Une situation qui a amené les observateurs à s'interroger sur cette «démocratie à l'algérienne». Les différents amendements introduits dans la prochaine loi de finances complémentaire contiennent leur lot de charge politique. Outre le fait de sa promulgation par ordonnance, le texte revient sur l'un des amendements qui a fait couler beaucoup d'encre, mais surtout qui a donné l'opportunité à un parti minoritaire au Parlement de montrer sa «capacité de nuisance», malgré une présence modeste dans l'hémicycle. En effet, l'opinion se rappellera sans doute la proposition d'amendement proposé par le parti El-Islah de Abdallah Djaballah sur l'interdiction d'importation de boissons alcoolisées. Faite avec une évidente arrière-pensée politicienne, cette disposition a été, contre toute attente, soutenue par l'ensemble des parlementaires. Faut-il souligner que les débats sur la loi des finances ont eu lieu en plein mois sacré de Ramadan et, de fait, l'élément religieux a fortement pesé dans la décision des députés de suivre la logique d'El-Islah. A travers une instrumentalisation d'un fait religieux, le parti a réalisé son «coup politique» d'envergure. Plus encore, «le travail» d'El-Islah a donné du fil à retordre aux négociateurs algériens engagés dans les pourparlers avec l'OMC. L'amendement voté par l'APN était, faut-il le rappeler, en contradiction avec les engagements internationaux de l'Algérie. Une situation qui a amené les observateurs à s'interroger sur cette «démocratie à l'algérienne» où un parti d'opposition réussit le tour de main de convaincre ses adversaires à le suivre sur un point qui, en plus de son caractère antinomique avec les engagements de l'Etat vis-à-vis de l'étranger, contient une charge idéologique certaine. En fait, les élus du FLN, du RND et du MSP, dont les partis sont largement représentés au gouvernement, ont voté des amendements qui ont tôt fait de mettre l'Exécutif dans l'embarras. Pis encore, leur propre embarras a témoigné de la fragilité idéologique de l'assise politique nationale. L'autre enseignement à retenir du «chahut» qui a régné lors des débats sur la loi de finances 2005 était la forte propension de nos députés à faire dans le populisme, notamment sur la question de l'importation des vieux véhicules. A l'origine d'un courant de fraude, en sus de leur responsabilité dans le phénomène des accidents de la circulation, les voitures de moins de trois ans importées essentiellement de France, ont eu, pour la énième fois, les faveurs des parlementaires, contre toute logique commerciale. Pour justifier la reconduction de ladite mesure, les élus de la nation ont invoqué le sacro-saint droit des anciens moudjahidine de continuer à bénéficier de ce genre de privilège. Or, tout le monde sait que sur cette «juteuse affaire», les moudjahidine ne prenne que des miettes. Ainsi, les députés des deux chambres du Parlement ont commis deux erreurs. Si la seconde relève du traditionnel esprit rentier, la première, par contre, a ouvert la voie à de multiples interrogations sur la maturité politique des représentants du peuple. Il est clair, en effet, que la majorité de la composante de l'APN a manqué de courage politique. Ce ne serait pas mentir que de dire qu'ils ont tout simplement rejeté la balle à l'Exécutif. Le message semble avoir été bien reçu par le chef de l'Etat qui, à l'occasion de la loi de finances complémentaire, réintroduit les dispositions amendées par les députés. A ce propos, il faut convenir qu'en matière de courage politique, le président de la République donne, là, une belle leçon aux élus du peuple.