Les médias français quelle que soit leur obédience se sont contentés, à des exceptions près, de relayer la version officielle des faits. Les émeutes, qui ont secoué quatorze jours durant les banlieues françaises, ne sont pas le fait d'une «racaille» de «marginaux» et encore moins de délinquants qui échappent à toute tutelle parentale. C'est l'aboutissement logique - et c'est l'aveu même des officiels français - de l'échec des politiques d'intégration, depuis l'indépendance, de générations entières d'immigrés. Les propos gravissimes lâchés par Nicolas Sarkozy rappellent étrangement ceux tenus par un certain François Mitterrand à l'encontre des moudjahidine le 1er novembre 1954, en les qualifiant de «coupeurs de routes». Cette fois, les «insurgés» d'Ivry, de Saint-Denis et de Clichy-sous- bois, pour ne citer que ces quartiers chauds, ont dressé des barricades parce qu'ils sont traités comme des sous-citoyens, face auxquels ont n'a pas hésité à exhumer une loi du 3 avril 1955. Les scènes de lynchage, diffusées ces derniers jours par toutes les chaînes de télévision du monde, suffisent pour illustrer l'esprit revanchard de l'appareil répressif colonial. Des scènes qui rappellent la répression sanglante des manifestations du 17 octobre 1961. Lesquels manifestants venaient aussi des ghettos de la banlieue parisienne. Il est donc clair que la mise en oeuvre de la loi de 1955 est une provocation qui vient encore une fois témoigner de l'esprit colonial encore vivace. Tout comme durant la colonisation les médias français, quelle que soit leur obédience, se sont contentés à des exceptions près de relayer la version officielle des faits. Plus grave encore, le ministre français de l´Intérieur a instruit les préfets, d'engager des procédures d'expulsion de tous les jeunes impliqués dans les derniers événements. Ce qui ne manquera pas d'exacerber encore davantage la tension dans les banlieues. La tristement célèbre expression du leader du Front national, Jean-Marie le Pen, «nous aimons les Arabes chez eux», est donc mise à exécution par UMP interposée, qui apparemment fait les yeux doux à l'extrême droite, en prévision de la présidentielle de 2007. En effet, de l'extrême gauche à l'extrême droite le débat de fond est éludé ; celui de l'égalité des chances entre les Français de souche et leurs compatriotes d'origine immigrée. Ces derniers parqués dans des quartiers dits «difficiles» ressemblant aux favelas de Rio, ne sont sollicités que lors des joutes électorales. Par ailleurs les dernières émeutes font l'objet de moult tentatives de récupération de la part de la gauche française. La formation de François Hollande, après neuf mois d'hibernation, et mettant à profit la fronde des banlieues, a déposé mercredi dernier sur le bureau de l'Assemblée française une proposition de loi visant à la suppression de l'article quatre de la loi du 23 février 2004, glorifiant la colonisation française. Une loi qui a mis en stand-by le traité d'amitié entre Alger et Paris, devant être signé avant la fin de l'année en cours. Même si des sources sûres évoquent une éventuelle visite du chef de l'Etat français en Algérie à la fin novembre. Une occasion que l'hôte de l'Algérie mettrait à profit pour épurer la dette de son pays envers le peuple algérien.