En exil, l'amour du pays est à fleur de peau. Profitant de son passage en Belgique dans le cadre de sa tournée en Europe pour expliquer à nos compatriotes le projet de charte pour la paix et la réconciliation nationale, M.Abdelkader Messahel, ministre de la Coopération et des Affaires maghrébines, n'a pas hésité à inclure dans son timing surchargé une visite chez une famille algérienne à Mons (Belgique). Une visite qui a eu lieu après le meeting tenu la veille par le ministre à Bruxelles. C'est à la mi-journée que M.Messahel et la délégation qui l'accompagnait sont arrivés au domicile des Ben Adis. L'accueil fut très chaleureux et la nombreuse famille, avec en tête le patriarche Hadj Mohamed, âgé de 86 ans, a tenu à faire part de sa joie et de sa fierté de recevoir un ministre de la République. Après les présentations d'usage, Si Hadj Mohamed a rappelé les conditions dans lesquelles il avait quitté le pays pour l'Europe. «C'était en 1946, j'ai atterri d'abord à Marseille en France. C'était l'époque d'une grande animation du mouvement national dirigé par Messali Hadj....» a précisé Si hadj avant de narrer quelques souvenirs de la lutte naissante qu'il a vécue avec d'autres compatriotes. Et puis, d'étapes en étapes, il s'est définitivement fixé à Mons en Belgique. Aujourd'hui il est le plus ancien Algérien résidant dans la région. Sa réussite, ce sont tous ses enfants (5) et ses petits-enfants réunis autour de lui et qui gardent contre vents et marées leur identité algérienne intacte. D'ailleurs l'intérieur de sa grande maison le prouve. Le vaste salon où est reçue la délégation officielle fait oublier que l'on est en Europe. Banquettes tout le long des murs sont parsemées de coussins chatoyants. Tapis et reliques, ramenés des pèlerinages effectués par Si hadj à La Mecque, ornent les murs. Un vrai salon bien de chez nous . M.Messahel explique au patriarche et à ses enfants le sens de sa mission en Europe et donne des éclaircissements sur le contenu du projet de charte. C'est l'occasion que saisit le vieux Ben Adis pour donner son avis sur le projet de charte soumis actuellement par le président de la République. «Nous nous sommes sacrifiés pour arracher l'indépendance de notre pays. Beaucoup d'entre nous en sont morts, d'autres blessés. Et puis qu'avons-nous vu après l'indépendance? Peu de choses en réalité par rapport à nos aspirations de vivre dans un grand pays aux multiples potentialités. Mais surtout cette longue période où durant plus de 10 ans les Algériens se sont entretués. Je ne peux trouver les mots pour vous décrire ma souffrance et mon abattement durant tout ce temps-là. Et voilà qu'enfin le Président Bouteflika prend l'initiative de nous réconcilier entre nous. Que Dieu le bénisse pour son courage et sa clairvoyance. Personne avant lui n'a pu faire ce qu'il a fait. Alors qu'on ne pouvait pas circuler sur les routes dans notre pays, aujourd'hui nous le faisons en toute sécurité.» (au passage il évoque une image qu'il a retenue à la télévision lors du sommet de l'ONU où le Président Bush donne l'accolade à notre Président pour dire qu'il a bien réussi à introduire l'Algérie dans la cour des grands.) Avant de conclure, Si hadj Ben Adis récite une «fatiha» et lève les mains (suivi de tous) pour implorer Dieu d'aider à la réconciliation des Algériens. Il faut dire que la vie de famille de Si hadj est exemplaire à tel point que le maire de la ville belge lui a remis la distinction du mérite pour ses 60 ans de mariage avec El hadja qui nous a rejoint au salon. Son souhait à elle est «d'avoir un jour l'honneur de recevoir chez elle le Président Bouteflika». M.Messahel lui promet de transmettre son souhait au chef de l'Etat. Après avoir été convié à partager le déjeuner, M.Messahel, suivi de la délégation, prend congé sous de stridents youyous. Moment plein d'intensité. En exil, l'amour du pays est à fleur de peau. Une odeur, des couleurs, tout suffit à rappeler la terre natale. Alors que dire quand des compatriotes viennent du pays? Tout simplement indescriptible tant c'est fort.