Les manifestants continuent à rejeter «le système» Il s'agit notamment de maîtriser les enjeux et de rassembler toutes ses forces pour faire barrage aux tentatives de confiscation du mouvement. Deux mois jour pour jour après son déclenchement le 22 février dernier, le mouvement bute sur le refus du pouvoir d'amorcer le moindre changement politique à la hauteur de l'élan populaire inédit et historique qui a ébahi le monde. Jusqu'à ce jour, seule l'application stricte de l'article 102 est mise en branle. Cela aboutira non pas au changement du système du pouvoir, mais au changement de personnes. Loin de s'affaiblir, la mobilisation est restée intacte. Face au pouvoir qui tourne le dos à la rue, le mouvement n'aura pas d'autre choix que d'opter pour d'autres actions musclées, comme la grève générale et la désobéissance civile. La hausse du plafond des demandes, le rejet radical et méfiance à l'égard de tout ce qui symbolise le pouvoir, la non-émergence des représentants et de porte-paroles du mouvement caractérise la scène politique ces derniers temps. En ces moments cruciaux de grandes manoeuvres, des intrigues et tractations menées loin des feux de la rampe, le mouvement déploie tous ses ressorts pour dépasser l'actuelle confusion et se projeter dans l'avenir. Il s'agit notamment de maîtriser les enjeux et de rassembler toutes ses forces pour faire barrage aux tentatives de confiscation ou de détournement du mouvement. Malgré la mobilisation des millions d'Algériens, le pouvoir égal à lui-même, refuse de céder sur les revendications fondamentales du mouvement. Il est question, notamment de l'ouverture d'une transition démocratique contrôlée non pas par les symboles ou les hommes-clés du régime, mais par les instances émanant du mouvement. Le seul compromis politique escompté pour passer à l'étape suivante. Le chef d'état-major, Ahmed Gaïd Salah qui s'est retrouvé face à face avec le mouvement, s'est contenté de mettre en oeuvre un agenda électoral conforme au formalisme constitutionnel. Le seul «compromis» concédé par le pouvoir est la destitution forcée du chef de l' Etat, Abdelaziz Bouteflika pour son incapacité à gouverner. Cela a juste servi à «dépasser les blocages» induits par le statu quo. Par conséquent, la scène politique reste sous l'emprise des interventions du commandement militaire. Désormais, les Algériens demeurent suspendus aux réponses politiques, apportées par le chef d'état-major de l'ANP, Ahmed Gaïd Salah, à leurs revendications. En s'entêtant à imposer d'en haut, la solution constitutionnelle, à travers l'application de l'article 102, l'armée qui a toujours servi de base sociale et colonne vertébrale du système, risque d'être disqualifiée à son tour, nonobstant la prudence observée jusqu'ici par les manifestants. La persistance à vouloir imposer cette option est interprétée comme «une volonté de confisquer le soulèvement populaire». Les observateurs avisés indiquent que le mouvement n'a abouti à aucun résultat, après cinq vendredis consécutifs de mobilisation. Presque aucune réponse correcte n'est apportée aux revendications de la rue. Aujourd'hui, la diversion a pris la forme d'une chasse aux sorcières et des règlements de comptes. Des poursuites judiciaires sont lancées, alors que le pouvoir judiciaire reste dominé et totalement dépendant du pouvoir exécutif. De multiples plans et manoeuvres dilatoires, visant à maintenir le système, ont été échafaudés par ceux qui règnent sur les ruines du système.