaine et il y a des cas dans le passé également», a-t-il déclaré. Il ne faut point s'étonner que cette sortie de Ahmed Ouyahia va accaparer le débat politique dans les jours à venir. La bataille que doit mener Ouyahia s'annonce certes féroce, mais le camp d'en face n'est pas très «achalandé». Une opposition pâle et dispersée peut-elle effrayer un pareil bulldozer sur les sentiers escarpés de la politique? C'est au niveau de sa famille qu'il faut s'attendre à la virulence des réactions. Il anticipe et prend le soin de calmer son camp: «Nous ne sommes pas en compétition avec le FLN car au final nous sommes un quarteron de partis qui soutiennent le programme présidentiel, notre souci politique est de faire gagner la majorité présidentielle et notre souci partisan est d'améliorer notre score électoral.» A ces déclarations faites du côté du boulevard des Martyrs, un écho est venu des hauteurs de Hydra à Alger. Présidant une réunion du bureau politique au siège de son parti, le secrétaire général du FLN Djamel Ould Abbès n'a pas lui aussi sourcillé. Il a la certitude chevillée que le futur président de la République «sera issu du FLN». Et voilà grande ouverte la porte pour un autre débat, une autre polémique. Prudent à l'excès sur ce rendez-vous électoral de 2019, Ouyahia préfère concentrer les énergies de son parti sur les élections locales. Il se fait un malin plaisir de nous annoncer qu'«au RND qui compte 25.000 militantes, cinq listes APC seront pilotées par des femmes». Qui a dit que Ouyahia est misogyne? Planté au coeur de la vie politique nationale depuis 22 ans, Ahmed Ouyahia n'est pas un militant saisonnier. Dans cette discipline, la politique, qui se pratique généralement en col blanc et où tous les coups sont permis, le secrétaire général du RND s'affirme comme un redoutable sprinter. Infatigable, insubmersible et inoxydable. Il a toutes les qualités de ce qu'on appelle en période de crise, l'homme de la situation et tant pis si cette même situation n'est pas reluisante.