Un journal marocain cite les révélations d'un agent de la DST marocaine qui vient de quitter son service. La violation des droits de l'homme au Maroc connaît chaque jour un nouveau scandale. L'assassinat, la semaine dernière du jeune Sahraoui Lembarki Hamdi Mahjoub est l'une des facettes tragiques des pratiques barbares du système du makhzen. Par ailleurs, après l'épisode des 50 cadavres d'opposants exécutés à l'époque du roi Hassan II, découverts il y a quelques jours dans le sud du Maroc, la disparition non encore élucidée de dizaines d'immigrants clandestins, cette fois c'est la sous-traitance de la torture avec la CIA qui vient d'être révélée. En effet, un hebdomadaire marocain a affirmé, hier que son pays a participé directement au programme de sous-traitance de la torture initié par la CIA et que des appareils affrétés par l´agence américaine ont effectué au moins dix déplacements au Maroc de décembre 2002 à février 2005. Le Maroc fait-il partie des pays dans lesquels les Etats-Unis possèdent des lieux de détention secrets? Tout porte à le croire, d'autant plus que Le journal hebdomadaire donne des informations vérifiables sur ce nouveau scandale. Le journal cite les révélations d'un agent de la DST marocaine qui vient de quitter son service, et qui affirme avoir assisté à une opération de transfert de détenus à la base aérienne de Salé, ville jumelle de Rabat. «Un Boeing 737, de couleur blanche et immatriculé N313P, a atterri (...) en janvier 2004 à la base aérienne de Salé. On a débarqué quatre hommes menottés, les yeux bandés et escortés de 8 hommes en civil, vraisemblablement de la CIA. Ils ont rapidement emprunté des Renault Express blanches qui les attendaient pour une direction qui m´est inconnue». Des informations accablantes que ne pourrait détenir qu'un agent au fait des secrets du royaume. Ce n'est pas le seul témoignage, puisque le magazine cite une «autre source» qui affirme avoir vu la même chose l´été 2002 sur cette base de Salé. «Il faisait nuit et je ne pouvais pas lire son immatriculation mais je peux vous confirmer que c´est un Boeing 737 blanc». Et au témoin de poursuivre: «J´ai vu une dizaine d´hommes vêtus de costards sombres qui parlaient anglais en train d´y embarquer six personnes cagoulées et menottées. Au bout de 20 minutes, l´avion a décollé», a-t-il ajouté, selon le journal. Selon toujours Le Journal hebdomadaire, un Gulfstream V a fait pour sa part au moins dix déplacements au Maroc de décembre 2002 à février 2005. Il affirme que «les suspects étaient interrogés par des agents de la DST réputés pratiquer des interrogatoires très musclés». Il cite à ce propos le témoignage recueilli par Amnesty en septembre d´un Britannique d´origine éthiopienne Benyam Mohammed Al Habashi, soupçonné d´appartenir à Al Qaîda, qui affirme "avoir été détenu et torturé" au Maroc pendant 18 mois, après avoir été arrêté le 10 avril 2002 par la police pakistanaise à Karachi où il avait d´abord été interrogé durant trois mois par des agents américains et britanniques. La révélations faisant état de l'existence de prisons secrètes américaines dans certains pays de l'Europe de l'Est, vient conforter l'idée de l'existence de centres de torture au Maroc. Il est clair qu'après les arrestations massives dans les milieux islamistes marocains après les attentats de Casablanca, les tortionnaires ont du pain sur la planche. Il y a lieu de rappeler qu'en début novembre, le Washington Post avait affirmé que la CIA aurait envoyé plus de 100 suspects dans un réseau secret de prisons, créé après les attentats du 11 septembre 2001 en raison du caractère illégal de ces détentions aux Etats-Unis. Environ 30 prisonniers, considérés comme des figures importantes du terrorisme, sont dans des centres financés et gérés directement par du personnel de la CIA. Deux sites de ce type, en Thaïlande et à Guantanamo Bay (Cuba), ont été fermés ne 2003 et 2004, selon le quotidien. Plus de 70 autres suspects, jugés moins importants, ont été confiés à d´autres services de renseignements, notamment en Egypte, en Jordanie, au Maroc et en Afghanistan.