La léthargie ramadhanesque n'a plus de place chez ces milliers de manifestants bravant cette chaleur printanière, en sortant massivement dans la rue pour apporter leur réponse à chacune des étapes marquant l'évolution de la scène politique nationale. C'est ce que l'on a relevé chez plusieurs milliers d'Oranais, ayant veillé jusqu'à des heures tardives de la nuit, en cette fin de semaine, sortis en force hier pour rejeter totalement les dernières «offres» émanant de plusieurs parties et partis. Rien n'est sorti de l'ordinaire chez les Oranais et les Oranaises de toutes les couches sociales et de toutes les corporations, mis à part cette forte mobilisation et cette détermination quant à aller de l'avant jusqu'à la satisfaction de la revendication principale de tout le peuple algérien: le changement du système. Les marcheurs se sont donc donné rendez-vous à la place du 1er-Novembre, ex-place d'Armes dès le milieu de la journée d'hier, tous hissant haut les couleurs nationales et des banderoles portant les noms et prénoms des responsables et des personnalités ayant longuement régné, mais honnis par ces populations, ne cessant de réaffirmer et de renouveler leur velléité de se maintenir dans la rue jusqu'au dénouement de la crise, le départ de ce qu'ils qualifient «des pions» du système bouteflikien. La grande procession s'est mise en branle à partir donc du siège de l'Hôtel de ville ou encore de l'APC d'Oran, pour rallier tout de suite l'angle du boulevard de la Soummam avant de parcourir le long du boulevard Emir Abdelkader. Au départ, les manifestants ont descendu en flammes les élus locaux, les traitant de tous les noms d'oiseaux tout en les accusant de «constituer une bande de mafieux». Les marcheurs, déchaînés, scandant à tue-tête des slogans hostiles au pouvoir, ont aussitôt rallié la grande bâtisse de plusieurs étages abritant la mouhafadha d'Oran. Marquant une petite pause devant cet immeuble faisant face au Grand Café Riche, les manifestants n'ont pas ménagé leurs efforts pour tancer les cadres de l'ex-parti unique à lâcher «la scène» de la politique. Durant cette halte furtive, les marcheurs ont renouvelé leur revendication habituelle plaidant «le dégagisme». «FlN dégage», répétaient, comme dans une grande chorale, plusieurs centaines de manifestants ayant poursuivi leur chemin pour rallier la très célèbre rue Larbi-Ben M'hidi à partir de la bifurcation avec le boulevard Hamou Boutelilis. Ce très long passage incite à ne pas biaiser ni omettre ce qu'il faut «dire» en tenant des propos hostiles au pouvoir. D'autant plus que cette rue porte le nom d'un célèbre chahid dont la mémoire est à immortaliser à chacun des rendez vous revendicateurs, tout comme l'a été le défunt martyr, Larbi Ben M'hidi. Et ce n'est pas tout. Battant toujours le pavé sous une chaleur torride et un fort taux d'humidité, les manifestants se sont regroupés à la place des Victoires où ils sont exulté pour la victoire de la rue sur la politique du sérail. Non contents, les marcheurs ont pris la destination de la wilaya d'Oran où ils ont organisé un véritable festival de slogans contre la répression qui s'abat sur les citoyens, les emprisonnements, les poursuites judiciaires les autorités pourchassant les prisonniers d'opinion. Cette halte a été dédiée à Kamel-Eddine Fekhar, mort à Blida après son transfert de la prison de Ghardaïa dans un état de santé critique.