La RASD est représentée par le président Brahim Ghali (au premier plan), et présente au sommet UA-UE en dépit des intrigues de Rabat et de Paris Face à 800 étudiants burkinabais très méfiants, Emmanuel Macron a fait abstraction des critiques qui ont salué son arrivée, plaidant pour une frappe «des passeurs qui exploitent les migrants en Libye» et dénonçant les «crimes incontestables» de la colonisation européenne. Quarante-huit heures avant l'ouverture du Sommet Union africaine - Union européenne à Abidjan (Côte d'Ivoire), le président français Emmanuel Macron qui effectue une tournée dans la région avant de participer à la rencontre est arrivé à Ouagadougou, au Burkina Faso, dans des conditions peu propices. D'abord, il y eut cet attentat à la grenade contre des soldats français pour «saluer» cette première tournée en Afrique destinée, dit-on, à initier une «nouvelle étape» dans les relations entre Paris et certains pays du continent. Au cours de cette visite de trois jours qui devait le conduire également en Côte d'Ivoire et au Ghana, Emmanuel Macron entendait s'adresser à une jeunesse africaine qui n'hésite plus à manifester sa frustration et sa colère contre l'ancien colonisateur, dans un contexte global de menace terroriste et de migration explosive. Outre les troupes françaises présentes sur le sol de plusieurs pays du Sahel, il y a cette volonté de l'Union européenne d'imposer aux Etats africains concernés le contrôle des flux migratoires qu'ils doivent endiguer. Ouagadougou qui accueille depuis l'indépendance des forces spéciales françaises a subi plusieurs attentats, comme en janvier 2016 (30 morts), en août dernier (19 morts) et fait face à des raids récurrents de groupes terroristes en provenance du Mali voisin. L'épisode de la grenade a évidemment pesé lourdement sur l'ambiance générale de la visite du président Macron qui avait au programme, hier, un «grand oral africain» devant 800 étudiants de l'université locale. Ce voyage constitue «une nouvelle étape de notre relation avec votre pays et tout un continent», a-t-il déclaré à la presse en ajoutant que «le Burkina est l'emblème de l'aspiration démocratique de la jeunesse africaine». Face aux 800 étudiants burkinabais représentant une jeunesse devenue très méfiante à l'égard du «message» français, Emmanuel Macron a fait abstraction de la salve de critiques qui a accueilli son arrivée, préférant mettre l'accent sur sa volonté de «frapper les passeurs qui exploitent les migrants en Libye» et de dénoncer les «crimes incontestables» de la colonisation européenne, même s'il y a eu, aussi, «des grandes choses et des histoires heureuses» dans ce passé. Dans ce même registre, il a annoncé qu'il allait «proposer une initiative euro-africaine» pour «frapper les organisations criminelles et les réseaux de passeurs» qui exploitent les migrants subsahariens en Libye ainsi que le «soutien massif à l'évacuation des personnes en danger» en Libye, où le trafic de migrants comme esclaves est un «crime contre l'humanité». Autant de «gestes» qui paraissent insuffisants à lever le malentendu entre une France qui, depuis des décennies, soutient résolument des dictateurs au service de la Françafrique, abstraction faite du dérapage du président français au G20 quand il qualifiait d'impossible le développement d'un continent où il y a «7 ou 8 enfants par femme»! L'étape ghanéenne suffira-t-elle à traduire dans les faits sa prétention à saisir la réalité africaine dans toute sa dimension continentale? C'est à voir. A Abidjan où s'ouvre aujourd'hui le 5e Sommet UA-UE depuis le rendez-vous inaugural du Caire, en 2000, la présence des 55 pays membres de l'organisation dont la RASD est vécue comme un événement exceptionnel, malgré les intrigues que nouent le Maroc et ses partisans. Le ministre des Affaires étrangères Abdelkader Messahel va multiplier, comme à son habitude, les rencontres bilatérales et, hier déjà, il s'est entretenu avec son homologue allemand, M. Sigmar Gabriel, en marge de sa participation à la réunion ministérielle du Sommet dont l'ouverture officielle aura lieu en présence du Premier ministre, Ahmed Ouyahia, représentant spécial du président de la République.