Cette démarche intervient après les deux expériences phares dans le continent africain, initiées par l'Afrique du Sud et l'Algérie. Le rapport final de l'instance «Equité et Réconciliation » installée officiellement par le Roi Mohamed VI, le 7 janvier 2004 a brossé un tableau noir sur la situation des droits de l'homme dans ce pays à l'époque du règne de son père Hassan II. Cette commission composée d'un président et de 16 membres de différentes sensibilités l'IER a disposé de 23 mois pour examiner une période de 43 ans. Au terme de ses travaux, avant d'étaler au grand jour la longue liste des exactions dévoilées par l'enquête, l'instance a tenu à ménager le nouveau roi en estimant «qu'un progrès significatif a été enregistré entre janvier 2004 et novembre 2005, quant au degré d'établissement de la vérité sur les graves atteintes aux droits de l'homme qu'a connues le Maroc». Cette précision de taille met le roi chérifien en position confortable sur les deux plans, national et international. D'ailleurs ce dernier a salué samedi, le travail de la commission et a exhorté les différentes parties concernées à se plier aux recommandations de l'IER dans un discours au peuple, prononcé samedi. Revenons au rapport en question. Il a fait état de plusieurs cas de détention arbitraire, de recours privilégié à la torture et de mauvais traitements lors de l'interrogatoire des détenus dans les affaires à caractère politique « dans le but non seulement d'arracher des aveux, mais aussi de les châtier et de les humilier». Le document évoque aussi des cas de disparition forcée. Cette violation «a été commise de manière générale contre des personnes isolées, enlevées de leur domicile ou dans des circonstances indéterminées, et détenues dans des centres illégaux». Samedi, le roi a exprimé sa détermination à établir «toute la vérité sur cette époque» et de «consacrer l'équité et la réconciliation». Mais sans, néanmoins, exprimer ses excuses au peuple. Une tâche cédée selon des sources à Rabat, au premier ministre Idriss Djettou. Afin de garantir la non-répétition des atteintes «graves» des droits de l'homme et «de consolider le processus de réformes dans lequel le pays s'est engagé» l'IER a émis une série de recommandations portant notamment sur des réformes constitutionnelles, la mise en oeuvre d'une stratégie nationale de lutte contre l'impunité et le suivi des recommandations. Les mesures de réparation prennent des formes variées, tant celles classiques, relatives à l'indemnisation financière, que celles relatives à d'autres modalités de réparation, telles la réhabilitation, l'insertion, le rétablissement des victimes dans leur dignité et le recouvrement des droits spoliés. Au Maroc, Cette démarche a été accueillie avec scepticisme. Une dirigeante de la plus importante organisation islamiste marocaine a critiqué l'instance Equité et réconciliation (IER) assurant que son travail fait partie d'une mise en scène destinée à «redorer le blason» du palais. «Je reste sceptique sur le travail d'une instance officielle créée par le palais pour redorer un blason plutôt terni», a déclaré dans un entretien au Journal hebdomadaire, Nadia Yassine, porte-parole officieuse de l'association Al Adl Wal Ihssane (Justice et bienfaisance). Pour Mme Yassine, fille du cheikh Abdessalam Yassine - chef spirituel de l'association - «Le Maroc est piloté à vue, et il a besoin, non pas de simples recommandations, mais de profondes exigences de réformes de son système de gouvernance». Cette démarche royale constitue une autre alternative de réconciliation . Auparavant il y avait l'expérience sud-africaine. Le pays de Mandela a su éteindre grâce à sa démarche «Vérité et justice», l'un des dernier foyers de l'apartheid dans l'histoire de l'humanité. Vient ensuite l'expérience algérienne qui a mis fin à un conflit de plus de 15 ans de sang et de destruction. Le défi a été relevé grâce à la démarche de réconciliation initiée par M.Bouteflika qui s'est soldée par la tenue du référendum du 29 septembre, approuvée par une majorité écrasante du peuple algérien.