«Cette série ouvrira l'appétit à nos cinéastes», prédit l'ex-directeur du théâtre régional d'Oran, Ghaouti Azri. Le drama enregistre des records d'audience. Les 20 épisodes déjà diffusés ont jusque-là été vus plus de 20 millions de fois sur YouTube. Nécessairement, le travail fait par les Djeriou est sans aucun doute de haute facture, malgré le budget dérisoire. N'en déplaise aux autres ou encore à ces adeptes de la léthargie se cachant derrière de fallacieuses assertions imputant leur inertie aux problèmes de financement. «Avec le peu de moyens, nous avons réalisé notre feuilleton», dira Abdelkader Djeriou en exclusivité à L'Expression. Tout a commencé à partir de simples échanges et de correspondances avant que le mythe ne devienne réalité. Ouled Lahlal est aujourd'hui dans tous les ménages. C'est d'ailleurs, l'ambition principale des promoteurs de ce drama, dont Djeriou nous expliquait que «le feuilleton est destiné aux ménages». Qu'est-ce qui lui a valu donc une telle réussite? D'autant plus qu'à l'instar des habitants du reste de tout le pays, ceux d'Oran se sentent, eux aussi, dans ce film, accomplissant leur devoir de comédiens, mais surtout d'Algériens vivant ce que vivent tous les Algériens dans leur quotidien, dans leurs défauts, dans leurs qualités, dans leurs connivences etc. L'art n'est pas adversaire L'ex-directeur du théâtre régional Abdelkader Alloula et dramaturge, Ghaouti Azri, a été explicite en livrant le fond de sa pensée en décortiquant le feuilleton dans tous ses volets. «Le feuilleton Ouled Lahlal représente pour moi un travail artistique de haut niveau tant sur le plan des scénarii, de la réalisation, de la composition musicale que de l'interprétation-jeu», a-t-il expliqué insistant toutefois sur «cet aspect particulier de l'oeuvre». Sur sa lancée, il a souligné le fait que «c'est la première fois où nous avons affaire à un jeu collectif homogène et soigné». «Bien entendu, la prestation de Abdelkader Djeriou est tout simplement fracassante, notamment dans le dernier épisode du samedi où il crève l'écran», a-t-il expliqué. Ghaouti Azri n'est pas resté sur cette soif en rassasiant cette avidité exprimée par ce téléspectateur, tout en se plaçant à sa place, en suivant de prés le feuilleton, mais aussi en recueillant les aveux à la pelle de ces fous du petit écran pour en faire son idée, plutôt sa conviction. Le critique d'art ne peut être sensible au travail fait s'il ne se réfère pas à cette énergie qui se répand par l'Autre, Le téléspectateur en particulier. Azri Ghaouti, en a fait ce qu'il fallait faire, affirmant que «plusieurs personnes m'ont avoué avoir pleuré». «Transmettre des émotions est une caractéristique majeure de la force d'un acteur et c'est ce par quoi se distingue Djeriou», a-t-il expliqué ajoutant que «ce produit artistique vient nous réconcilier, dans une certaine mesure, avec le cinéma. Je voudrai saisir l'occasion pour apporter mon point de vue sur le prétendu mécontentement des habitants du Derb». Et d'ajouter que «prendre ces habitants comme adversaires de l'art, c'est méconnaître ces gens. J'ai travaillé au théâtre qui se trouve dans ce quartier pendant 45 ans et ses résidents ont toujours aimé et respecté l'art. Ils savent qui les aime et se rapproche d'eux et celui qui leur tourne le dos». La petite Rym Ainsi donc, le feuilleton de Djeriou ne peut subir de contrainte ou de dédain du télespectateur qui l'a adoptés à bras ouverts. Ouled Lahlal, par sa thématique populaire, ne pouvait qu'être adopté parce qu'il met en exergue les difficultés de leur vie», a expliqué Ghaouti Azri ajoutant que «c'est une bonne chose qu'Oran accueille ce film car beaucoup de ses comédiens y ont joué et certains ont été même une révélation comme c'est le cas de la petite Rym». «J'espère que Ouled Lahlal va ouvrir un appétit vers la qualité de la part de nos cinéastes», ambitionne-t-il. Idem pour l'homme de cinéma et auteur-scénariste Hafid Boualem qui met en exergue la valeur apportée par ce feuilleton dont chaque épisode est tant attendu par les hommes, les femmes, jeunes et moins jeunes, en un mot par les ménages. «Le feuilleton Ouled Lahlal se base d'abord sur un scénario complexe, riche et très bien structuré», dira Hafid Boualem ajoutant que «pour ceux qui connaissent l'histoire de la «drama du pays du Nil, Ouled Lahlal rappelle de par son écriture fouillée, ses multiples sous-intrigues, et la crédibilité de ses personnages, la magnifique fresque du film El Harafich, tiré du roman de Najib Mahfoud, ou le feuilleton Dawarane Chobra de Amrou Edali. Tempête dans un verre d'eau «A mon avis, et bien que la scénariste Rafika Boujday soit tunisienne, l'influence de l'école égyptienne est évidente dans l'écriture de ce feuilleton, dont les dialogues ont été écrits dans un dialecte non algérien puis traduits vers l'oranais», a-t-il dit expliquant que «le succès de ce feuilleton et l'identification des Oranais dans ses héros et personnages démontrent que lorsque le scénario est solide et le réalisateur créatif et doué, renforcé par une excellente direction d'acteurs, le produit ne peut être que bon. Et c'est le cas de Ouled Lahlal, qui a hissé la barre très haut. Il sera ardu de le rattraper». Outre les critiques positives des hommes du domaine, les Oranais, eux, ont vite fait d'accorder leur soutien en adoptant le feuilleton contre lequel quelques voix éparses ont tenté une polémique qui a vite fait de tourner en tempête passagère contenue dans un petit verre d'eau. Le fait est inédit. Le soir du13 mai dernier, c'est-à-dire juste après la rupture du jeûne, des dizaines de personnes se sont rassemblées à la place du 1er Novembre (ex-place d'Armes) pour apporter leur soutien à l'équipe du feuilleton Ouled Lahlal que diffuse depuis le début du Ramadhan la chaîne TV Echourouk + en prime time. Ce rassemblement a été une belle rossée apportée à un communiqué anonyme repris par une chaîne TV privée et dans lequel des pseudo-activistes de la société civile d'Oran» dénoncent «le contenu du feuilleton Ouled Lahlal parce qu'il porterait «atteinte» à la réputation de la ville à «travers des scènes, des mouvements et des expressions» dégradants. Selon la même chaîne, la société civile oranaise a demandé «l'arrêt immédiat» de la diffusion du feuilleton. Que nenni. L'appel a vite fait de tomber dans l'eau alors que ses instigateurs, si instigateurs il y a, n'ont plus donné signe de vie en s'évaporant dans la nature, fuyant la vérité réelle des Oranais ayant donné publiquement leur quitus pour la diffusion du produit cher des Oranais, tourné dans leur ville à laquelle ils sont attachés fermement. La création n'a pas de limites Abdelkader Djeriou, qui interprète le rôle principal dans le drama, a pris la parole devant la foule, accompagné par d'autres comédiens comme Mohamed Khassani ou Imene Nawal, pour saluer les Oranais et souligner leur hospitalité et leur accueil pour l'équipe du tournage. «La ville d'Oran est celle des arts et de la culture. Méfiez-vous du système pourri qui veut nous diviser et méfiez-vous des manipulations. Nous sommes tous des Algériens», a-t-il déclaré. Sur son compte Facebook, Abdelkader Djeriou, le concepteur artistique de trois sitcoms à succès comme Jornane El Gosto, Nass Stah et Dekious ou Mekious, a posté un live sur Facebook accusant une chaîne TV de diffusion de «fausses nouvelles». Et depuis, l'histoire a été close. «Cela fait six mois que nous travaillons presque 16 heures par jour sur ce feuilleton. Ouled Lahlal a été tourné à Oran. Le tournage aurait pu avoir lieu aussi à Béjaïa, Chlef, Constantine ou ailleurs. Nous ne parlons pas avec le filtre. L'artiste doit être franc avec sa société», a soutenu le comédien. Tourné en grande partie au quartier populaire Ederb d'Oran et réalisé par le Tunisien Nacerddine Shili, Ouled Lahlal raconte l'histoire de deux frères Merzak (Abdelkader Djeriou) et Zinou (Youcef Sehairi), bandits justiciers, qui décident d'habiter dans un quartier pour rechercher leur soeur après le décès de leur mère. Ils découvrent au fil des jours que le quartier est pris en main par un trafiquant de drogue qui use et abuse de la misère des gens et que le lieu cache des secrets. Ouled Lahlal rassemble une pléiade de comédiens comme Malika Belbey, Ahmed Meddah, Mohamed Khassani, Souhila Maâlem, Mustapha Laribi et Djellab Ben Abdallah.