«Les institutions de l'Etat n'ont pas le droit à l'erreur», a-t-il attesté. Le président de la République a exhorté l'institution judiciaire à accélérer le processus de mise en oeuvre des textes d'application de la charte pour la paix et la réconciliation nationale. «Il convient pour la justice de mettre en application les dispositions de la charte avec la célérité nécessaire», a-t-il déclaré dans son discours d'ouverture de l'année judiciaire. Et au chef de l'Etat d'ajouter: «L'esprit de la charte doit être résolument respecté». Ces deux précisions de l'initiateur du projet de réconciliation nationale sonnent comme un rappel à l'ordre, à peine voilé, à l'adresse d'une institution chargée de concrétiser sur le terrain les grands axes de son projet. «Il est important de préciser que c'est à la justice que revient l'honneur de mettre en oeuvre l'essentiel des mesures découlant de la charte pour la paix et la réconciliation nationale, approuvée souverainement par le peuple algérien, dans son écrasante majorité, lors du référendum du 29 septembre 2005». La sortie du président intervient dans une conjoncture politique très particulière pour le pays. En effet, beaucoup d'encre a coulé sur la nature de ces lois et sur les véritables bénéficiaires de la démarche défendue par le président de la République. Sans aller jusqu'à dévoiler les grandes orientations des textes d'application, le chef de l'Etat a néanmoins rappelé la «nécessité de concrétiser rapidement la volonté populaire de tourner la page sur cette phase douloureuse de notre histoire et aborder l'avenir sous d'autres auspices, dans la sécurité et avec optimisme, espoir et assurance.» Le rôle de la justice et de toutes les institutions de l'Etat est plus que primordial dans ce processus. C'est dans ce sens que leur fonctionnement, défend-il, doit être exemplaire pour «regagner la confiance des citoyens». Le rétablissement de la paix et de la sécurité devra permettre à l'institution judiciaire de mieux accomplir sa mission constitutionnelle de protection des droits et libertés des citoyens, et de répondre ainsi à ce que nos concitoyens en attendent. Mettant en garde contre toute déviation de la volonté populaire, il a ainsi souligné qu'«il ne nous est pas permis de commettre des erreurs dans l'interprétation des signes avant-coureurs lancés par le peuple qui aspire à un avenir meilleur». Dans ce contexte, M.Bouteflika insiste sur le fait que toutes les conditions doivent être inéluctablement réunies pour parvenir à tourner définitivement la page noire de la tragédie nationale, panser les plaies et réparer les préjudices, selon une méthode juste et clairvoyante basée sur la magnanimité, l'équité, la réinsertion et la mobilisation des compétences, «en vue d'une réconciliation des Algériens avec eux-mêmes et avec leur histoire.» L'occasion pour lui de rappeler que le référendum du 29 septembre dernier a montré le consensus social autour de la réconciliation nationale et il témoigne «de la profonde aspiration» de l'ensemble des Algériennes et des Algériens à dépasser la crise sociale et politique qu'ils ont vécue plus d'une décennie durant. A ceux qui émettent des doutes sur la réussite de la démarche réconciliatrice, il confirme que ce «consensus» traduit la soif des Algériens de dépasser la violence, la haine et la division et de retrouver la voie du progrès et de la prospérité. Il a permis aussi de «transcender les conditions d'un passé difficile jalonné d'épreuves qui ont failli tuer en nous tout espoir et durant lequel une partie importante de notre énergie a été gaspillée». Pourquoi s'est-il senti obligé de rappeler à l'ordre l'institution judiciaire? Et puis ces messages sont-ils réellement adressés au pouvoir judiciaire ou à des cercles au sein du pouvoir qui s'opposent à son projet? M.Laouamri, magistrat à la Cour suprême, rencontré en marge de la rencontre, nous a précisé que «la justice doit prendre le temps nécessaire dans la mise en oeuvre de ces textes». «Nous sommes devant plusieurs cas liés au terrorisme. Il est question de faire un travail très minutieux pour veiller à la prise en charge globale du problème». Plus politique, le président du MSP et ministre d'Etat. M.Boudjerra Soltani a estimé que «c'est au président qu'appartient la responsabilité de fixer le délai nécessaire pour annoncer les dispositifs d'application de la charte». Enfin, au MSP, on penche plutôt pour des ordonnances présidentielles, «sachant que le peuple a déjà exprimé son opinion le 29 septembre».