La ministre de l'Education La décision que prendront les représentants syndicaux va engager l'avenir de plus de 19.000 enseignants. Ces derniers risquent dès demain la radiation définitive de la Fonction publique. Et il ne s'agit nullement de représailles décidées ni d'entraves aux libertés syndicales. Une ligne rouge. Celle que va franchir ou non, aujourd'hui, le Conseil national autonome du personnel enseignant du secteur ternaire de l'éducation (Cnapeste). L'issue de la rencontre d'aujourd'hui va marquer un tournant décisif dans le bras de fer qui l'oppose à la ministre de l'Education, Nouria Benghebrit. Le syndicat, dont la grève a atteint le pourrissement, va tenir son conseil national pour se prononcer sur la poursuite ou non de son mouvement de protestation national qui dure depuis plus de trois mois et demi, dans au moins trois wilayas, à savoir Blida, Tizi Ouzou et Béjaïa. La décision que prendront les représentants syndicaux va engager l'avenir de plus de 19.000 enseignants. Ces derniers risquent dès demain la radiation définitive de la Fonction publique. Et il ne s'agit nullement de représailles décidées par la tutelle ni d'entraves aux libertés syndicales. Le fait est que le Cnapeste n'a pas respecté les règles du «jeu». De l'avis de tous les experts, des procédures administratives et même du ministère du Travail qui est le premier garant de la liberté syndicale et du droit d'exercice de grève, le Cnapeste a transgressé la loi. En effet, outre le fait que la grève illimitée ne figure nullement dans les textes de la loi, il y a les procédures préliminaires à suivre, avant le lancement de tout mouvement de protestation. Le syndicat se devait de respecter ces procédures légales avant donc, de recourir à la grève. Des procédures clairement mentionnées dans la loi 90/02 relative au règlement des conflits du travail. Il s'agit en premier de la tenue de réunions périodiques avec l'autorité compétente. De recourir, en cas d'échec, aux procédures conventionnelles internes et de solliciter, en troisième lieu, la médiation de l'inspection du travail. Ce n'est qu'une fois toutes ces voies épuisées, qu'un syndicat est en droit de déposer un préavis de grève, tout en restant disposé à négocier. Le syndicat est, cependant et dans tous les cas, dans l'obligation de se conformer à une décision de justice, car la décision de justice, faut-il le rappeler, est rendue au nom du peuple algérien. Or, et dans le cas de la grève du Cnapeste, la justice a rendu au moins quatre décisions qualifiant la grève d'illégale et ordonnant la reprise du travail. Le syndicat, dans une logique du jusu'au-boutisme, a opté délibérément de transgresser une décision de justice ainsi que les lois de la République, pensant pouvoir faire abdiquer la ministre de l'Education. Cette dernière dont la démarche s'inscrit dans la légalité, a engagé des procédures d'abandon de postes pour les enseignants des wilayas de Blida et Béjaïa. Elle a envoyé une première mise en demeure demandant aux grévistes de justifier l'abandon de poste, suivie d'une deuxième mise en demeure, comme le prévoit la procédure au niveau de la Fonction publique. Elle a procédé ensuite et légalement à la prise de décision de licenciement sans préavis ni indemnités. Plus de 500 licenciements ont ainsi été envoyés par le ministère de l'Education. Des dizaines de milliers d'autres risquent également d'être envoyés dès demain pour près de 19.000 enseignants grévistes affiliés au Cnapeste. Pour le ministère, qui n'a jamais fermé les portes du dialogue, il ne s'agit nullement d'un coup de force visant à briser la grève des enseignants, encore moins à empêcher ces derniers de jouir librement de leurs libertés syndicales et leur droit à la grève, mais juste d'un respect des lois et des procédures de la République. Le Cnapeste, qui aurait pu appliquer la décision de la justice, tout en poursuivant son combat pour faire aboutir ses revendications, met ainsi l'avenir professionnel de milliers de travailleurs en péril. Certes, les enseignants radiés ont le droit de recours dans les délais réglementaires prévus par les statuts de la Fonction publique et ils peuvent également déposer une demande de réintégration au niveau des tribunaux administratifs, il n'empêche que ces derniers, qui ont placé leur totale confiance dans leur syndicat, ont été quelque part leurrés. Car, il est à se demander si ces derniers auraient poursuivi leur mouvement de grève, s'ils savaient franchement que la loi les obligeait à reprendre le travail au risque d'être radiés? Le Cnapeste porte donc entièrement la responsabilité de la radiation des milliers de fonctionnaires de l'éducation. Il porte également la responsabilité de la mise en péril de l'année scolaire. Des milliers d'élèves sont privés de scolarité depuis plus de trois mois et l'année blanche n'est plus un spectre, mais une réalité palpable. En fait, la ligne rouge est fixée pour demain. Mme Nouria Benghebrit qui a assuré que l'année scolaire sera sauvée à Blida, Tizi Ouzou et Béjaïa, n'a plus de temps à offrir au syndicat pour décider d'entamer ou pas les négociations. Elle doit agir rapidement pour sauver l'avenir des enfants, prenant les mesures nécessaires permettant d'assurer les enseignements. Et dans cette démarche, elle n'est pas seule. Elle est appuyée par les parents d'élèves qui, faut-il le rappeler, ont déposé plainte à l'échelon local contre le bureau du Cnapeste. La ministre de l'Education est également appuyée par le citoyen lambda qui reconnaît évidemment que la grève est un droit constitutionnel, mais refuse son caractère illimitée qui prend en otage l'élève dont l'avenir ne peut, en aucun cas, être mis en balance avec l'ensemble des résultats positifs que peuvent récolter les enseignants.