«Les défis qui attendent l'Algérie sont gigantesques.» Les banques suisses, qui recèlent les plus grandes fortunes de ce monde, soit un tiers de l'épargne, sont tout indiquées pour faire profiter de leur expérience l'Algérie. A cet effet, une rencontre a été organisée hier au ministère des Finances par la Chambre de commerce et d'industrie Suisse-Algérie (Ccisa). Des invités de marque ont assisté, hier, à la rencontre, à l'image de M.Mirabaud Pierre, président de l'Association suisse des banquiers. Au cours d'une longue communication, ce dernier n'a pas tari d'éloges à l'égard du système financier helvétique et des 338 banques actives dans les métiers de la banque et de la finance, dont 40%, dira-t-il, sont des filiales ou des succursales de banques étrangères. M.Pierre Mirabaud, à la tête de l'association suisse des banquiers depuis deux années, soutiendra que cette «suprématie» des banques suisses ne peut être conservée qu'en la développant et en l' améliorant par l'instauration d'une éducation et une formation continue pour faire face à la concurrence imposée. «Disposer d'un personnel hautement qualifié, et cela à tous les niveaux de la hiérarchie, est une exigence incontournable pour nos établissements, si nous voulons que notre place financière demeure la référence», dira M.Mirabaud. A cet effet, la Chambre de commerce et d'industrie Suisse-Algérie (Ccisa) a présenté hier des propositions pour une formation globale (bancaire et financière) au profit des Algériens. La formation en question s'articule en trois volets : une formation professionnelle de base d'employés de banques de type duale s'inspirant du système d'apprentissage suisse. Selon cette approche, les collaborateurs de divers établissements fi-nanciers et bancaires exercent leurs futurs métiers au sein de leur société et, en parallèle, acquièrent des connaissances théoriques par le biais d'une école professionnelle créée à cet effet. La formation est étalée sur quatre ans. Durant cette formation, les collaborateurs seront immédiatement confrontés à l'exercice pratique de leur métier en contribuant au travail de leur établissement. Le deuxième volet, c'est la formation des cadres en accord avec les standards internationaux et calqués sur ceux appliqués en Suisse, tant pour les analystes et experts financiers que les spécialistes, et cela complété par certains modules en liaison avec la Swiss Banking School, voire avec le système bancaire français. Enfin, le troisième volet de la formation, proposée hier au ministère des Finances, consiste en une formation ad hoc pour les cadres supérieurs du système financier algérien conçue sur mesure. Il s'agit de préparer très rapidement les formateurs algériens qui devraient assez vite assumer eux-mêmes la dispense de la formation professionnelle et dans le même sillage, préparer les collaborateurs de chacun des établissements chargés de suivre les employés en formation. Partant du constat que les besoins sont considérables en matière de formation aux métiers de banque et du cycle de formation de quatre ans nécessaires à la profession d'employés de banque, les spécialistes suisses ont proposé, hier, d'envisager une phase transitoire. Il s'agit de former sur une période courte des caissiers, des collaborateurs de back-office, des employés des crédits, etc. Cette formation, explique-t-on, devrait être en accord avec le programme professionnel envisagé pour chacune des spécialisations sectorielles. Ainsi, en fonction des objectifs fixés dans le plan gouvernemental quant à l'expansion du secteur bancaire algérien, l'on prévoit que 6 à 10.000 collaborateurs seront formés de manière transitoire, en attendant l'arrivée des employés de banque ayant bénéficié du nouveau type de formation. D'après Alain L. Deriaz, coordinateur du projet Ccisa, afin de faciliter une large adhésion des collaborateurs à ce plan de formation, un certain nombre d'entre eux assumerait, moyennant préparation adéquate, un rôle de formateur à plein temps. Par ailleurs, M.Mirabaud dira que la Suisse, qui n'est pas entrée dans l'Union européenne, ne constitue nullement un paradoxe étant donné que la Suisse est au coeur de l'Europe. D'après lui, cette «singularité» de la Suisse vis-à-vis de l'Europe peut aussi constituer une force et un atout. Le président de l'Association suisse des banquiers affirmera que c'est en préservant cette autonomie que son pays parviendra à transformer en atout le handicap de la non-appartenance à l'UE. Enfin, M.Pierre Mirabaud, qui souligne avec son accent helvétique que les défis qui attendent l'Algérie sont gigantesques, conclut par citer le célèbre Montesquieu qui disait dans «De l'esprit des lois»: «Quand il n'est pas nécessaire de faire une loi, il est nécessaire de ne pas en faire.» D'après lui, moins légiférer oblige aussi à mieux légiférer. Le message est reçu cinq sur cinq.