Une mobilisation qui ne faiblit pas Les autorités s'attendaient à une mobilisation «plus forte» et «plus radicale» hier et ont prévu un fort dispositif sécuritaire, en déployant 80.000 policiers et gendarmes à travers la France, et près de 5000 à Paris. A trois jours du grand débat lancé par Emmanuel Macron pour tenter d'apaiser la colère des «gilets jaunes», plusieurs milliers de personnes ont défilé samedi en France, près de deux mois après le début de la contestation, régulièrement émaillée de violences. Partis du ministère de l'économie et des finances, situé dans l'est parisien, plusieurs milliers de «gilets jaunes» se sont rassemblés à la mi-journée sur la place de la Bastille où des drapeaux français flottaient au dessus de la foule. Les manifestants criaient «Macron démission», sifflant ou tapant sur des barrières de chantier. Les autorités ont dit ces derniers jours craindre des violences et ont tenté de dissuader les participants à ce neuvième samedi de manifestations, symptômes de la plus grave crise traversée par le gouvernement d'Emmanuel Macron depuis son accession au pouvoir en 2017. Sous le mot d'ordre «On va faire les soldes à Paris!», le rassemblement, relayé notamment par Eric Drouet, l'une des figures du mouvement, doit rejoindre la place de l'Etoile, en haut des Champs-Elysées vers 17h00. Les premiers gilets jaunes sont arrivés en début de matinée au coeur d'un périmètre ultra-sécurisé dans ce quartier chic de l'ouest parisien où de spectaculaires violences s'étaient déroulées au pied de l'Arc de Triomphe le 1er décembre. Un important dispositif policier était déjà déployé avec la présence notamment de quatre véhicules blindés à roues de la gendarmerie. Les «gilets jaunes» ont prévu lors de leur parcours, de s'arrêter sur les grands boulevards, dans le centre de Paris, à proximité du lieu où est survenue hier matin une forte explosion dans un immeuble due au gaz, qui a fait deux morts, selon un dernier bilan. Ailleurs en France, les manifestants commençaient à se rassembler dans les centres des principales villes, notamment à Bourges, une ville de 66.000 habitants située dans le centre, où des nombreux «gilets jaunes» s'étaient donnés rendez-vous. A la mi-journée, ils étaient environ 1200 à manifester dans le calme dans le centre historique de Bourges, alors que la préfète de la région y avait interdit tout rassemblement. Alors que le mouvement avait connu un essoufflement en fin d'année, la mobilisation d'hier parait retrouver le niveau d'avant Noël, selon le patron de la police nationale. Le 15 décembre, 66.000 personnes avaient été décomptées en France, selon des chiffres officiels contestés par les «gilets jaunes». Les autorités s'attendaient à une mobilisation «plus forte» et «plus radicale» samedi et ont prévu un fort dispositif sécuritaire, en déployant 80.000 policiers et gendarmes à travers la France, et près de 5000 à Paris. Dans la matinée, 30 personnes ont été interpellées à Paris, notamment pour port d'arme prohibée. «Ceux qui appellent aux manifestations demain savent qu'il y aura de la violence et donc ils ont leur part de responsabilité», avait déclaré vendredi le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner. Cette journée a valeur de test pour Emmanuel Macron et son gouvernement. Le mouvement, dont l'impact économique sur l'économie française est sévère d'après les autorités, reste populaire dans l'opinion publique malgré les violences croissantes, qui ont émaillé régulièrement les mobilisations. Depuis le 17 novembre, des Français issus des classes populaires et moyennes dénoncent la politique fiscale et sociale du gouvernement, qu'ils jugent injuste, et réclament plus de pouvoir d'achat. Ces «gilets jaunes» sont restés insensibles aux concessions annoncées par M. Macron pour tenter d'apaiser la crise.» Vendredi, le chef de l'état s'est attiré des critiques en déclarant que «les troubles que notre société traverse sont parfois dus au fait que beaucoup trop de nos concitoyens pensent qu'on peut obtenir» quelque chose «sans que cet effort soit apporté». L'exécutif doit lancer mardi un grand débat national pour rapprocher la population des décideurs politiques. L'exécutif a fait de cette consultation sa priorité des premiers mois de l'année, y voyant une porte de sortie de la crise sociale, mais aussi la possibilité de reprendre la main politiquement. L'enjeu est de taille, au moment où la défiance vis-à-vis des institutions politiques et des acteurs de la vie démocratique en France, au premier chef Emmanuel Macron, est au plus haut, selon une enquête d'un institut français de recherches politiques, le Cevipof.