M.Laâgab est universitaire, écrivain, journaliste, considéré comme observateur attentif de l'actualité politique nationale. Il donne son analyse de la campagne électorale des partielles qui vient de se terminer. Sans complaisance, il met sur un pied d'égalité et le pouvoir et les partis politiques qui s'entêtent à jouer le repositionnement permanent dans une région sensible. L'Expression: Quelle analyse faites-vous de la couverture médiatique de la campagne électorale des élections partielles qui auront lieu le 24 novembre en Kabylie? Mohamed Laâgab: La couverture médiatique de la campagne électorale a été faible. Elle m'a donné l'impression d'assister à un non-événement. A l'exception de quelques journaux et dans quelques communes, les médias ont été quasiment absents. Est-ce que les médias lourds ont joué le jeu? Non. Il n'y a pas eu vraiment de couverture officielle même si l'événement est officiel. Peut-être parce que le mandat est limité à moins de deux ans, les médias lourds n'ont pas daigné assurer une couverture digne d'une élection. Peut-être que la campagne pour le référendum a été pour quelque chose. En tout cas, on attendait mieux des médias lourds. Il n'y a pas eu de débats sur les plateaux de télévision ni dans les radios comme on avait l'habitude de le voir lors des autres rendez-vous électoraux. Est-ce que les partis en lice ont présenté des programmes électoraux convaincants? Il n'y avait pas de programmes électoraux. On a essayé de vendre des paroles à une région. Il y avait eu des discours de circonstance. Les partis traditionnels ont mis l'accent sur le truquage anticipé de ces élections en essayant de mettre en doute la faisabilité même des partielles. Il y a eu bien sûr une concurrence entre le FFS et le RCD, d'une part, et les partis de l'Alliance (le FLN et le RND), d'autre part. Les archs ont de leur côté dirigé les critiques contre les partis politiques. Chacun a cherché à se positionner. Mais leur crainte est justifiée, parce qu'ils ont joué, à un certain moment, le rôle des partis dans la région. Les partis traditionnels ont aussi échoué dans leur ambition de devenir des partis nationaux. Ils viennent de confirmer encore une fois leur échec. Parlons, si vous voulez bien, des votants. Est-ce qu'il y a eu engouement lors de la campagne? Les citoyens ont assisté avec froideur à la surenchère. Mais ce n'est pas leur faute. C'est l'échec d'une classe politique, y compris du pouvoir politique. Ils ont voulu maintenir la région dans sa spécificité alors que les gens aspirent à faire partie de la communauté nationale en gardant leur spécificité. Ils refusent d'être les otages des partis politiques. Quel est donc votre pronostic quant à la participation? Pas plus de 15%. Mais ce ne sera pas une victoire de ceux qui ont appelé au boycott. Les citoyens attendent des changements qui ne viennent pas. Ils attendent un discours nouveau. Tous les thèmes sont devenus caducs. Même le thème de la réconciliation, ils l'ont rendu caduc. C'est pareil pour le thème de la berbérité. J'estime que le pays est dans une situation grave. Il n'y a pas d'idées nouvelles qui circulent, ni chez le pouvoir ni chez les partis politiques.