Zarif va tenter d'obtenir les garanties exigées par les conservateurs iraniens Le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo a affirmé, hier, qu'il comptait «travailler dur avec les Européens» afin de parvenir à un nouvel accord pour contrer «le comportement néfaste» de Téhéran. «Le retrait (de l'accord) ne visait pas les Européens», a-t-il déclaré sur la chaîne Fox. «Le président Trump m'a chargé de trouver un accord qui atteigne l'objectif de protéger l'Amérique. C'est ce que nous allons faire et je vais travailler dur là-dessus avec les Européens dans les prochains jours», a encore affirmé le secrétaire d'Etat, en poste depuis deux semaines, en vue de «calmer» la grogne des pays européens. Le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif, quant à lui, a dit espérer que sa tournée entamée hier à Pékin «permettra de construire un cadre futur clair pour l'accord» nucléaire, après le retrait des Etats-Unis du texte. «Nous espérons qu'avec cette visite en Chine et dans d'autres pays, nous serons capables de construire un cadre futur clair pour l'accord exhaustif» conclu en 2015 sur le nucléaire iranien, a déclaré M. Javad Zarif lors d'une rencontre à Pékin avec son homologue chinois Wang Yi. La tournée du chef de la diplomatie iranienne qui verra sa rencontre notamment avec ses homologues des pays restés dans l'accord (France, Allemagne, Grande-Bretagne), veut sauver l'accord nucléaire et préserver les intérêts économiques de son pays, après la sortie mardi, des Etats-Unis de cet accord historique. Vendredi, M. Zarif a tweeté un communiqué du gouvernement iranien condamnant «l'administration extrémiste» du président américain Donald Trump pour avoir abandonné «un accord reconnu comme une victoire de la diplomatie par la communauté internationale». Il a réaffirmé que l'Iran se préparait à reprendre «l'enrichissement industriel» d'uranium «sans aucune restriction», à moins que l'Europe ne fournisse de solides garanties de maintien des relations commerciales avec l'Iran, malgré les sanctions américaines. La chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, a convoqué, pour demain à Bruxelles, une réunion entre les ministres des Affaires étrangères des trois pays européens historiquement à l'origine de la négociation au sujet de l'accord sur le nucléaire iranien dénoncé par le président américain, Donald Trump. Déterminée à préserver l'accord conclu en 2015 après de longues et âpres négociations, l'UE tente de convaincre les Iraniens de la nécessité de rester dans l'accord après le retrait des Etats-Unis. «Ne laissez personne démanteler cet accord» qualifié de «l'une des plus belles réussites jamais réalisées de la diplomatie», a conjuré Mme Mogherini mardi dernier, les Iraniens lors d'une déclaration au siège de la représentation de la Commission européenne à Rome. Pour rappel, dès l'annonce du retrait américain de l'accord sur le nucléaire iranien, les trois pays: Allemagne, France et Royaume-Uni ont réaffirmé leur attachement à la mise en oeuvre de l'accord. La Chine et la Russie, également signataires de l'accord, ont réitéré leur soutien à la sauvegarde de l'accord. Les Européens ont multiplié, ces derniers jours, les consultations pour tenter de trouver une «approche commune» face au rétablissement des sanctions américaines contre Téhéran. Ils veulent faire bloc contre la décision américaine d'appliquer des sanctions aux entreprises étrangères présentes en Iran, ou du moins, obtenir des exemptions. L'accord de long terme conclu le 14 juillet 2015 sur le dossier nucléaire iranien permet un encadrement des activités nucléaires iraniennes en contrepartie d'une levée progressive du régime de sanctions qui visent l'Iran. Alors que le chef de la diplomatie iranienne poursuit sa tournée en Chine, Russie et en Europe pour sauver l'accord nucléaire abandonné avec fracas par les Etats-Unis, des responsables conservateurs ont multiplié les critiques contre le gouvernement. «Dans la situation actuelle, rester dans l'accord nucléaire sans obtenir des garanties claires (de la part de l'Europe) n'assure certainement pas les intérêts nationaux du pays», écrit dans un communiqué le religieux conservateur l'ayatollah Ahmad Janati. Ce dernier préside l'Assemblée des experts, chargée de nommer ou de démettre le guide suprême. M. Janati a aussi demandé au président Hassan Rohani, artisan de l'accord nucléaire, de «présenter des excuses au peuple iranien pour les dégâts causés dans le cadre de l'accord nucléaire» au pays. Le chef des Gardiens de la révolution, l'armée d'élite du régime iranien, le général Mohammad Ali Jafari, a également critiqué certains «responsables» qu'il n'a pas désignés qui ont, selon lui, les yeux tournés vers l'Occident. «Nous avons des capacités importantes dans le pays (...) mais certains responsables ne tiennent pas compte de ces capacités et ont le regard tourné vers l'extérieur», a déclaré M. Jafari. Il a ajouté qu'après la sortie des Etats-Unis de l'accord nucléaire, les responsables cesseront «de faire confiance à l'Occident et aux Européens». «Les Européens ont répété à de nombreuses reprises qu'ils ne pourront pas résister face aux sanctions américaines», a-t-il ajouté. Enfin, le Parlement iranien prépare un texte pour exiger du «gouvernement d'obtenir de la part des Européens des garanties nécessaires», sans lesquelles il pourra reprendre l'enrichissement d'uranium à un niveau plus élevé, selon le site officiel du Majlis. L'Iran a accepté de limiter son programme nucléaire dans le cadre de l'accord de 2015 en contrepartie de la levée partielle des sanctions internationales.